Kivari #1

By aIexkiz

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Après s'être aventurée dans une forêt interdite, une adolescente développe un étrange pouvoir lié à un peuple... More

1- Prologue
2- La fin de l'été
3- L'appel
4- La fille de la forêt
5- Meori
6- L'étau
7- Le lien
8- Havenly High
9- Ennemie ?
10- Petit meurtre entre amis
11- Résolutions
12- Sans issue
13- L'arbre brisé
14- Kila
15- La proposition
16- Marquée
17- Questions
18- Madame Personne et le chevalier servant
19- Un caractère de chien
20- Collaboration forcée
21- Le jour de Christophe Colomb
22- Equilibrium
23- Un grand honneur
24- Esprit animal
25- Liaison chimique
26- Dans le sous-bois
27- La proie
28- Kivari
29- Embrasée
30- Sous l'écorce
31- La porte secrète
32- Piégée
33- Logan Hoyt
34- Présentations
35- Émoi
36- À l'orée de la forêt
37- Fuis-moi, je ne suis...
38- Le noy'sat
39- L'homme à la couronne de fougères
40- Sur la voie
41- L'eirsha
42- Le Pacte
43- Transition
44- Première lune
45- Le jardin d'Eden
47- Brûlures
48- La langue morte
49- Entrelacées
50- Improvisation
51- Les Osborn
52- Du sang et des lames
53- L'étoile au bout du monde
54- La rumeur
55- Anonyme
56- Incertitudes
57- Homecoming
58- Axiome
59- Le chat et la souris
60- Un être à part
61- Humain et animal
62- Révélations
63- À l'aube de l'hiver
L E X I Q U E

46- Fiévreuse

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By aIexkiz

La journée du samedi s'écoula tristement. Malgré mes efforts, je n'avais rêvé ni de la forêt, ni de Kila. Je n'avais d'ailleurs pas rêvé du tout. J'eus mal à la tête durant presque toute la journée, et les médicaments prescrits par le docteur Claire Atwood n'eurent aucun effet. En apparence du moins car, dans l'après-midi, je pus quitter mon lit pour m'affaler devant la télévision du salon. Je m'endormis deux fois sans réussir à deviner l'identité de l'assassin du thriller policier qu'ils avaient diffusé à la télé. Ma mère avait passé une partie de l'après-midi dans ce qu'elle appelait son bureau, à savoir une toute petite pièce exigue simplement munie d'une table et d'une sacrée pile de dossiers qu'elle ramenait parfois du commissariat. La présence d'un ordinateur portable était récente, et uniquement due à mon insistance forte sur le besoin pour elle de se moderniser. De temps à autre, elle s'était extirpée de son antre pour venir me questionner — et me réveiller accessoirement — sur mon état. Est-ce que j'avais toujours mal à la tête ? Avais-je suffisamment de couvertures ? Pouvais-je baisser le son ? Est-ce que j'avais faim ?

Et toutes les fois où je n'avais pas répondu — au prétexte de la fatigue — elle s'était attardée sans raison devant l'écran pour commenter le manque précision ou de cohésion du film : les policiers ne raisonnaient pas comme ça pour appréhender un suspect, un criminel n'aurait jamais commis une erreur aussi grossière, quant à l'équipement, il n'était pas du tout réaliste et la procédure ne se déroulait absolument pas de cette façon-là dans la vraie vie. Si je n'avais pas eu la migraine, je lui aurais répondu qu'il fallait juste se rappeler qu'il s'agissait d'une fiction faite pour divertir, et non d'un documentaire scientifique sur les moyens d'action de la police de Havenly. Mais cette fois-ci, j'avais simplement attendu que la page de publicité habituelle vienne couper son procès-verbal. Au lieu de la pause publicitaire, un flash spécial portant sur l'inefficacité de la police concernant l'affaire de la rivière avait suivi. Tendue, j'avais glissé un regard discret à ma mère.

Celle-ci avait consciencieusement écouté le compte-rendu d'une Felicia Mc Alistair plus mordante que jamais. La journaliste avait parlé «d'obscure manipulation, de communication brouillonne, de dissimulation honteuse» et d'autres qualificatifs que je n'avais pas retenu. Fatiguée d'entendre la voix suave de Felicia Mc Alistair émaner du poste de télévision, je m'étais emparée de la télécommande afin de changer de chaîne, mais ma mère m'avait arrêtée d'un simple geste de la main, les yeux rivés sur l'écran.

— Mais je veux regarder un film ? avais-je protesté en espérant gagner la partie.

Ma mère n'avait pas répondu. Pire, elle avait augmenté le son de la télévision ! Mal à l'aise et contrainte, j'avais donc enduré l'intégralité du flash télévisé. J'avais vu la journaliste s'agiter avec son micro, postée tel un vigile devant le commissariat central. Toujours aussi bien maquillée, vêtue d'un tailleur brun cette fois, l'air aussi sûr d'elle qu'à l'accoutumée. Un véritable professionnel en exercice devant la caméra. Derrière elle, plusieurs agents de police aux visages fermés. Sa présence n'était toujours pas souhaitée. J'avais remarqué d'autres journalistes qui, micros en main, tentaient eux aussi de passer la mince barrière formée par quatre policiers en uniforme. Puis le flot de journalistes s'était soudainement déplacé d'un seul bloc, comme un serpent de chair humaine attiré par une proie. À grands renforts de flashs photo, la caméra de Haven News avait dérivé vers la porte d'entrée du commissariat lorsqu'un homme en costume gris clair en avait émergé.

Âgé d'une soixantaine d'années tout au plus, il avait l'air furieux et composé à la fois. Le visage rouge, les sourcils broussailleux et froncés, la moustache grisonnante ébouriffée, il s'était avancé à pas décidé vers Felicia Mc Alistair et lui avait pris son micro des mains sans lui laisser la possibilité de formuler la moindre objection. Je n'avais dans un premier temps pas reconnu l'homme qui s'était emparé de l'arme personnelle de la journaliste. Il avait fallu que ma mère acquiesce à plusieurs de ses déclarations pour que je confirme son identité : Clayton Barnes, homme de loi en charge du commissariat central. Son intervention n'avait pas duré bien longtemps. Il s'était contenté d'expliquer qu'il était trop tôt pour parler de «retours», et qu'il était «imprudent de divulguer des éléments probants sous peine d'entraver l'enquête en cours». Felicia Mc Alistair avait bien essayé de poursuivre son interrogatoire, mais le commissaire l'avait écartée comme un insecte nuisible avant de disparaître derrière les lourdes portes du commissariat malgré les interpellations en règle des journalistes. Après ça, la page de publicité s'était de nouveau lancée, mais ma mère avait éteint la télé d'un geste sec, oubliant sans doute que j'étais en train de la regarder à l'origine. Elle s'était éloignée vers son bureau en marmonnant à propos des «saletés de journaleux qui empêchaient les flics de bosser». Moi, j'étais restée sur le canapé toute seule avec ma migraine et l'écran noir de la télé.

~✶~

Le sommeil m'emporta en début de soirée, lentement mais sûrement. J'avais bu une tisane au miel sur ordre de l'officier Claire Atwood, celle-ci avait rapidement fait effet. Confortablement installée dans mon lit, j'avais profité de la chaleur prodiguée par mon corps et entretenue par la couverture pour me détendre. Elle était agréable au toucher, cette couverture. Elle m'enveloppait comme une couche protectrice qui m'enfermait dans un cocon de quiétude. Si douce... C'est ainsi que je glissai sans m'en rendre compte vers le sommeil. Douce contre ma peau nue... Délicate, comme ces doigts qui...

— Où étais-tu ?

La kanash se presse un peu plus contre mon dos. Elle chuchote encore à mon oreille, m'enlace et ne me laisse pas répondre. Ses mains me parcourent, me ramènent à elle, comme pour me rappeler que je leur appartiens. Elles laissent des sillons de désir brûlant derrière elles.

— Je suis... dans mon lit.

Ma réponse est timide. Je ne suis pas sûre de ce que j'avance. Mon esprit garde une vague conscience de ma présence dans cette chambre au premier étage, d'un tapis aussi, puis d'une lampe de chevet qui...

— Non ! Reste, ne repars pas. S'il te plaît, esh-kirith...

Ses lèvres se posent sur ma joue, puis descendent le long de ma nuque. Le souffle qu'elle exhale tout en me serrant me fait frissonner. Je sens l'herbe fraîche sous mes pieds nus. À côté de nous, le ruisseau chante plus qu'il ne coule et la lune brille haut dans le ciel de minuit. Tout est...

— Magnifique.

Je me retourne. Kila est aussi belle que fiévreuse. Elle me tend la main. Sa kahr se dessine déjà le long de son épaule. Je lui prends la main et elle sourit. Ses yeux brillent d'une lueur azurée. Ai-je la même ?

Le baiser qui suit coupe le flot de mes pensées.

La langue qui se mêle à la mienne écarte toutes mes incertitudes et renforce mon désir. Nous sommes femelles et nous nous appartenons. Je respire à plein poumons lorsque ses mains nous emprisonnent toutes les deux. Elle est si chaude... Il faut que je respire.

— Kila...

Prononcer son nom est une formule magique imparable. Elle aime m'entendre le dire durant nos ébats. Ce pouvoir l'électrise et je sens déjà son désir se dresser contre le mien : instinctif, sauvage et dominateur. À la manière du loup qui vit en elle. Et moi, je la laisse faire. Pour l'instant. Tout est si naturel ici bas... Nous nous épanchons sur le sol gorgé d'une magie qui m'échappe. Kila devient plus audacieuse, elle s'insinue comme une évidence à l'origine de tous mes vices nocturnes. Elle se retire presque aussitôt, luisante de sève, juste pour me provoquer. Et ça fonctionne.

— N'arrête pas...

Elle sourit lorsqu'elle entend ma supplique. Mais elle ne revient pas. Pas tout de suite. Elle m'apprécie d'abord, savourant ses doigts effilés un à un. Tous, sauf le dernier. Celui-là, elle me le réserve. Je l'absorbe docilement lorsqu'elle me le présente. Ce jeu entre nous est enivrant... Je sens qu'elle vacille lorsque ma langue l'entoure, mais elle résiste. Elle tient à ce qu'il n'en reste plus rien avant de... Je laisse échapper un gémissement involontaire lorsqu'elle reprend possession de moi. Kila a raison. Ce désir me ravage. Il ne demande rien, il s'exécute, tout seul, sans faux-semblants. Ce désir est violent.

Je n'ai plus la notion du temps.

Je ne sais pas où je suis, mes repères se sont volatilisés depuis si longtemps que je n'arrive même plus à me situer moi-même. Je ne comprends plus rien à ce que je suis, à ce qui m'arrive.

— Ouvre les yeux, esh-kirith. Reste avec moi...

Les yeux d'azur sont emplis de tendresse. Ils débordent d'un amour intemporel que la nature valide, sans se soucier du monde des hommes.

Qu'ai-je besoin de comprendre à part ça ?

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