SOANE WILSON,
- 18 heures, Appartement de Soane -
Mes derniers mots semblaient résonner pendant de longues secondes dans son esprit. Je déglutissais difficilement en essayant de masquer un sanglot. Mes yeux étaient embués; ils me brûlaient.
- Soane..., murmura t-elle tandis que je détournais enfin mon regard d'elle.
Je serrais les poings et haussais les épaules en secouant ma tête de gauche à droite. Ma mâchoire était crispée.
- Sors.
- Pardonne-moi...
- Je l'ai déjà trop fait, répondis-je froidement. S'il te plait. Sors.
- Qu'est-ce que je dois faire pour me rattraper? Dis-le moi. N'importe quoi. Ce que tu veux et je le ferais.
- Je n'suis pas une enfant, m'agaçais-je. Il ne suffit pas de me faire du mal, puis de m'acheter un présent pour me récupérer Ysia, c'est bien plus compliqué que ça.
- Peu importe, je veux me rattraper.
- Alors sors. Laisse-moi tranquille. Vraiment. C'est le seul moyen de ne pas empirer la situation.
- Il y a sûrement une autre solution, s'interrogea t-elle.
- Va t'en.
- Je suis sûre que...
- Sors ! la coupais-je, plus autoritaire.
Elle eut un mouvement de recul avant de se figer, les traits tendus et les lèvres entrouvertes. Elle semblait surprise. Surprise que, pour une fois, je lui tienne tête, elle qui avait tant l'habitude que je cède si facilement sous ses belles paroles. Elle comprit. Elle fit une légère grimace, comme du dégoût, avant de tourner les talons sans prendre la peine de refermer la porte. Je claquais celle-ci avant de me laisser tomber en soupirant. Non, je n'allais pas craquer. J'avais bien trop pleurer pour elle. Je n'étais pas qu'un casier de larmes dédié à cette fille. Non. J'étais bien plus que ça. Et elle devait le comprendre.
SOANE WILSON,
- 16 heures, Université -
J'étais assise sur un banc de la fac, à gribouiller mes notes pour essayer de les mémoriser. J'étais inscrite en droit et, malgré ma motivation, j'avais beaucoup de lacunes dans la plupart des matières. La majorité des élèves de ma promo étaient déjà rentrés chez eux, mais je préférais rester ici. Le vent faisait danser les feuilles mortes sur la pelouse, les faisant craqueler encore et encore dans une harmonie apaisante. J'adorais l'automne. D'autant plus que mes cheveux roux se confondaient avec la couleur des feuilles. Cette douce mélodie saisonnière fut interrompue par l'arrivée de Taylor, une fille de ma classe.
- Tu es toujours là?
- Je n'ai pas bougé d'ici depuis tout à l'heure, répliquais-je en levant les yeux de ma feuille.
- Wow, on peut dire que t'es impliquée dans tes études, affirma t-elle en s'asseyant face à moi.
- Ouais, si on veut, souriais-je faiblement.
- T'as l'air d'avoir passer une nuit affreuse...
- Comment ça?
- Tu as failli t'endormir en droit constit' ce matin, c'est tellement pas ton genre.
- Oh, erm... ouais. Pas une bonne nuit, avouais-je.
- Elle te tourmente toujours?
Je haussais les épaules en guise de réponse, et mes lèvres se pincèrent. Bien sûr. Elle me hante. Encore et encore. Et je crois qu'au fond, j'aime ça, j'aime savoir que je ne l'oublie pas.
- Et si tu me racontais tout ça autour d'un café, hein? proposa t-elle en posant sa main sur la mienne. Il caille ici.
Taylor était si amicale avec moi que ne pus refuser, même si ma raison aurait voulu que je reste ici à étudier jusqu'à ce qu'il fasse nuit.
TATE LANGDON
- 16 heures, Irish Coffee -
C'était son heure de pause. Souvent, je passais la voir. Prendre de ses nouvelles. M'assurer que tout allait bien pour elle. Pour le bébé. Le bébé... Et elle m'offrait un café, son café, sous les yeux furieux de son patron qui avait toujours un reproche à lui faire.
- Il t'as encore engueulé aujourd'hui? demandais-je.
- Ca fait partie de sa routine, je crois, plaisanta t-elle. Avec le fait d'inspecter notre uniforme toutes les 30 minutes.
Elle portait une robe noire cintrée au niveau de ses hanches et évasée en bas, ainsi qu'un collant foncé et devait se déplacer en rollers bleus pastels.
- Ton ancien travail ne te manque pas trop? questionnais-je en sirotant mon café.
- Le bruit des aiguilles me manquent tellement. Passer ma journée à parler tatouages, bordel ce que j'ai pu aimé ça. Ca change des discussions plates d'ici...
- Pourquoi tu restes là? soupirais-je.
- C'est le seul qui accepte de m'employer alors que je suis enceinte.
Je faillis recracher ma boisson chaude. Ysia me tendit une serviette en papier.
- Excuse-moi, c'est... J'ai pas encore l'habitude.
- Pas de soucis, balbutia t-elle visiblement gênée.
- Tu comptes faire quoi?
- J'ai plus trop le choix tu sais. Je peux plus avorter, Tate.
Mes lèvres se pincèrent et j'entourais la tasse chaude de mes deux mains tremblantes.
- Je pourrais... Genre, essayer de l'assumer. Non?
- C'est pas aussi simple que ça... Comme... Ouais, il suffit pas de débarquer de dire "Hey, c'est papa !", imita t-elle. Vraiment.
- Je pense en être capable, affirmais-je, peu serein.
- C'est ça le problème ! lança t-elle en levant les bras avant de finalement baisser d'un ton. C'est... Il ne faut pas "penser" en être capable, il faut l'être. Et c'est toute autre chose. Je suis pas prête, moi, à devoir... Être maman, vivre avec des responsabilités. J'ai... j'ai vraiment pas la tête à ça, j'en veux pas moi de ce problème ambulant qui se fera un plaisir d'hurler pour un oui ou pour un non, peu importe l'heure, peu importe la raison.
Elle prit une longue inspiration en fermant les yeux pour tenter de reprendre son calme. Ma main se posa sur la sienne, comme pour lui signifier que j'étais là, face à elle, et que ce problème était aussi MON problème.
- La seule chose que je veuille pour mon avenir, c'est Soane.
- Ysia...
- Je sais, me coupa t-elle. Ne dis rien. Je... J'ai pas envie de te l'entendre dire. Ecoutes, je ferais mieux de retourner bosser. On a qu'à s'appeler ou... J'en sais rien. Désolé.
Elle soupira avant de se lever de sa chaise pour rejoindre l'arrière du comptoir. Elle avait l'air si différente depuis l'annonce de sa grossesse. Enfin... Pas vraiment différente... Je dirais plus... "Comme avant". Oui, comme avant. Avant toutes ces mauvaises décisions.
YSIA SCOTT
- 16h20, Irish Coffee -
- Oui monsieur. J'ai compris. J'éviterais de prendre des pauses, à l'avenir, confessais-je à mon patron qui s'énervait à nouveau contre moi.
Jerry était le boss le plus tyrannique que je n'avais jamais connu. Même Elisabeth Douglas, ma prof d'histoire du secondaire qui m'avait terrorisé pendant de nombreuses années tant elle était autoritaire, n'était pas comparable à mon supérieur. Lassée cette pluie de reproches dont j'avais désormais l'habitude, je me dirigeais vers une table où deux jeunes filles attendaient d'être servies. Celle dont le visage était visible, une jolie fille aux longs cheveux bruns, semblait chuchoter quelque chose à son amie. Au moment où je me postais devant leur table, stylo en main, elles se levèrent, pressées. A tel point que l'autre fille me percuta. Une rousse... Ma rousse. Le visage baissé, les mains enfouies dans son trench beige.
- Qu'est ce que je peux vous servir? demandais-je en tentant de dissimuler mon désarroi.
- Rien, nous allions partir, répondit glacialement Soane.
- So, peut-être qu'on pourra prendre un cappuccino à emporter. Ils sont si bons !
- Taylor, reprit ma rousse en lui offrant un regard noir.
- Avec ou sans chantilly?
- Pardon? s'offusqua mon ex.
- Le cappuccino, avec ou sans chantilly? reposais-je.
- Avec, commanda la brune, un sourire vainqueur accroché à ses fines lèvres.
- Super.
Je notais -ou du moins, j'essayais de rendre lisible mon écriture tant je tremblais- la commande de Taylor tandis que Soane lui murmurait quelque chose. La brune se rassit, satisfaite.
- Ce sera tout?
- Oui.
- Non ! s'empressa de rétorquer la brune. Soane, fais-le pour moi, restes. Tu... Je t'aiderais à réviser !
La rousse soupira mais dû s'avouer vaincue puisqu'elle commanda, l'air faussement désintéressé, un chocolat viennois. Putain, si j'avais su qu'un jour je prouverais mes sentiments à travers un chocolat chaud, croyez-moi que je me serais entraînée jour et nuit.
SOANE WILSON
- 16h28, Irish Coffee -
Taylor m'expliquait le cours de ce matin tandis que je m'efforçais de ne pas jeter un oeil derrière le bar, pour admirer les collants d'Ysia. Son ventre commençait à se dessiner, très légèrement. Il était un peu plus rond que d'habitude. Ses longs cheveux blonds et bouclés recouvraient partiellement celui-ci. J'avais beaucoup de mal à accepter le fait qu'elle ait couché avec Tate. Lui, qui autrefois était mon ami et, quand j'ai délaissé la jolie blonde, en a profité pour se faufiler dans ses draps, se cajoler dans ses bras. Cette simple pensée me fit me mordre la lèvre inférieure.
- Elle arrive, me prévenu Taylor.
- Le cappuccino supplément chantilly, et le viennois, annonça la blonde.
- Merciiii ! chantonna la brune en ne pouvant se retenir de plonger sa bouche dans la chantilly.
Ysia repartit servir une autre table et je me décidais enfin à goûter ce chocolat viennois. Je remarquais alors qu'il était délicieux. Au milieu, il y avait une guimauve. Il n'y a pas ce genre de choses traditionnellement, mais la blonde avait dû retenir que j'avais un faible pour ces sucreries là. Elle avait également déposé des morceaux de chocolat seulement d'un côté de la chantilly, car elle savait que je me plaignais habituellement d'avoir des copeaux dans toute ma boisson. Pour déguster ceci, j'avais eu le droit à une cuillère à soupe. Je touillais toujours mes boissons chaudes avec une grosse cuillère. Ca aussi, elle s'en était rappelé. Je fronçais les sourcils avant de finir ce que j'avais commandé, me demandant à chaque gorgée si ses lèvres avaient toujours ce goût sucré.
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Coucou mes chats ! x J'espère que vous allez bien et que ce chapitre vous aura plu. J'ai essayé de mettre plusieurs PDV, comme vous me l'aviez demandé. Qu'en pensez-vous? A bientôt pour la suite, et merci pour vos jolis conseils, x. Full love, besos ! xox
-cassie.