Une famille, qui avait compris plutôt aisément que Morgan et Noah n'entretenaient pas une simple relation amicale. Ce fut Katerine qui surprit en premier les garçons en train de se bécoter entre la boulangerie et la charcuterie. Puis un soir qu'ils aidaient à étendre la lessive, Nonna laissa sous-entendre qu'elle était au courant. Morgan comprit que Giuseppe était lui aussi au courant lorsqu'au détour d'un repas, ce dernier lui glissa "discrètement" une boite de préservatif sous la table.
Si Morgan pensait ne jamais être aussi rouge que la fois où il avait avoué ses sentiments à Noah dans la salle d'art plastique, puis qu'il les avait renouvelé en début de vacances, ce n'était rien en comparaison des rougeurs qui lui étaient montées aux joues ce soir là ! Lorsque le rouquin l'avait appris, il avait été pris d'une grande crise de fou rire, qui avait d'autant plus gêné Morgan.
Comme quoi, les apparences étaient trompeuses : le vieil homme bourru n'était pas patriarcal, seulement réservé.
Le soleil se coucha et se leva ainsi, jusqu'au jour fatidique où Morgan jouerait son avenir à Gênes.
Noah s'était levé aux aurores, incapable de rester plus longtemps au lit. Il avait réfléchi des centaines, voire des milliers de fois au scénario des prochaines heures. Il accompagnerait Morgan en train, puis passerait sa journée à se balader dans Gênes. Il repairerait un bon restaurant, y dinerait le soir avec Morgan avant de se rendre tous les deux à l'hôtel qu'ils avaient réservé il y a quelques jours sur internet.
Et ce soir là, ils coucheraient enfin ensemble.
Les valises du couple étaient bouclées. Ce fut Katerine qui les emmena à la gare la plus proche, non sans donner un mal de transport atroce à Morgan.
-Faites bon voyage, leur dit-elle en les embrassant chacun sur une joue, gattino envoie-moi un message quand vous êtes arrivés ! In bocca al lupo Morgan, j'espère que tu réussiras ton concours.
-Crepi, répondit Morgan dont les expressions italiennes devenaient plus fluides.
Noah attrapa la valise de Morgan qu'il tira à sa suite.
-On va chercher notre place dans le train. Ciao zia !
-Ciao !
Le roux et le noiraud montèrent dans le train, trainant leurs valises derrière eux. Trouver leur place ne fut pas bien difficile, le train était plus vide que ce qu'ils n'avaient imaginé.
Noah s'assit à côté de la fenêtre, faisant céder Morgan à force de nombreux « s'il te plaît ».
-Tu pourras t'assoir là au retour, lui concéda le tacheté dont les yeux étaient déjà fixés à l'extérieur.
-C'est ce qu'ils disent tous...
Le train ne tarda pas à démarrer, les éloignant davantage de la France ainsi que de la famille de Noah. Les paysages défilaient, alternant villes et champs d'oliviers. Le nord de l'Italie n'était pas si dépaysant pour deux méditerranéens. Mais l'ambiance chaleureuse du pays était communicative, et les deux jeunes hommes ne détachaient plus leur regard du paysage.
C'est leurs mains jointes qu'ils admirèrent les champs d'oliviers et de lavandes laisser leur place à Genova, dense et prospère.
-Pas trop stressé ? Demanda Noah dont les mains commençaient à devenir moites.
-Moins que toi, s'amusa Morgan qui se pencha vers le tacheté, en fait je réalise pas vraiment ce que je vais faire.
Noah se tourna vers le plus grand. Il semblait en confiance et sûr de lui. Ce n'est pas comme s'il ne s'était jamais préparé à ce genre de situation, ni comme s'il n'avait pas le niveaux. Le tacheté le savait, Morgan avait toutes ses chances : il était talentueux. Pourtant, la boule d'angoisse ne voulait pas disparaître.
-Je ne veux pas que tu sois triste si tu échoues... Et si tu pouvais réussir ce concours, si on pouvait habiter ensemble en Italie l'année prochaine... Ça serait tellement bien !
-Ne t'emballes pas trop, rigola Morgan qui resserra son emprise sur la main de Noah, moi aussi je rêverai entrer dans une école de cascade en Italie et être près de toi. Mais faut déjà que je passe cet examen. Ensuite, je vais devoir convaincre mes parents de me laisser choisir ma voie.
-Ils pensent toujours que tu veux faire avocat ? Demanda timidement le tacheté.
Morgan haussa les épaules en soupirant. S'il y avait une chose que ses parents n'avaient jamais réellement fait, c'était l'écouter. Faire semblant de connaître leur fils, ça oui ils connaissaient. Mais être au courant de ses passions et de ses ambitions, c'était autre chose.
Et ses parents ne le destinaient surement pas à finir acrobate dans une école de cinéma.
-Il faudra bien qu'ils réalisent un jour que leur fils n'est pas celui qu'ils pensent connaître. À commencer par le fait que n'ai pas une copine mais un copain.
Noah posa sa tête sur l'épaule de Morgan. Il détacha ses yeux de la vitre pour les baisser sur ses jambes allongées devant lui.
-Tu as peur de leur réaction ?
-Je sais pas trop, avoua Morgan dont les sourcils s'étaient froncés, ce n'est pas comme si je me souciais encore vraiment de ce qu'ils pourraient me dire. Mais ils restent mes parents et leur avis m'importera toujours même si j'essaie de le cacher. Après ils ne sont pas si arriérés que ça, ils ne vont pas me rejeter. Mon père me fera la gueule quelques temps à la limite, mais ça changera pas de d'habitude. Ma mère va trouver un moyen de l'annoncer à la famille en sauvant son image. Mais avec un copain aussi parfait que le mien, ils ne vont pas rester sur leurs resserves très longtemps.
Noah sourit, plus pour décontracter les traits de son visage que par réelle joie. Il avait eu beaucoup de chance d'avoir une mère à l'écoute de ses besoins et ses désirs, d'autant plus lorsque son ex-petite copine s'était chargée de son coming-out.
-Tu prendras le temps qu'il te faut, répondit finalement Noah qui déposa un baiser sur le dos de la main de Morgan, de toute façon ce n'est pas à moi de te dire quoi faire. Et je suivrai ton choix.
Le noiraud acquiesça avant d'embrasser à son tour la main de Noah.
Une voix féminine s'éleva des hauts parleurs du train. Elle annonça en italien puis en anglais que le train était arrivé à Gênes et priait les passagers d'attendre l'ouverture des portes avant de s'engager vers la sortie.
Noah et Morgan récupérèrent leurs valises avant de s'avancer vers les portes. Ces dernières s'ouvrirent quelques minutes après et c'est deux français perdus qui déboulèrent sur le quai de la gare.
-Et maintenant ? Demanda Morgan qui lisait les panneaux.
-On suit le mouvement ? Proposa Noah qui marcha dans le sens de la foule.
Le sportif se joint à lui, traînant sa valise derrière lui. Il avait rendez-vous en début d'après-midi à l'école de cascadeurs, afin de passer différents examens. Ce qui leur donnait une heure pour trouver leur chemin et grignoter un morceau sur la route. Noah quant à lui, se chargerait de déposer leurs affaires à l'hôtel.
Le couple s'engouffra dans le désordre environnant, à la recherche du bus qu'ils avaient repéré la veille avec Giuseppe. Le grand-père de Noah leur avait indiqué quel bus prendre pour se rendre en face de l'école. Savoir ou aller était une chose, se diriger en était une autre.
Ils perdirent une bonne dizaine de minutes à marcher dans le sens opposé, avant d'enfin trouver l'arrêt de bus qui les conduirait à l'école où se déroulerait l'examen.
-On se prend un sandwich ? Proposa Noah qui pointa une supérette au coin de la rue.
-Et de l'eau, surenchérit le noiraud en haletant, je suis assoiffé.
Leurs achats effectués, les deux français s'affalèrent contre un muret, en attendant l'arrivée du bus. Leurs deux valises en face d'eux leur servait de table.
-Ok, maintenant je commence à stresser, dit finalement Morgan lorsque leur carrosse arriva à l'arrêt de bus.
-Ça va bien se passer, essaya de le rassurer son copain, tu vas assurer. Tu es un bosseur, tu t'es bien entraîné avec Andréas et tu as l'habitude de grimper sur les toits depuis presque toujours. T'es un As. Et tu sais quoi ? Même si tu échoues qu'est-ce qu'on s'en fou ? Tu auras plein d'autres occasions, même si ce n'est pas en Italie.
-Je préférerai quand même réussir en Italie, sourit Morgan qui monta en premier dans le bus.
-Sans blague.
Noah s'assit aux côté du plus grand. Il avait beau plaisanter, il était tout aussi anxieux que son sportif. La veille au soir, Noah avait très mal dormi. Il s'était tourné et retourné dans leur lit, se demandant comment allait se passer l'entretien. Avec ça s'était ajouté la peur de la blessure : et si Morgan faisait un faux mouvement ? Et s'il se faisait gravement mal ? Sous le coup du stresse, tout pouvait arriver.
-Je suis sûr que tu vas gérer, dit-il cependant en affichant un grand sourire tandis que le bus s'arrêtait à l'arrêt où ils devaient descendre.
Le rouquin accompagna Morgan jusqu'à l'entrée de l'école. Il s'agissait d'un grand bâtiment récent, dont la peinture beige commençait à s'écailler.
Le plus jeune sortit un sac de sport de sa valise qu'il passa en bandoulière autour de son torse. Il releva la tête, inspira un grand coup et embrassa une dernière fois Noah.
-Dis-moi merde.
-Merde ! S'exclama Noah qui lui rendit son baiser, envoie-moi un message quand tu auras fini, je viendrais devant l'école.
Morgan hocha la tête et entra dans le bâtiment, laissant Noah derrière lui. À partir de maintenant, le peintre amateur ne pouvait plus rien faire pour lui.
Une valise dans chaque main, Noah remonta dans un autre bus. Les pensées polluées, il se rendit à leur hôtel comme s'il était vidé de toute énergie. C'est le pas lent et les épaules lourdes qui s'allongea de tout son long sur le lit qu'ils occuperaient cette nuit.
Ses pensées étaient partagées entre la peur que Morgan échoue et l'appréhension de ce qu'il se passerait le soir même sur ce lit. Et si le noiraud revenait sur leurs dires ? Et s'il n'avait plus envie de lui ce soir ? Peut-être que l'examen se passerait mal et qu'il rentrerait abattu. Ou peut-être qu'il se ferait mal durant le concours ?
Non, Morgan était bien trop fort pour se blesser ou échouer. Noah le savait au fond de lui, il réussirait.
-Pourquoi je stresse ? Se lamenta le tacheté en se redressant, je ne suis pas à sa place ! Je ne devrais pas avoir le trac.
Les entrailles de Noah s'entremêlaient, le faisant hésiter à aller aux toilettes. C'était la même sensation que lorsqu'il apprenait à faire du skateboard, plus jeune. Ses cousins l'avaient emmené dans un skatepark et l'avaient poussé à dépasser ses limites. Noah avait senti le regard des personnes autour de lui, il voyait le bowl s'étendre en dessous de lui et il s'imprégnait de la pression qui le tiraillait. C'était un état qui se situait entre l'euphorie et l'appréhension.
-Arrête ça, t'as l'air stupide, maugréa-t-il en se levant.
Une balade était tout ce qu'il lui fallait. Il n'aurait qu'à déambuler dans les rues de Gênes avant d'aller chercher Morgan, à la sortie de son examen. Morgan lui avait envoyé un message à l'instant, expliquant qu'il venait d'entrer dans la salle et que l'examen durerait une heure. L'attente ne serait plus bien longue.
Noah passa de longues minutes à flâner dans les ruelles, la tête embrumée d'interrogations sur le résultat de l'examen de Morgan. Il repéra un restaurant adorable qui lui semblait idéal pour le soir même et se dirigea enfin vers l'école où le free runner avait passé son concours.
Il l'attendit de longues minutes qui parurent durer des heures. Son sang pulsait dans ses veines alors qu'au loin, il essayait de discerner une tête aux cheveux noirs familière. Des élèves -femmes et hommes- sortaient en bande ou seuls de la bâtisse. Ils portaient tous un sac de sport sur leurs épaules et discutaient joyeusement en italien entre eux. Ils semblaient tous étudier dans cette école et pendant une fraction de seconde, Noah s'imagina étudiant, après que Morgan ait été accepté dans cette école génoise.
Ils pourraient se créer leur propre cercle d'amis, sortir les soirs en bande, trouver chaque semaine de nouveaux restaurants et bars jusqu'à définir un lieu comme leur repère. Pourquoi pas même habiter ensemble dans le futur, vers la fin de leurs études ?
Noah rougit à ses pensées et tacha à la place de se concentrer de nouveau sur la façon de repérer son copain dans la foule. Il n'eut pas à attendre bien longtemps, puisque la silhouette du noiraud se dessina parmi les visages inconnus.
De loin, il ne pouvait dire si son visage était crispé où joyeux, mais sa démarche rapide et droite lui laissait penser qu'il essayait d'en imposer. Était-ce par ce qu'il avait brillamment réussi l'examen, ou plutôt pour se redonner contenance ?
J'ai sorti une nouvelle histoire !
Un Girl x Girl du nom de « Camille », dont le 1er chapitre est déjà sorti !
C'est une histoire courte toute mignonne, pour de mettre dans le mood vacances, et qui peut vous faire patienter jusqu'au prochain chapitre de Dawn (prévu pour samedi d'ailleurs).
D'ici là bon séjour sur Wattpad et bonnes vacances !