Lourd est mon parcours.

15.

- Braquer des pharmacies ça soignera pas ses blessures.

Au final Adel m'a tellement soûlé qu'on est allé les rejoindre à l'hôpital.

A pied.

Genre moi, Abdel Beddia, j'ai marché depuis le centre ville jusque l'hôpital qui est juste derrière la Belle Et' pour aller voir Aymen. Donc en gros j'ai marché une demi-heure pour aller voir si un mec qui par tous les moyens essaie de me faire vivre un enfer va bien.. Comme un gros pigeon quoi.

Des comme moi y'en a pas dix c'est sur.

On a été tellement long que quand on a passé les portes de l'hôpital c'est limite un médecin nous a pas sauté dessus.

« Médecin : Vous êtes bien les cousins d'Aymen Ghelîl ?
Adel : Euh oui.
- Sa sœur qui est dans sa chambre a dit que vous alliez arriver. Bon, c'est un p'tit chanceux hein ! Il a juste une côte de félée, un peu l'arcade ouverte et la jambe dans le plâtre. C'est vraiment rien de méchant on attends qu'il se réveille et il peut partir, à son choix.
- Ah merci hein !
(Moi) - Ouais merci monsieur.
- Derien la jeunesse, bon le devoir m'appelle !
- On l'ramène comment avec son plâtre là ?
(M) - Comment ça on l'ramène ?
- Tu crois qu'il va vouloir rester ici ?
(M) - *rires* Mais c'est pas mon problème ça, ça y est j'ai fait mon taf moi, ma mission s'arrête là j'rentre chez moi ça y est !
- Nan mais sah Abdel on fait quoi y'a plus d'bus là.
(M) - Même si y'en avait encore avec sa côte baisé on est bloqué. C'est bon il est avec Souad allez on s'barre j'reste pas là moi.
- T'es sérieux en plus ?
(M) - C'est un grand garçon nan ? Bah voilà, déjà c'est bien on l'a amené jusqu'ici, il va pas faire chier encore. Toi tu crois j'vais le faire dormir chez moi en mode c'est le sang mdr tu rêves, il reste là ou il se demmerde.
- C'est bien tu penses ?
(M) - C'est plus mon problème j't'ai dit.
- Bah vas-y on s'arrache hein. »

Après que j'ai réussit à convaincre Adel de le laisser ici, on est quand même entrer dans la chambre pour dire à Souad qu'on rentrait. Quand j'ai vu Aymen sur ce lit j'me suis demandé pourquoi j'lai aidé. Toute ma vie ce gars il m'a fait des crasses, et quand il est en galère comme un toutou je courre l'aider.. Il a une grosse dette envers Adel et moi pour le coup, parce qu'on aurait pu faire genre de pas l'avoir vu et partir hein. Elle m'en a appris des choses ma mère, mais la bonté et la gentillesse j'crois qu'elle me l'a trop appris ça.

Nan Abdel, c'que t'as fait c'est bien, t'es un bon gars.. Tu l'aurais eu sur la conscience sinon. Imagine que ça t'étais arrivé, t'aurais aimé qu'il te ramène. Ouais c'est sûr j'aurais aimé, mais lui, le connaissant, il m'aurait laissé crever.

* DANS LA PEAU D'AYMEN.

« On prends du biff on refait nos vies. »

Abdel c'est pas que jl'aime pas mais.. C'est quelqu'un de trop gentil ça m'énerve. Trop bon trop con, à trop aider tu t'feras baiser. Être gentil ça ne paye pas et ça paiera jamais. Plus les gens te fuient et te redoutent, moins ils te la feront à l'envers. J'peux pas voir un mec aussi gentil en face de ma gueule alors que moi j'suis un vrai pourrit depuis la naissance. Ça me donne une sacrée gerbe.

Avec tout ce que j'lui faisait le gars m'a quand même aidé, c'est dingue. J'ai trop de caractère, j'suis trop rancunier, trop têtu, trop méchant. J'suis ce gars de cité qui ressent le besoin de montrer sa virilité, qui déteste remercier et s'excuser.. J'suis ce mec qui profite de la faiblesse des autres, ce mec trop fier et orgueilleux, qui assume pleinement d'être méchant. J'suis prêt à tout pour avoir ce que j'veux, homme/femme c'est la même : pas d'pitié pas d'quartier. J'suis manipulateur, j'suis un voleur, menteur, tricheur. Tout ce que vous détestez, j'le suis. Et je le vit très bien.

J'fais pas exprès, j'ai été élevé comme ça.

Ma sœur était la reine des garces, elle s'amusait avec tous les hommes, comme une putain. Elle s'amusait et elle s'en allait. Elle les rendait fou. Ma mère lui avait toujours appris à user de ces charmes sans passer par l'étape de la fornication.. Ma conne de sœur avait tout compris sauf ça. Un jour elle est revenu en cloque, c'est sans vous dire que le daron l'a bien défoncé. Elle a perdu le bébé et s'est jeté dans un ravin avec la voiture du daron. Ce qu'elle savait pas en faisant ça, c'est que j'allais être le seul à pleurer sa mort. J'ai beau la traiter de conne ma grande sœur, j'aurais vidé le ciel de ses étoiles pour elle.. Ce qu'elle savait pas non plus c'était que la voiture du daron c'était moi qui allais charbonner pour la repayer. J'peux vous dire que là, la bibi elle sert bien. C'est mon père qui m'a mit dedans, la seule chose qu'il m'a interdite c'était de ramener un enfant de pute chez lui et de me foutre de la blanche dans les narines. C'est lui qui m'a appris à être un loup. Il me disait que les Hommes étaient des chiens et que les loups étaient fait pour la gagne.

Famille de baisé.

On fait les fiers parce que c'est dans nos gènes, mais j'aimerais bien voir la gueule de mon père quand il sera jeté au fin fond des Enfers. À mourir de rire. Avec tout le mal qu'on a pu faire dans nos misérables vies, aucun de la famille Ghelîl connaîtra le paradis. Ça nous est interdit, banni. C'est la vie qu'on a choisi de mener, en étant mauvais on savait ce qu'on encourrait. Le pire aujourd'hui c'est pas forcément qu'on s'y habitue, non c'est rien ça, c'est qu'on le sache et qu'on s'en foute. Des fois je me demande même si j'suis pas né sans cœur. Ça expliquerait tout..

J'viens des ténèbres, faut pas que j'me voile la face. À tel point que dire merci du service qu'ils m'ont rendu j'y arrive pas. J'fais semblant de dormir comme un bouffon. Ça fait maintenant plus d'une demie heure que je garde les yeux fermés comme un con en attendant que ces trois marioles partent. J'ai la flemme de dire merci, j'ai pas envie. Ils auraient dû me laisser crever ça m'aurait évité de leur être redevable..

J'suis pas ce que j'veux être putain, ma vie je la voulais pas comme ça. Mon caractère, tout, j'voulais rien d'aussi mauvais. Alors ouais il aurait du me laisser crever au sol, comme un putain de chien. Comme un vieux loup au bord de la route.