Chapitre 14 : Éducation

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- Nous devrions l'isoler pour que sa Majesté ne soit pas malade, dicta le médecin.

- Ce n'est pas... contagieux, chuchota Gabriella.

- Vous ne pouvez vous permettre de tenir de tels propos !

- Docteur, je ne vous ai pas demandé de venir pour tenir ce genre de propos à son encontre non plus.

- Je pris sa Majesté de m'excuser.

Airy ne répondit rien.

- Que préconisez-vous pour qu'elle aille mieux ?

- Pour ce genre de fièvres, il faut la tenir au chaud. Je vais mettre un torchon bouillant et lui donner certaines plantes qui la tiendront bien éveillée.

La jeune femme secoua négativement la tête mais le médecin se fichait bien de son opinion. Il était réputé dans tout le royaume et pourtant, avec tous les livres médicinaux qu'elle lui empruntait, Airy avait envie de faire confiance à Gabriella.

- Très bien, vous pouvez m'apporter ce qu'il faut, je m'en chargerai.

- Oh mais ce n'est pas le rôle de sa Majesté de traiter une servante ! Si sa Majesté le permet, nous allons déplacer cette dernière et vous fournir une nouvelle servante jusqu'au rétablissement de celle-ci.

- Ça ne sera pas la peine. Je n'ai pas besoin d'une autre servante et je ne tiens pas à ce qu'elle soit changée de lieu.

- Mais sa Majesté, elle est contagieuse.

- Je prendrai mes précautions dans ce cas. Mais j'ai besoin d'elle près de moi pour mon travail, fiévreuse ou non. Je vous remercie de la consultation, vous pouvez disposer.

Face à ces mots, le médecin de la cour ne fut pas en mesure de répondre quoique ce soit. Cela aurait été d'un irrespect profond. Ainsi il s'inclina et quitta avec ses disciples les appartements. Quelques secondes plus tard on apporta une bassine d'eau chaude, un torchon, et une mixture de plante dont on lui donna le nom sans qu'il n'y connaisse rien. La chambre royale redevint vide.

Airy partit à nouveau s'agenouiller vers la jeune femme. Il était désormais assez tard, et l'état de la servante n'avait pas montré la moindre amélioration.

- C'est la fatigue... Ce n'est pas contagieux... chuchota-t-elle.

Sans savoir pourquoi, Airy la crut plus qu'il ne croyait son médecin. Peut-être était-ce parce qu'il tenait davantage à rester auprès d'elle que de s'en éloigner.

- Le torchon humide est une mauvaise idée ? demanda-t-il.

- Le torchon non... Mais il ne doit pas être chaud...

Sa voix était faible.

- Quand on a de la fièvre... on a froid parce que notre corps est... plus chaud que l'air ambiant par rapport à... d'habitude. Il faut le refroidir...

L'explication était logique. En tout cas, elle parlait à Airy. Il hocha la tête et décida qu'il irait changer l'eau de la bassine pour une eau plus froide. Il préférait se fier à elle.

- Et les plantes ?

- Inu... tiles. Je dois me reposer... gémit-t-elle.

A nouveau, le roi hocha la tête.

- Je peux ouvrir les fenêtres ?

La jeune femme hocha la tête. L'air extérieur n'était pas assez glacial pour que cela perturbât son corps.

- Demain, ça ira mieux... murmura-t-elle.

- Tu veux manger ?

Elle secoua la tête négativement.

- Tu devrais pourtant.

- Je sais... Mais je n'ai vraiment pas faim.

Ne voulant pas la forcer, le roi Airy décida de ne pas insister. Une fois le torchon installé sur le front de la jeune femme, il repartit à son bureau en jetant plus que régulièrement des coups d'œil à son lit pour s'assurer que l'état de la rousse ne s'aggravait pas.

Quand il fut définitivement trop tard pour que le roi ne continuât de travailler, il décida de quitter son bureau. Il remplaça le torchon désormais sec sur le front de la servante, puis il la rejoignit dans les draps de soies. Il fit bien attention à ne pas la réveiller, et fort heureusement, il réussit. Elle était encore fiévreuse, quand il la prit dans ses bras, mais il lui semblait bien que son état s'améliorât peu à peu. Cela le rassura suffisamment pour le permettre de trouver le sommeil.

...

Le lendemain, quand il se réveilla, la cheminée était flambante et Gabriella était déjà partie. Au début il s'inquiéta, mais finalement il trouva sur la commode de nuit un petit mot : « Je vais bien, je vous remercie d'avoir pris soin de moi la veille Sire. ». Il souffla de soulagement.

Il ne put aussi s'empêcher d'apprécier la fine calligraphie de la jeune femme. C'était si étrange de voir qu'elle savait à la fois lire et écrire, qu'elle était si cultivée en médecine, et si instruite de manière générale. Très peu de servantes du royaume ne savait ne serait-ce que déchiffrer leur nom, et il se demandait bien comment elle avait pu apprendre tout cela. En fait, il réalisa qu'il ne savait même pas d'où elle venait. Il ne savait pas non plus si elle avait encore de la famille, mais puisqu'elle ne s'était présenté qu'avec un prénom, il se doutait que non. Il ne savait même pas réellement si lui demander toutes ses informations n'étaient pas trop personnel. Après des mois de silence, il devait probablement respecter sa pudeur. Mais pour dire vrai, il voulait savoir.

La Servante du RoiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant