21. (partie 1)

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« La nostalgie c'est le désir d'on ne sait quoi.. »
– Antoine de Saint-Exupéry.

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Deux semaines plus tard.

Avec un fond sonore de piano, je glissais sur mes paupières un trait de liner, aussi minutieusement que j'imaginais les doigts de Sviatoslav Richter glisser sur les touches noir et blanc d'un piano, afin d'interpréter Le Clavier bien tempéré de Bach. Véritable pianiste du XXe siècle, j'adorais sa maîtrise des interprétations et la profondeur qu'il pouvait y mettre.

En passant par Bach, Schubert, Liszt ou bien encore Beethoven, ses performances rythmaient mon quotidien depuis quelques jours. Je partageais volontiers l'avis de Van Cliburn, à défaut que pour ma part, les pleurs engendrés n'étaient l'artifice que de ma solitude.

En parlant de larmes, mes yeux restèrent clos quelques instants, le temps que mon mascara sèche sur mes cils recourbés. Un travail si méticuleux pouvait vite être gâché par des clignements intempestifs.

Je souriais devant un résultat qui me convenait, et attrapais mon iPod, diffusant la douce mélodie qui m'accompagnait partout où que j'aille depuis la nouvelle année.

Complètement seule, je tentais tant bien que mal de masquer mon mal-être par un maquillage soigné et des musiques à la hauteur de ma tristesse. Pourtant, c'était un flocon entier d'anti-cernes que j'avais vidé depuis le début de la rentrée sur des heures d'insomnie au goût de remords.

La culpabilité me rongeait, grandissant à chaque regard indifférent que Nour m'offrait. C'était insupportable de voir mes messages laissés sans réponse, et mes mots tués dans un silence.

J'aurais espéré avoir une discussion avec la brune après qu'elle nous ait surpris Wesley et moi, mais à ce jour, elle refusait de m'adresser la parole. Pire encore, l'ignorance m'avait remplacé et était devenue sa grande amie.

J'émis un soupir, j'y pensais beaucoup trop. Je tendais non seulement le bâton pour me faire battre, mais je me battais moi-même avec. Je balayais ses pensées en augmentant le son de ma musique, et attrapais ma paire de chaussure à l'entrée.

Elles étaient un peu sales, à cause de la neige fondue, mais je passais outre et claqua la porte de l'appartement une fois toutes mes affaires en main.

Dans le hall du bâtiment se trouvait un miroir dans lequel je m'observais une dernière fois, voir si tout était correct.

Mes cheveux plaqués en arrière dans une gueule de cheval me donnait un air assez strict, mais mon maquillage adoucissait heureusement le tout. Convenablement vêtue, la seule chose dérangeante dans mon apparence restait les immenses cernes qui entouraient mes yeux fatigués. Malheureusement, même avec le meilleur maquillage au monde, ils demeuraient. En plus, je n'en avais plus, donc le problème était réglé.

Avec mes écouteurs bien enfoncés dans mes oreilles et les mains dans les poches, je pris la direction du bus, sans oublier de jeter un regard derrière moi dans l'espoir d'apercevoir le métis. Nos trajets jusqu'au lycée ensemble me manquait. En fait, il me manquait, tout simplement.

Je ne l'avais revu qu'une seule fois depuis le jour de l'an. On avait longuement parlé tous les deux, se promettant l'un et l'autre que notre relation ne changerait pas. Mon cœur s'était légèrement serré face à ce choix, mais ce n'était rien lorsque dans les jours à venir, chacun de mes messages étaient revenus sans réponses. Peu importe le nombre et le sujet, ils ne les avaient pas lu. Il ne s'était même pas présenté depuis la rentrée des cours. Ça faisait quand même déjà une semaine.

Alumnus.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant