Chapitre 26

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Diane

Je cours à en perdre haleine.

Mon mur nous ont donné trois secondes d'avance. En courant à la vitesse maximum des Chasseurs nous réussissons à leur fausser compagnie en deux secondes.

Lucas ne nous a pas attendu et a pris la voiture d'Héloïse. Les autres étant venus à pieds de la maison de Cloé, nous ne disposons d'aucun autre moyen de transport. Je n'en veux pas à Lucas de nous avoir abandonné, après tout c'est moi qui lui ai dit de fuir. Il a fait ce qu'il jugeait bon pour sa propre survie.

Théo ne perd pas le nord et me tire à sa suite dans la forêt tropicale. Nous nous enfonçons toujours plus loin dans l'épaisse forêt. Mais alors que nous ne sommes pas suffisamment éloigné des vampires, nous les entendons entrer à leur tour dans la foret à notre poursuite.

C'est raté, nous n'arriveront pas à leur échapper. Ils vont nous flairer et nous chasser comme des animaux. Nous aurons bon courir de toutes nos forces, nous serons toujours à distance de flair et ils ne nous lâcheront pas. En effet, l'activité favorite des vampires est la chasse. Il faut donc prier pour atteindre une zone protégée avant que nos poursuivants ne nous sautent dessus.

Mais je suis tellement faible que je me vois mal maintenir ce rythme. En fait, j'ai plutôt l'impression que je vais défaillir d'un moment à l'autre. Si Théo ne me soutenait pas, je me serais effondrée depuis longtemps.

Soudain, Théo s'arrête.

- Mais qu'est-ce que tu fais ? Sifflé-je en essayant de reprendre mon souffle. Il faut continuer à courir et les prendre de distance.

Le Chasseur ne m'écoute pas et fouille sa cape. Il fini par en sortir un petit tube qui ressemble à de la pommade et commence à s'en étaler sur les parties visibles de son corps. Je le regarde interdite. Quelque chose l'irrite ?

- Dépêche-toi de t'en mettre toi aussi, me presse-t-il.

Je fronce les sourcils mais attrape tout de même le tube et répète son manège. La pommade s'imprègne immédiatement dans ma peau. C'est alors que je reconnais l'onguent.

C'est une pommade magique surnommée "cache odeur" par les Chasseurs. Elle a été créée par la Dame de cœur, la sorcière traîtresse, alors que celle-ci travaillait pour les Chasseurs à l'époque où ceux-ci faisaient la guerre aux sorcières. L'onguent a pour effet de dissimuler les odeurs corporelles. Aucune créature surnaturelle, pas même un vampire, ne pourra nous retrouver à l'odeur. Je sais que mon père avait beaucoup utilisé cette pommade magique dans sa jeunesse, elle doit donc être très efficace.

C'est du génie ! Avec ça les vampires ne nous repéreront jamais !

Théo m'entraîne plus loin pour brouiller les pistes et quelques centaines de mètres plus loin, il commence à grimper à un arbre. Je l'imite aussitôt. Pour Théo, il a été un jeu d'enfant de s'y hisser même si l'arbre ne présentait aucun moyen d'escalade. Mais pour moi, petite sorcière vidée d'énergie, ça a été plus difficile. Mon ami a été obligé de me porter à moitié pour que je puisse me hisser à mon tour sur la plus haute branche de l'arbre. Ma main blessée et mes pieds nus écorchés par ma course se sont frottés au tronc m'arrachant un peu plus la peau. Je me suis retenue de gémir de douleur.

La branche est mince et nous devons nous coller le plus possible au tronc. Théo, dos contre le tronc, m'attire contre lui et encercle ma taille de ses bras. Je me cale contre son torse musclé appréciant la chaleur de son corps. Je pose la tête entre son coup et son épaule pour me reposer. Sous la couche de transpiration et de sang séché qu'il arbore, j'arrive à sentir une odeur de pins et de soleil.

J'essaie de reprendre une respiration normale et de calmer les battements frénétiques de mon cœur. Théo lui ne semble pas affecté par notre course ni par la bataille, sa respiration est calme et maîtrisée. Je l'admire vraiment, je ne sais pas comment il fait pour garder ce contrôle.

Une seconde plus tard les vampires passent à fond sous notre arbre sans nous voir. Théo resserre inconsciemment son emprise autour de moi ce qui me réconforte. La pommade fait des merveilles ! Nous restons le plus silencieux possible et même si le sang qui s'écoule de ma main me gratte je reste immobile.

Le ciel s'éclaircit alors que la nuit fait petit à petit place au jour. Je peux entendre le faible bruissement des vagues contre le rivage au loin. Un toucan se pose sur une branche voisine à la notre. L'oiseau tropical semble nous regarder avec étonnement. Il secoue son bec surdimensionné coloré de vert, d'orange et de jaune. Puis il s'envole faisant bruisser les feuilles autour de lui.

Deux secondes plus tard, les vampires arrêtent leur poursuite et jurent. Ils ont dû se rendre compte que la piste de nos odeurs s'arrêtait. Ils reviennent sur leurs pas et semblent chercher notre trace. La piste les conduit là où quelques secondes plus tôt nous nous sommes imbibés du "cache odeur". Ils tournent en rond sans comprendre où ont pu passer nos odeurs. Dans mon fort intérieur, je soupire de soulagement, l'onguent magique ne nous trahira pas, les vampires ne nous retrouveront pas.

S'installe alors une attente insurmontable où les vampires nous cherchent et nous nous attendons qu'ils laissent tomber. Je n'ose faire le moindre mouvement, je m'interdit même de cligner des yeux. Les vampires ont une très bonne ouïe alors je fais tout pour ralentir les battements de mon cœur. Je suis heureuse de constater que j'y parviens.

Tout à coup, ils semblent capter quelque chose et se remettent en mouvement. Avec horreur je m'aperçois qu'ils se dirigent tout droit vers notre cachette. Ce n'est pas possible ! L'onguent avait déjà fait ses preuves, ils ne peuvent par conséquent pas flairer.

Pourtant ils sont presque à notre arbre. Théophile me regarde angoissé. Soudain, son regard se pose sur ma mains couverte de sang et sur mes pieds écorchés. Un sentiment de désespoir passe dans ses yeux alors qu'il comprend notre erreur. Ou plutôt mon erreur.

Baissant moi aussi mes yeux sur mes blessures je m'en veux d'être aussi empotée. Je me revois frotter mes pieds contre le tronc pour grimper plus haut. Sans parler de ma main qui se vide de son sang. J'ai dû en laisser sur l'écorce.

Et qu'est-ce qui attire les vampires plus que n'importe quoi?

Ces derniers sont à présent devant notre arbre, le nez flairant les alentours.

Je m'en veux tellement. Ma bêtise me tuera. Mais le pire c'est que je condamne Théophile avec moi, et ça, je ne me le pardonnerai jamais.

Brusquement des crocs acérés surgissent devant moi me faisant hurler de terreur.

- Bouh ! Feule le vampire comme un félin.



Aliumnos- Chasseuse dans l'âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant