Chapitre 5

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Ce matin je me réveille avec un marteau piqueur implanté dans le crâne. Ça m'apprendra à faire des soirées comme celle d'hier. En tout cas ce qui est sûr c'est qu'après le désastre d'hier je ne recommencerai plus, plus jamais !

Difficilement je m'extrais de mon lit si moelleux et descends les escaliers tant bien que mal. Après de gros efforts, j'arrive dans l'aile gauche du manoir et entre dans le laboratoire où maman crée ses potions. Je m'approche du frigo dans lequel elle range ses potions contre les gueules de bois.

Dedans il y a plusieurs fioles contenants des liquides de différentes couleurs. Il y en a des jaunes, des roses, des violettes, des turquoises... Bref que des couleurs appétissantes.

Je n'hésite pas et m'empare d'une fiole au contenu violet douteux. J'ai déjà vu plusieurs fois papa et maman en prendre et je sais que c'est le remède qu'il me faut. J'ouvre le récipient et un parfum nauséabond m'emplit de suite les narines. Je déglutis avant de me décider à porter le liquide à mes lèvres.

Contrairement à ce que je m'imaginais, la potion n'est pas dégoûtante. Elle a même un léger arrière goût de rose. Tandis que mon mal de tête cesse peu à peu, je me remémore la fin de soirée d'hier.

Le temps que je retourne dans le manoir après le départ de Rakael, la soirée était déjà finie. Tous les loups-garous appartenant à une meute avaient déjà filés, ce qui m'a conforté dans l'idée que quelque chose d'important se passait.  Toutes les meutes de Benevento ne se ruent pas dans la forêt pour un simple "problème à régler".

Après le départ des loups, il ne restait plus que les sorcières et certains loups-garous attachés à quelques unes d'entre elles. Mais, très vite, les sorcières ont elles aussi quitté le manoir, l'ambiance n'étant décidément plus à la fête et j'en étais presque reconnaissante à l'objet de cette perturbation. Marianne était elle aussi partie après m'avoir serré dans ses bras, Délio sur ses talons.

Mon mal de crâne s'estompe rapidement et je salue l'efficacité des potions de ma mère. Si seulement je pouvais en faire autant ! Mais si jeter un sort est difficile, le mettre dans une fiole l'est encore plus. Il faut faire intervenir nos pouvoirs avec des objets insolites tels que des pierres rares ou des plantes ou encore des animaux morts, puis les différents aliments se mélangent et deviennent des potions contenant la magie de la sorcière. Autant dire que je n'en ai jamais réussi une seule !

Et voilà ! Ce sentiment de frustration et de mal être s'empare encore de moi. Ce complexe m'empêche réellement de vivre, c'est insupportable ! Il me met dans tous mes états.

Je sens la crise de panique poindre mais je ne veux pas lui laisser le temps de m'étreindre. Je ne veux pas que mon sentiment d'infériorité me paralyse encore, aussi sans savoir pourquoi, je me mets à courir.
Je sors en vitesse du laboratoire, retrouve le hall et sors du manoir par les deux grandes portes battantes.
Pas besoin de fermer derrière moi, le petit manoir est sécurisé par un sortilège.

Je cours ainsi hors de ma propriété, en legging et t-shirt large. Je suis pieds-nus mais je ne ressens aucune douleur et continue de courir de plus en plus vite. Plus je prends de la vitesse et plus je sens que ma crise de panique s'estompe.

Courant dans la forêt, j'atteins vite une vitesse incroyable. Pour une fois je me sens bien et je me détends entièrement. Un sentiment euphorique s'empare de mon être et un cri de joie passe au travers de mes lèvres.
Les arbres défilent à toute allure mais soudain je repère du coin de l'œil une tache blanche sur ma droite. Elle me suit et semble ne pas vouloir me lâcher. Par instinct j'accélère, je ne sais pas ce qu'est cette tache mais quelque chose me dit de m'en méfier.
L'expression "la peur donne des ailes" ne m'a jamais paru aussi vraie quand cet instant.

Aliumnos- Chasseuse dans l'âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant