Chapitre 63 (Maelie)

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Dès que je m'étais réveillée, je m'étais empressée de jeter un oeil vers mon amant comme s'il me fallait vérifier que cette nuit merveilleuse que nous avions vécue avait bel et bien existé. Aussi, je fus rassurée de constater qu'Alex Mavri dormait toujours paisiblement à mes côtés.

Il était allongé de telle sorte qu'il me tournait le dos et, alors que je me plaisais toujours à le contempler pendant son sommeil, je pus lui remarquer des caractéristiques physiques que je n'avais pu voir la veille, sans doute trop prise dans l'intensité de nos ébats. Il y avait d'abord ce tatouage si imposant qu'il couvrait presque entièrement son omoplate. Si je ne m'abusais, il représentait la déesse grecque Thémis, incarnation de la justice et de l'ordre établi. Je le savais parce-qu'elle tenait, dans l'une de ses mains, une balance qui symbolisait le principe d'équité et, dans l'autre, un glaive qui désignait le châtiment. Elle avait aussi les yeux bandés pour signifier l'exigence d'impartialité dans la décision du juge.

J'étais curieuse de savoir ce qui avait pu pousser Alex Mavri à graver le droit jusque dans sa peau. C'était intriguant. Et que dire aussi de toutes ces cicatrices qui recouvraient son corps. C'était elles qui avaient surtout retenu mon attention. Elles étaient si nombreuses, et certaines étaient si profondes... Elle me faisaient une impression terrifiante car, bien que j'ignorais tout de leur origine, je savais ce qu'elles signifiaient.

Par le passé, Alex Mavri avait souffert, ça ne faisait aucun doute. Et je me trouvais aussi triste que révoltée de le découvrir.

Je fus arrachée à ces sombres questionnements quand je le vis commencer à s'animer sous les draps. Impatiente de pouvoir lui parler, je ne perdis pas de temps et je me dépêchai de le saluer.

_ Bonjour toi, lui dis-je ainsi avec douceur.

Il tourna la tête dans ma direction et me gratifia d'un sourire qui suscita en moi une immense joie. Après quoi, je me lovai dans ses bras, pour ne plus me concentrer que sur les battements de son coeur. Ils étaient lourds et harmonieux, et si propices à l'apaisement que je manquai de me rendormir. Je savourai pleinement ce tendre moment passé avec l'homme que j'aimais. Alors, j'étais heureuse comme je ne pensais pas pouvoir l'être un jour et j'étais décidée à tout faire pour que ce bonheur dure le plus longtemps possible.

Rattrapée par ma curiosité, je brisai le silence pour questionner Alex Mavri au sujet de la nuit que nous venions de partager :

_ C'était bien, hein ?

_ Bien ? Non, je ne dirais pas ça, répondit-il d'abord, me plongeant ainsi dans un tourment aussi soudain que puissant.

Ces quelques mots qu'il venait de prononcer au creux de l'oreiller me firent l'effet d'une véritable catastrophe. Devais-je comprendre qu'il n'avait pas aimé nos ébats ? Cette seule pensée m'était insupportable. Je tentais de me rassurer en me disant qu'une telle hypothèse était impossible. Et pour cause. Il avait semblé apprécier me faire l'amour. Sinon pourquoi aurait-il réclamé que nous recommençions plusieurs fois ? Ça n'avait pas de sens.

Fort heureusement, il ne tarda pas à ajouter avec un enthousiasme débordant, m'arrachant ainsi à mes angoisses :

_ Ce n'était pas bien. N'ayons pas peur des mots, c'était fantastique !

Ouf. Voilà qui était plus conforme à mes impressions. Sans faire preuve de fausse modestie, j'étais bien trop douée au lit pour qu'il puisse ne pas être satisfait. D'autant qu'il avait aussi eu droit à des extras que je réservais aux grandes occasions. Cela dit, en avoir la confirmation avait le mérite de m'enlever ce poids que je m'étais mise toute seule. À l'avenir, je le laisserais finir ses phrases au lieu de tirer des conclusions hâtives.

Après plusieurs câlins et un flot de mots doux, et comme je me sentais en confiance, je me décidai à m'enquérir de ce qui n'avait de cesse de me préoccuper depuis plusieurs minutes déjà :

_ Je peux te poser une question ? J'aime autant te prévenir, elle est peut-être un peu indiscrète.

_ Tout ce que tu veux.

Il me confortait. Ne soupçonnant pas qu'il s'agissait en réalité d'un abus de langage, je me lançai, non sans redouter tout de même sa réaction :

_ Ces cicatrices... A quoi sont-elles dûes ?

_ Je ne préfère pas en parler, me répondit-il aussitôt, catégorique.

Je pris le risque d'insister :

_ Tu peux tout me dire, tu sais.

Visiblement, c'était une mauvaise idée. Histoire de bien me le faire sentir, il se libéra de mon étreinte et se leva aussi net pour aller se rhabiller. Je m'en doutais, le sujet était sensible. Aussi, je regrettais de l'avoir abordé si vite. Je me rendais compte qu'il était beaucoup trop tôt pour le faire. Et voilà qu'à présent il se braquait.

_ Où vas-tu ? dis-je, un peu désemparée de voir qu'il était sur le point de partir.

_ J'ai cours dans une petite heure, me dit-il en enfilant sa chemise.

_ Tu es sûre que tu ne veux pas rester encore un peu ? lui demandai-je, espérant toujours le retenir.

_ Non, vraiment, je dois y aller, renchérit-il, inflexible.

_ Tu m'en veux, c'est ça ?

Juste avant de franchir le seuil de mon appartement, il me jura :

_ Non, je ne t'en veux pas.

Je n'en croyais pas un mot. Il était évident qu'il m'en voulait. Il suffisait de voir le ton rude qu'il venait d'employer. Et je craignais déjà les conséquences de mon indiscrétion. Pour me rassurer, je lui lançai :

_ On se voit bientôt, d'accord ?

_ Bientôt, oui.

Puis il quitta mon appartement sans traîner.

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