Honte - Charles

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« Lui, je le déteste. Il n'est pas mon ami.» Me souffle-t elle à l'oreille en me désignant un garçon de notre âge. Je ne peux que lui assurer qu'il n'est pas le mien non plus, mais me croira-t'elle ? Dans mes yeux doit encore se lire la surprise et le frais mensonge que je viens de lui servir. Pourtant Alise ne semble rien remarquer et retourne à son observation. Guillaume marche fièrement, il traverse la cour du lycée pour rejoindre ses amis et alors que les miens arrivent distrayant Alise nos regards se croisent. Je rougis doucement et il me sourit tendrement. Lui et moi avons notre secret. Si Alise apprenait que nous nous aimons je ne sais pas comment elle réagirait. Je suppose que savoir que son ex et son meilleur ami son ensemble ne doit pas en ravir beaucoup, surtout qu'elle n'a aucune idée de l'homosexualité de Guillaume ou de la mienne.

Jacques se penche vers moi et m'arrache à ma contemplation. Il me sourit comme toujours et me tape gentiment l'épaule pour m'inciter à me lever de mon banc. Je le suis pour rejoindre mon groupe. Eve rit de toutes ses dents, Alise tente de la chatouiller, Matthieu soupire désespérément et Jacques fait le guignol comme à chaque pause. D'ordinaire j'aurais soutenu Matthieu ou l'aurait entraîné au contraire avec les autres dans un délire incongru.

Aujourd'hui je suis ailleurs. Je ne peux pas me concentrer. Je ne pense qu'à Guillaume. Je ne pense qu'à son sourire à ses lèvres, à tout son être. Il me manque alors qu'hier lui et moi ne faisions qu'un. Rien qu'à cette pensée enivrante je soupire d'aise et ferme doucement les yeux. Quand je les rouvre tous ceux de mes amis sont tournés vers moi: « T'es plus puceau pour gémir comme ça » m'attaque Jacques avec un sourire taquin. Mes joues s'empourprent et je tente de me défendre en bredouillant. Je n'avais pas réalisé que mon soupir avait été si puissant. La discussion reprend son cours jovial et alors que je tente de me faire discret mon téléphone vibre dans ma poche.

"Je suis dans la cabine du fond dans les toilettes de la cour. Je t'attend."

Mon sang s'échauffe. Je brûle d'impatience et rangeant mon téléphone dans ma poche d'un geste tremblant je prétexte une envie pressante pour courir jusqu'aux toilettes. J'ouvre la dernière porte et trouve Guillaume derrière. Je ferme le loquet et pose mon sac sur le sien pour me lover dans ses bras.

« - C'est dur Gui...
- Pour moi aussi chaton.
- Alise serait furieuse. Je ne sais pas quoi faire. Tout est de ma faute.
- Qu'est-ce que tu dis ? Rien n'est de ta faute. C'est moi qui n'aurait pas du t'embrasser mais maintenant que je t'ai à mes côtés je ne regrette rien.
- Ça nous dépasse Guillaume.
- Embrasses-moi et oses me dire que tu n'arriveras pas à surmonter ça si je suis avec toi ! »

Je relève la tête et poses mes lèvres contre les siennes en fermant mes yeux. Je suis si bien. Guillaume ouvre les yeux et posant la main sur ma joue il me regarde les yeux brillants:

« - Je t'aime Charles.
- Quoi...?
- Je suis amoureux de toi.
- Vraiment !? » M'exclame-je.
«- Tu n'y crois pas ? » Me demande Guillaume l'air perdu.
«- Je n'arrive pas à réaliser que ton premier "je t'aime" tu me le dises dans les toilettes du lycée mais bon... Tu n'est pas le seul.
- Ça veut dire quoi ça ?
- Ça veut dire que je t'aime aussi.
- Dans les toilettes du lycée.» Rit-il.

La musique insupportable qui nous sert de sonnerie se met à retentir et je me sépare à contre-cœur de mon petit-ami. Je ramasse mon sac et après un dernier baiser je sors de la cabine.

Je rejoins mes amis qui m'informent de leur dernière connerie et je ris avec eux. Un câlin et tout va mieux on dirait...

Tout ça ne tiendra pas.
Dès l'instant ou ça se saura tout s'écroulera.
Je n'ai pas les yeux bandés comme Guillaume qui ne voit pas notre avenir. Moi je le vois foncer dans le mur mais pourtant je m'accrocher à cet avenir. Je dois être masochiste car la collision sera affreusement violente, mais je ne peux pas abandonner. Pas maintenant. J'aime Guillaume et j'aime Alise, tant que je peux encore tenir les deux je le ferais quitte à ce que je doive les lâcher tout les deux au final.
Depuis le fond de la classe je jette un petit regard à Alise qui deux rangs plus près du tableau discute avec Eve. Mes sentiments sont en conflits permanents. Je me sens si bien avec Guillaume et si mal vis à vis d'Alise. Ce combat intérieur est en train de me ronger et de me détruire.  « Qu'est-ce que t'as à mater Alise comme ça.» Me grogne Matthieu en fronçant les sourcils:  « rassures-moi t'es pas amoureux d'elle quand même ? », cette fois je rougis violemment
« - Moi ! Amoureux d'Alise ? Mec c'est comme ma sœur dis pas des conneries comme ça, ça me gêne.
- Pardon. Moi je l'aime bien c'est pour ça...
- Attend quoi ?
- Oui j'aime bien Alise donc j'espère que toi tu n'as rien pour elle.
- Non je n'ai rien pour elle mais elle reste ma meilleure amie. Fais gaffe à toi Matthieu si tu me l'accapares avec tes jolis mots je te mords.
- Tranquille. Et toi t'aime bien quelqu'un ? »

Je rougis de plus belle et me détourne, il me faut une parade quelque chose ! C'est ce moment que choisit la professeur pour nous sommer de nous taire et je la remercie silencieusement.
La sonnerie insupportable retentit de nouveau et nous sortons bruyamment de la classe pour aller vers la cantine.

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Textes oubliés ~☆Où les histoires vivent. Découvrez maintenant