15. Le monstre de Brooklyn

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Il m'a tellement surprise que je me suis accrochée à lui par réflexe, nous faisant tomber tous deux à la renverse sur les couvertures de mon vieux matelas. Un court instant, le poids de son corps sur le mien me coupe la respiration, avant qu'il ne trouve appui sur ses coudes pour alléger mon corps. Je serre les cuisses, gênée par notre proximité soudaine alors que son nez effleure le mien, et son sourire satisfait s'évapore, remplacé par un grondement sourd.

Mes joues prennent une teinte cramoisie en comprenant que je viens de sceller, sans le vouloir, notre étreinte. Coincé entre mes jambes, son bassin presse dangereusement le mien. Je tente de glisser pour lui échapper et ses yeux se plissent avec brusquerie, assombris.

— Ne bouge pas comme ça, maugrée-t-il tout bas.

Sa voix rauque me paralyse, faisant palpiter mon épiderme déjà électrique. Je me concentre sur la longue cicatrice qui lui barre le visage pour effacer le sentiment violent qui s'empare de mon être en cet instant. Impossible, même ça ne le rend pas moins désirable.

Ma langue trace un sillage humide sur mes lèvres et je décide d'utiliser le sarcasme pour chasser mon embarras. Son regard passe de mon geste à mes yeux et il se presse inconsciemment plus fort contre moi.

— Quoi ? Je te fais peur ?

Il rit. Pour de vrai cette fois.
Qui aurait cru que les monstres pouvaient rire avec tant de légèreté ?

Son visage se rapproche lentement, laissant les arômes de son dernier café s'imprégner sur ma bouche entrouverte. Son sourire laisse à nouveau paraître ses canines pointues qu'il plante sur ma lèvre inférieure et je sursaute, laissant échapper un son que je ne peux même pas identifier.

De la surprise ? De l'excitation ? De la peur ?
Sûrement tout à la fois.

Il recommence encore deux fois et je sens ma culotte s'humidifier sous la bosse qu'il presse entre mes cuisses. Mon esprit s'emmêle, incapable d'émettre une pensée cohérente alors qu'il m'autorise enfin à respirer en s'éloignant. Lorsque ses iris plongent à nouveau dans les miennes, l'or qui s'y trouve d'habitude s'est tellement foncé qu'on aurait pu croire qu'il a fondu.

— C'est toi qui devrait avoir peur Baby Doll, souffle-t-il en baissant la tête, laissant la pointe de ses cheveux désordonnés me chatouiller les pommettes. Après tout, ce n'est pas moi qui suis coincée dans ce lit, avec un homme tout juste sorti de taule.
— J-J'ai peur, avoué-je dans un murmure.

Son visage de démon se fendit d'un sourire carnassier.

— Tu fais bien.

Il se presse un peu plus contre moi et j'ai la sensation qu'il va me rendre folle si je ne bouge pas. La situation m'échappe, mon corps me trahit en avançant les hanches et je détourne le regard devant son air narquois.

C'est pas une sensation. Ce type est dans ma vie depuis à peine deux jours qu'il me retourne déjà le cerveau.

Lorsqu'il me pince une nouvelle fois la lèvre, descendant sa main pour serrer le haut de ma cuisse avec force, je cherche une porte de sortie avant que la situation ne dérape vraiment.

J'ai l'impression qu'il pourrait me faire jouir à travers mon jean s'il le voulait.

Je le repousse du plat de la main.

— Pourquoi tu m'appelles comme ça ? demandé-je abruptement.

Il s'éloigne d'un coup sec et son long soupir s'éteint, emporté par les violents battements de mon cœur en roue libre. Ses yeux se perdent sur mon corps encore allongé alors qu'il se redresse, laissant un froid glacial remplacer mon intimité en feu mais toujours palpitant. Il me regarde mais ne me voit pas pour autant, perdu dans des pensées qui alimentent la flamme malsaine dansant sous ses paupières à demi closes.

Pari MortelWhere stories live. Discover now