#CHEF | 82 - JAMES

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Chaque minute est précieuse.

Tout comme celles que je compte nous octroyer. Connor dort encore. Ses nuits sont moins peuplées de cauchemars, mais, cette nuit, il a été agité par les prémices d'un de ceux qui le hantent régulièrement. Celui où il sauve la petite Amel. La détresse dans sa voix m'arrache chaque fois des bouts de moi.

— Hello, Soldat.

Je lui murmure à l'oreille pour terminer de le sortir du sommeil. Privilège qu'il va perdre en retournant à la base. Mes baisers dans son cou seront remplacés par le son du clairon qui se montrera bien moins romantique.

— Salut, Amour.

— Bien dormi ?

— Ça peut aller. Je me souviens juste d'avoir revécu un cauchemar. Le début, il me semble.

— Oui, celui qui concerne Amel.

— C'est ça.

Connor se colle un peu plus à moi et resserre ses bras, qui se sont enroulés telles des lianes autour de ma taille et de mes épaules. Je le laisse prendre la dose d'amour dont il a besoin pour effacer les images ancrées dans ses yeux. Je promène ma main dans ses cheveux qui avaient bien repoussé et qu'il va devoir à nouveau couper. Rasés, serait plus à propos. Il m'a demandé de m'en charger, mais pour le moment je n'ai pas trouvé le courage de m'en occuper. Sa voix rocailleuse me sort de ma réflexion. Connor, la tête nichée dans le creux de mon épaule respire avec difficultés.

— Aime-moi.

Sa façon de me le demander me déchire le cœur. Son ton me supplie comme si je devais abréger sa souffrance.

— Tout ce qui te fera plaisir. Mais avant dis-moi ce qui ne va pas.

Il se cache un peu plus contre mon torse. Ses bras me serrent de plus en plus avant qu'il me murmure.

— Amel est morte.

— Tu m'as dit que tu ne le savais pas.

— Phil...

— Qu'a-t-il appris ?

— Lors d'une patrouille, ils sont tombés sur un de ses frères. Il lui a tout de suite demandé ce qu'elle était devenue.

Je lui laisse le temps pour trouver le courage de m'annoncer la suite. Je l'arrime à mon corps autant que je peux. Je ne tiens pourtant pas à ce que son esprit s'échappe et retourne déjà là-bas. Mais Connor a besoin d'en parler pour évacuer cette souffrance, qui vit perpétuellement en lui.

— Le lendemain de notre intervention, ils sont revenus, ils les ont tous égorgés avant de mettre le feu à leur maison. Seul son frère y a réchappé, il rentrait de la médina. Sa mère lui avait demandé d'aller faire quelques courses. Les autres habitants n'ont rien accompli pour essayer de les sauver de peur d'être eux aussi pris pour cible. Ils les ont regardés brûler...

Connor fond en larmes dans mes bras. Il pleure cette gamine, l'horreur de cette guerre, son angoisse d'y retourner, celle de nous laisser, celle de ne pas revenir. J'ajoute les miennes, car j'ai tout aussi peur que lui.

— On doit espérer que le beau-frère de Dean trouve une issue favorable.

— Ils ne vont pas effacer les six mois que je leur dois en claquant des doigts.

— C'est pourtant la décision qu'ils avaient prise quand tu as été blessé.

— Ils ne me feront pas deux fois cette fleur.

Il n'y a pas que la dinde qui sera fourrée à NoëlWhere stories live. Discover now