8-2 : ARC-EN-TERRE

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— Vous avez dix minutes.

Il referma la porte. Les sons de centre administratifs furent aspirés par le cliquetis de la serrure. Le passage entre le bâtiment et la cellule venait d'être refermé, les isolant de nouveau du reste de l'arche. Hildegarde posa son livre et s'approcha d'abord de lui. Elle lui examina le visage attentivement.

— Tu as survécu... Tu as même l'air en forme.

Pour son plus grand embarras, l'arcadienne le prit brusquement dans ses bras. Max se raidit, ne sachant pas quoi faire de ses bras. Hildegarde se retourna ensuite vers Guadalupe, toute crispée sur son petit panier de commission.

— Merci infiniment de l'avoir sauvé, Tia Guadalupe.

— Il fallait bien que ton grand retour en vaille la peine, grinça l'intéressée.

Guadalupe dévisageait Hildegarde des pieds à la tête, prenant le temps de la découvrir après une dizaine d'années d'absence. Elle serrait son petit panier à s'en blanchir les mains. Enfin, elle finit par en sortir des petits pains enroulés dans des torchons.

— Tes cousins ont tenu à te cuisiner des friandises. Ils prennent ton confort très à cœur.

L'expression de la prisonnière prit un pli nostalgique. La jeune femme jeta un regard à la ronde, comme si elle espérait voir des enfants jaillir sous les jupes de Guadalupe :

— Quel âge ont-ils aujourd'hui ?

— Lorenzo et Felipe auront bientôt 9 ans. Angeles en a 14.

— Ils ont tellement grandi ! Dire que les jumeaux n'étaient que des nourrissons la dernière fois que je les ai vus ... Et Angeles est presque une femme aujourd'hui !

— Elle te ressemble énormément, sourit la tante après une pause.

— Ah oui ?

Maximilien acquiesça en silence. Hildegarde sembla émue.

— Tia, cela fait des jours que je cherche à contacter la Mama Hildegarde, mais je n'ai reçu aucune réponse à mes lettres. Pourquoi n'est-elle pas venue avec toi aujourd'hui ?

— Mercedes...

Guadalupe laissa sa phrase en suspens, et détourna le regard avant de sortir de son sac une étrange boîte à manivelle. Ses doigts tremblèrent brièvement. La sentence tomba après un silence de quelques secondes, implacable.

— Ta grand-mère est décédée il y a trois mois.

Hildegarde devint affreusement pâle. Elle sembla avoir reçu un uppercut en plein ventre. Guadalupe secoua la tête en sortant un petit objet de son panier.

— Elle voulait te l'offrir. A défaut d'avoir pu te la donner en main propres, elle m'a fait promettre de respecter cette dernière volonté.

La prisonnière attrapa son héritage d'une main tremblante. Une petite boîte à musique. Son regard se troubla lorsqu'elle passa la main sur le mécanisme. Cet objet représentait beaucoup pour elle. Guadalupe l'observa faire du coin de l'œil avant d'ajouter d'un ton plus tranchant :

— Elle a réclamé ta présence à ses côtés jusqu'à ses derniers instants.

La remarque eut l'effet d'un coup de massue. Hildegarde s'assit sur son lit de prisonnière, comme assommée. Max ne savait plus où se mettre. Le silence pesant dans lequel était tombé la cellule fut brusquement interrompu par les trois tours de serrure qui retentirent de la porte. Le gardien apparut dans son entrebâillement.

— L'entrevue est terminée.

Guadalupe détourna vivement les talons. Max la suivit à regret, laissant Hildegarde immobile sur sa couchette, recroquevillée sur la petite boîte à musique.

La tante d'Hildegarde ne se détendit qu'en sortant de la préfecture, même si elle n'avait pas quitté sa moue sévère.

— Je sais que j'ai dû te paraître cruelle. Mais cette estúpida ne pense qu'à elle. Ma mère avait déjà perdu un fils... Et la disparition de sa petite Mercedes a achevé de lui briser le cœur.

Max garda le silence, ne sachant que répondre. Hildegarde avait fini par devenir une étrangère parmi les siens... Tout comme l'Oncle Augustus. Sa gorge se serra un peu plus lorsqu'il pensa à ceux et celles qu'il avait laissés derrière lui, sur Anima. Sa famille lui tenait peut-être tout aussi rancune de son départ. Angeles se précipita à leur rencontre à leur retour chez Guadalupe. Le visage marqué par l'angoisse, elle tenait deux enveloppes entre ses mains.

— Les gardes sont passés pendant votre absence. Il y en a une pour vous deux. Écrites de la main de Janus.

Max attrapa sa missive et la parcourut du regard. Il s'agissait d'une convocation judiciaire, en tant que témoin. Le procès d'Hildegarde aurait lieu à la fin de la semaine.



Les voyages de Maximilien | LA PASSE-MIROIRWhere stories live. Discover now