8-2 : ARC-EN-TERRE

12 2 0
                                    

RETROUVAILLES

Maximilien avait finalement reçu l'autorisation de rester chez Guadalupe. Il put profiter au maximum de sa convalescence, à l'abri de l'emprisonnement. Mais il n'eut pas le loisir de découvrir Arc-en-Terre très en profondeur : on l'avait prévenu que le moindre pied posé hors de la propriété sans l'autorisation de Janus le conduira directement aux oubliettes. Il ne trouva cependant pas le temps long, par ses jeux avec les jumeaux et ses conversations avec Guadalupe et Remigio. Quant à Angeles, il ne fut pas un jour ou elle ne ramena pas avec elle l'un de ses camarades. La nouvelle de sa présence s'était largement ébruitée, et on était curieux de voir à quoi pouvait ressembler le patient de la chirurgienne.

La première sortie de Max n'eut lieu que 5 jours après qu'il eut repris conscience. Hildegarde pouvait recevoir la visite de sa tante, et Max avait été autorisé à s'y joindre. Il avait enfilé ses souliers avec une impatience mal contrôlée. En dépit des raccourcis et de sa jolie cour, la maisonnette de Guadalupe était vite devenue un peu étroite. Max passa la porte avec enthousiasme. Les rues d'Arc-en-Terre étaient ensoleillées, bordées de maisons colorées et de vélos, envahie d'arbres fruitiers, vraiment ravissantes. Mais Max était extrêmement mal à l'aise. On le dévisagseait. Les enfants le pointaient du doigt. Jamais il ne s'était senti aussi peu bienvenu sur une arche. Guadalupe, déjà tendue, se raidit un peu plus en remarquant toute l'attention qu'ils attiraient sur eux. Elle resserra le panier d'osier qu'elle avait pris avec elle.

— Ne traînons pas. Le raccourci est à deux pas d'ici.

Des fenêtres éclorent sur les façades des maisons au fur et à mesure de leur progression pour permettre à leurs occupants de les observer. Ils arrivèrent enfin sous une alcôve de pierre blanche.

— La Rose des Vents, soupira la chirurgienne.

Lorsqu'ils passèrent le petit porche, la température se fit plus fraîche. Ils venaient d'atterrir dans une grande place circulaire desservie par une dizaine d'alcôves identiques. Chacune d'elle portait le nom d'une destination : « Centre-ville. », « Grand Lac», « Orangeraie » « Académie d'architecture ». Le pavage et la luminosité était totalement différents de ce qu'il y avait de l'autre côté de l'alcôve par laquelle ils étaient arrivés ; ils se tenaient certainement en une zone totalement différente de l'arche. La tante d'Hildegarde se dirigea sans hésiter vers la porte « Préfecture ». Ils débouchèrent directement à l'intérieur d'un beau bâtiment bien éclairé. Guadalupe se présenta à un guichet. L'employé fronça les sourcils en découvrant que Max l'accompagnait.

— Vous désirez ?

— Nous voulons rendre visite à une détenue. Mercedes Imelda. Je suis sa tante paternelle.

— La fugueuse ? répondit le guichetier en haussant du sourcil.

Il farfouilla dans ses dossiers jusqu'à mettre la main sur celui qui l'intéressait. Il le parcourut en diagonale, lisant par-dessus ses lunettes.

— Suivez-moi.

Il quitta son guichet pour s'engager dans un escalier qui s'enfonçait dans le sol. Quelle ne fut pas la surprise de Max lorsqu'il se retrouva au bas des marches alors qu'il avait à peine posé le pied sur la première ! Cette façon qu'avaient les arcadiens de jouer avec l'espace était impressionnante. Le sous-sol ne comportait qu'une seule et unique porte, recouverte de plusieurs dizaines de serrures. Après avoir contrôlé le contenu du panier de Guadalupe, le guichetier parcourut tranquillement le trousseau tout aussi fourni qu'il avait à la main jusqu'à trouver la clé qui lui convenait. Il fit trois tours dans la serrure correspondante. Il y eut un drôle de déclic, et la porte s'entrebâilla. La geôle était plus confortable que ce qu'ils avaient connu sur Héliopolis. Max jeta un regard surpris à la porte restée entrouverte. Chaque clé donnait donc accès à une cellule différente ? En tout cas, celle d'Hildegarde ne se trouvait pas dans la préfecture. Creusée à même la pierre, elle comportait un lit et un bureau sans tiroirs, ainsi qu'une fenêtre sans barreaux qui donnait directement sur le vide qui environnait l'arche. Sa seule occupante releva le nez d'un épais livre. Elle portait une tunique grossièrement cousue, dépourvue de toutes poches. Son regard s'éclaira lorsque les reconnut tous les deux. Le guichetier toussa dans son poignet.

Les voyages de Maximilien | LA PASSE-MIROIRWhere stories live. Discover now