7.2 : HÉLIOPOLIS

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Lacentrale

L'héliocoptère survola la mégalopole avant d'atterrir sur un ilot secondaire. Max écarquilla de grands yeux en posant pied à terre : il faisait face à un complexe industriel dominé par une haute tour de métal. Celle-ci était surplombée d'un dôme d'où jaillissaient d'immenses arcs électriques. Passé un instant d'admiration stupéfaite, Max sortit fébrilement son carnet de sa poche pour ébaucher un croquis de cette tour coiffée d'éclairs. Il devait graver cette vision incroyable sur le papier ! Boris, Lugder et Hannes l'observèrent faire du coin de l'œil avant de les guider à l'entrée de l'usine. Le fronton austère était fait de lettres de métal : « Centrale publique n°4 » . Les gardiens postés juste en-dessous les laissèrent passer après avoir échangé un salut avec leurs gardes du corps.

— Nous allons visiter une usine de production électrique, leur expliqua Hannes.

Max échangea un regard éloquent avec son grand-oncle. Ils entamaient leur dixième jour sur Héliopolis. Dix jours qu'ils avaient passé à visiter chantiers, laboratoires et usines sans discontinuer. Dix jours durant lesquels on les avait abreuvés jusqu'à l'écœurement d'une doctrine à la gloire de l'arche et du Lumos. Et en dépit du zèle de leurs trois « guides officiels », qui avaient manifestement pour mission de contrôler chacun de leurs faits et gestes, Max n'avait pas grand mal à deviner ce qui se cachait sous tout ce vernis. L'adulation de Lucifer et du Lumos était tellement omniprésente qu'il avait du mal à croire que la population était aussi libre et heureuse que l'on voulait lui faire paraître. Même si l'homme des écrans et Nox ne s'étaient plus manifestés depuis leur coup de force du premier jour, Max aimerait bien en apprendre plus sur eux... Peut-être même comptaient-ils Hildegarde parmi leurs alliés !

Après avoir enfilé des combinaisons et des bottes en caoutchouc siglés du symbole héliopolitain, les cinq visiteurs pénétrèrent dans une salle de travail sombre. Une centaine d'ouvriers redressèrent simultanément la tête à leur entrée. Ils brandirent le poing avant de le ramener sur leur poitrine dans une synchronisation troublante. Max sursauta lorsque leurs voix clamèrent à l'unisson, tellement fort qu'elles firent presque trembler les murs :

— Que le Lumos guide votre chemin !

Ils se remirent ensuite au travail comme si de rien était. Max ne s'y ferait décidément jamais. Les ouvriers s'activaient autour de hautes cuves dégageant des nuages de vapeur brûlante. Leurs combinaisons noires et leurs épaisses lunettes de protection donnaient l'impression qu'ils formaient une armée d'automates.

— Tiens donc ? Quelle merveilleuse coïncidence !

Un homme en combinaison blanche se précipita à leur rencontre. Il se présenta comme étant le responsable général des énergies, qui par un « incroyable hasard » avait planifié une inspection de routine le jour de leur visite. Il proposa courtoisement aux deux animistes de prendre la présentation en charge. Les trois gardes du corps les encadrèrent silencieusement, comme à leur habitude.

— Vous faites face à notre salle à étuves, où nous produisons notre plasma brut. Sa recette fut mise au point par notre Lumos adoré, assisté de nos meilleurs chimistes. Approchez, n'hésitez pas !

Max et Augustus grimpèrent sur l'une des plateformes qui entouraient ces gigantesques casseroles. Il y faisait aussi chaud que dans un four. L'animiste plissa des yeux en distinguant au fond de l'étuve une étrange mélasse sombre. Il y repéra de drôle de reflets bleus qui lui étaient bien familiers...

— C'est ce liquide que nous voyons dans vos machines et vos bâtiments ?

— Exactement ! Notre plasma ultra-conducteur peut stocker des quantités phénoménales d'électricité. Il nous sert de carburant et de source d'énergie, en étant redistribué à travers notre belle Héliopolis par des kilomètres de canalisations, dont les plans ont été dessinés par notre Lumos épaulé de quelques architectes.

Les voyages de Maximilien | LA PASSE-MIROIRWhere stories live. Discover now