Les voyages de Maximilien | LA PASSE-MIROIR

5-4 : SELENE

NDA : Vous croyiez en avoir terminé avec Séléné ? Et bien surprise :-)

Les Archanges

Il fait nuit à Séléné. Le silence règne dans ses rues désertes. Plus rien ne bouge. Plus aucune lumière ne filtre aux fenêtres. Sur Séléné plus que partout ailleurs, le sommeil est une chose sacrée.

Un discret vaisseau à voile vient de se poser aux portes de la ville. Il ressemble à s'y méprendre à celui qui a quitté l'arche à peine quelques semaines plus tôt. Cinq silhouettes encapuchonnées se concertent sur le pont du navire.

— Avons-nous une cible particulière ?

— Pas encore, mais notre contact nous attend de pied ferme pour nous la désigner.

Une sixième personne sort de la cabine de pilotage. Les cinq autres font silence, pendus aux gestes de celui qui semble être le leader du groupe. Il leur fait signe d'emboîter son pas en descendant de leur véhicule.

— Allons-y. Que mousse me luisent... Tous me suivent.

Les six étrangers touchent terre, et franchissent silencieusement les portes de la capitale. Leurs pas les guident assez rapidement vers les ruelles du grand souk, toutes aussi calmes et vides que les autres quartiers. Ils finissent par s'immobiliser à la porte de l'unique boutique au pas de laquelle filtre encore un rai de lumière.

Ils y rentrent sans s'annoncer. La porte n'avait pas été verrouillée. Un homme est assis sur une chaise, posée au milieu d'une dizaine d'étals de sable multicolore. Il a beau sembler attendre ses visiteurs depuis un long moment, il ne peut s'empêcher de sursauter en les voyant pénétrer sa boutique. Le marchand de sable s'incline précipitamment aux pieds du groupe d'étrangers.

— C'est un honneur de vous recevoir ici. Milles merci d'avoir accepté de venir en aide à ma lignée.

La personne qui dirige le groupe relève sa capuche, dévoilant des yeux bleu pétillants de bonne humeur et une moustache en guidon soignée. Une sinistre grimace relève les lèvres d'Augustus en une tentative de sourire bienveillant.

— C'est tout naturel. Les enfants ont souvent besoin d'un parent attentif pour rester dans le froid demain... droit chemin.

Les traits d'Augustus se déforment comme de la pâte à modeler lorsqu'il tend la main vers Yacine. Le marchand de sable se retrouve quelques secondes plus tard à serrer la main de son double exact. Il ne peut retenir un frisson en détaillant le rictus inhumain qui déforme désormais son propre visage.

Alors que les deux Yacine échangent des formules de politesse, ses cinq subordonnés s'en donnent à cœur joie pour fureter à travers les étals. Le plus massif du groupe, un colosse aux yeux bridés, attrape un pot de sable vert avec curiosité.

— Avons-nous l'autorisation d'emporter des souvenirs avec nous ? J'ai toujours voulu essayer les rêves en poudre...

Le pot s'échappe brusquement de ses mains. Il vole jusqu'aux mains parcheminées d'une petite vieillarde, qui le repose ensuite à sa place à l'aide de sa télékinésie. Elle secoue le doigt à l'intention de son compagnon, comme une grand-mère réprimandant gentiment son petit-fils.

— Nous ne sommes pas venus faire des emplettes, Deng. Restons concentrés sur notre mission.

Le jeune homme semble contrarié par ce commentaire, mais ne proteste pas ouvertement. Il préfère attendre que la cyclope lui ait tourné le dos pour chiper un nouveau produit sur une étagère. Il n'a qu'à pincer les doigts pour le réduire à la taille d'une épingle à nourrice, avant de glisser son butin dans sa poche et de s'éloigner en sifflotant avec innocence.