Chapitre 58

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James rugit de rage. Le jeune adolescent tremble de tout son corps. Son père se jette sur lui. Gabriel se débat. Il est moins chétif qu'avant mais reste petit et mince par rapport à l'imposant James. Ce-dernier lui plaque la main sur la bouche. Gabriel tente de lui donner des coups de pieds et des coups de poings, mais James résiste. C'est lui le plus fort, ça ne sert à rien de résister, ça rend les choses plus douloureuses. Le jeune adolescent sent les larmes lui monter aux yeux alors qu'il abandonne la résistance.

Soudain, la porte d'entrée s'ouvre. Un joyeux bavardage s'en échappe. Mais tout à coup, un silence glacé tombe sur l'appartement. Gabriel tourne la tête vers les nouveaux arrivants et défaille. Son cœur explose de honte. Il aimerait mourir plutôt que rester là.

Les traits de Fenyx se déforment. D'habitude si souriant, son regard n'exprime à présent plus que la haine. Il bondit sur James et l'étrangle. L'homme relâche ainsi sa pression sur Gabriel qui tombe à terre, le visage entre les mains.

Un combat acharné se déroule entre les deux hommes. Fenyx a été grandement affaibli par la maladie et peine à attaquer. Petit à petit, James prend le dessus.

Soudain, une giclée de sang repeint les murs. Le jeune Dilor reprend difficilement son souffle tandis que son adversaire tombe sur le sol, un couteau enfoncé entre les omoplates.

Salomé se tient debout, tremblante. C'est elle qui a porté le coup fatal à son mari.


**


Dans les heures qui suivent, la police débarque dans l'appartement, accompagnée des pompiers. Le corps est débarrassé et les traces de sang, nettoyées. Fenyx et Salomé donnent leur version des faits. Gabriel est beaucoup trop sous le choc pour pouvoir parler. Il est assis sur le canapé du salon et fixe le mur d'un air dévasté.

- Je vais vous demander de venir au commissariat, dit l'officier à Salomé.

- Très bien monsieur...

Fenyx s'écrie :

- Je viens avec toi !

- Non Fenyx, dit Salomé. Reste avec Gabriel, il a besoin de toi.

La porte se referme après eux. L'appartement nettoyé est de nouveau vide. Fenyx ressent une certaine appréhension à rester seul avec Gabriel. Il craint de ne pas avoir les mots. Il se dirige vers le salon et la vue de son ami lui transperce son cœur. Si Salomé n'avait pas tué ce monstre, Fenyx s'en serait chargé de ses propres mains.

Il s'assoit à côté de l'adolescent. Ce-dernier se couvre la tête avec ses bras.

- Ne me regarde pas, dit-il.

Ne sachant que dire, ne sachant que faire pour consoler cet être qui lui est si précieux, il décide de raconter une histoire.

- Quand j'avais cinq ans, dit-il, mes parents m'ont acheté un beau vélo. Ma mère avait veillé à ce qu'il soit en or véritable car Carole, la voisine, en avait acheté un en argent à sa fille. J'ai appris rapidement à en faire avec les roues supplémentaires pour enfant. Un jour, j'ai enlevé les roues et me suis entraîné dans notre jardin. Quand j'ai enfin réussi, mon père a à peine levé les yeux de son journal. Dans les films que je regardais, les parents étreignaient leurs enfants en leur disant être fiers d'eux pour bien moins que ça.

Il s'interrompt un instant. Gabriel ne voit pas où il veut en venir.

- Je n'aurais alors jamais cru un seul instant qu'un enfant pouvait souffrir d'un surplus « d'amour ». Mais si c'était le cas, c'est le parent qui devrait se sentir honteux au point de ne plus pouvoir se regarder dans une glace. L'enfant n'y est pour rien et ce n'est pas pour autant que les gens de son entourage cesseront de le voir comme quelqu'un de bien, comme un ami.

Gabriel sursaute. Des gouttes salées tombent sur son jean.

- Gabriel regarde-moi, dit Fenyx avec une voix douce.

Lentement, le jeune garçon baisse ses mains et tourne la tête vers Fenyx.

FenyxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant