XI - Le Franc-Guerrier (B)

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La maitresse des lieux avait aussi disparue. Sans doute partie chercher du renfort pour le chant de guérison qu'elle avait promis de réaliser au plus tôt. Raunhiepel quant à lui s'était tranquillement assis sur la couche voisine en croisant les bras sur son large torse musclé. Il demanda à ce qu'on lui explique plus en détail la situation. Ce que Jarl fit de son mieux.

Spiros veillait sur sa fée, soulevant parfois une de ses mèches de cheveux pour admirer son visage plongé dans la torpeur insondable de l'inconscience.

— Qu'avez-vous appris sur les fées de la nuit pendant votre combat ?

Spiros releva la tête vers le franc guerrier. Auparavant penché sur le lit il n'avait pas suivi la conversation qu'entretenaient Jarl et Raunhiepel.

— Ce sont de féroces guerriers...impitoyables...et qui n'ont peur de rien !

— Seulement ça ?

— ...et qui obligent leur enfants, leurs femmes et même leurs filles à combattre pour eux ! Grogna Spiros avec rancœur.

— Pensez-vous qu'un peuple sain d'esprit enverrai sa propre descendance mourir au combat ? C'est bien la preuve qu'ils sont ignobles ! Appuya son ami.

— Et vous ? Vous ne combattez pas ? S'enquit l'homme.

— Si... mais c'est différent, c'est pour se défendre ! Argua Jarl.

— Sans doute avez-vous raison jeune homme. Mais avec le temps j'ai appris que bien des raisons obscures pouvaient pousser un peuple à certaines extrémités. Il doit bien y avoir des explications à cela, bonnes ou mauvaises. A toi mon garçon... Dit-il en s'adressant à Spiros. A toi d'obtenir certaines réponses auprès de ton amie. Peut-être qu'alors un premier pas en faveur d'un rapprochement de nos deux races sera possible !

— Rien ne pourra effacer des siècles de guerres ! Emit Jarl sentencieux.

— Oh le pouvoir de la rancune est immense, mais je préfère miser sur celui du pardon ! Et j'étais bien désemparé lorsque j'ai appris cette leçon. J'ai combattu par le passé des êtres créé pour tuer. Des êtres nobles mais terriblement blessé. Ils étaient fort, beau, puissant et presque rien ni personne ne pouvaient leur résister ! Ils n'étaient pas dignes de vivre, pensais-je alors. Mais j'avais tort...je ne comprenais pas toute la fresque de leur histoire. Habitait en eux la destruction et la bravoure, la rancune et le sens du devoir. Ils avaient foi en leur prince mais méprisait les hommes. Parmi eux, certain ont choisi de poursuivre dans la voie que leur destinait leur créateur. Mais j'ai moi-même été surpris par les autres. Ils avaient passés milles années à attiser leur colère, mais ils ont renoncés, préférant grandir et se dépasser en pardonnant à leur bourreau pour ne pas devenir bourreau à leur tour. Nous sommes bien petits face au pardon... Des sacrifices et des épreuves nous attendent. Vous attendent plus particulièrement, mais si vous avez un but et que vous agissez ensemble, rien ne pourra vous arrêter. Détournez-vous des guerres passées, la jeunesse est avec vous. Ne vous engluez pas dans les mêmes erreurs que vos ancêtres. Apportez une nouvelle vision au monde ! Retient bien cette leçon mon jeune ami. Dit-il en regardant Jarl droit dans les yeux, le pouvoir de la volonté est créateur de miracle, avec l'aide de Pérénor bien sûr !

Jarl observa le colosse mimer un sourire. C'était à la fois grotesque et chaleureux. Mais les paroles de Raunhiepel firent leur effet, et il vit ses pensées se tourner vers un avenir plus radieux.

Ravis de ce constat, il accueilli la fée qui revint comme promis, accompagnée de trois de ses semblables. Elles se ressemblaient beaucoup. Mais chacune d'elles avait des ailes aux couleurs uniques, très bigarrés, et qui accompagnait leurs déplacements d'une signature frétillante et joyeuse. Leurs robes de soies frôlaient le sol sans le toucher. Sans bruit elles saluèrent les deux jeunes amis et le franc-Guerrier. Etaient-elles détachées ou simplement endormies ? Jarl n'en était pas sûr. Toujours est-il qu'elles ne bronchèrent pas en constatant qu'une de leur némésis était étendue sur l'une de leur couche. Peut-être le professionnalisme les empêchaient-elles de prononcer une quelconque remarque déplacée ? Jarl leur en fut reconnaissant pour Spiros.

Fées et bâtons de sorcierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant