VI - Astres contraires (A)

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Le matin accueillit Jarl avec la violence d'une claque pleine de fureur. Les souvenirs du jour précédent envahirent son esprit et le raz de marée de ses souvenirs le jeta un moment inconscient sur son lit. Spiros ? Comment va-t-il ?

Il se redressa sur sa couche et se prit la tête entre ses mains. Une douleur persistante lui enserrait le crâne.

Il fit sa toilette et quitta rapidement sa maison. Son emploi du temps était chamboulé par les évènements, si bien qu'il ne devait plus se rendre aux camps pour sa formation mais pour aider aux réparations. Il avait reçu l'ordre le jour précédent de rassembler les armes et les objets récupérés sur les cadavres des attaquants pour les classer, trier ceux qui étaient magiquement améliorés et ceux qui ne l'était pas. Il devrait travailler en collaboration avec les forgerons, un archiviste, et un Faël choisi pour sa connaissance des armes. Encore une journée qu'il ne verrait pas passer, mais avant de répondre aux demandes des uns et des autre, il voulait savoir si son ami s'était remis de sa blessure.

Les villageois étaient plus matinaux que d'habitude. Tout le monde semblait pris d'une folie hyperactive afin de nettoyer les rues de la fureur des combats. Le sang noircissait toujours le sol par endroit, donnant du labeur aux femmes qui tentaient de le faire disparaitre à grandes eaux. De leurs côté, les hommes érigeaient des bûchers pour purifier la zone des corps immondes des loups de sang. Une énergie furieuse animait les gens qui refusaient de se laisser abattre après le coup dur que leur avaient infligé leurs ennemis de toujours. Il n'y aurait plus de rires ni de jeux avant des jours, peut-être des semaines, les ménestrels ne composeraient ni de chansons glorieuses ni de ballades épiques, juste de triste poèmes et quelques vers lyriques. Mais le cœur des gens ne sombreraient pas dans le désespoir pour autant.

Le peuple se battait encore et toujours avec la même volonté féroce qui le maintenait en vie depuis des générations, et une bouffé de fierté envahie Jarl en le constatant une nouvelle fois.

Il parvient rapidement jusqu'à la maison de Spiros et frappa immédiatement à la porte. À sa grande surprise ce fut son ami lui-même qui lui ouvrit.

— Oh, déjà sur pied ! Tu vas bien ? Demanda Jarl plus surpris que si Ésope lui avait annoncé tout de go qu'il faisait vœux de célibat.

Son ami mit un doigt en travers de sa bouche pour lui faire signe de rester discret et sorti de chez lui en fermant doucement la porte derrière lui. Il pressa Jarl de quitter l'endroit rapidement et le conduisit jusqu'à un banc calé un peu en retrait entre une maison et la forge du père Dodu.

Il sortit deux tiges de maïs et en proposa une à son ami.

— Tiens, si tu n'as pas eu le temps de manger.

Jarl refusa, il n'avait pas faim. Il observa son ami grignoter en silence et remarqua que le moignon avait été soigneusement enrobé d'un tissu de lin blanc. Spiros ne semblait pas en souffrir, il ne semblait même pas faire attention à son nouvel handicap et usait agilement de sa main gauche.

— Comment vas-tu ? Demanda Jarl avec prudence. Pourquoi est-ce que tu t'es enfui aussi discrètement de chez toi.

— J'avais besoin de prendre l'air et réfléchir. Ma mère est au petit soin pour moi depuis l'aurore mais je la sens abattue au fond d'elle-même. Elle me regarde comme si mon avenir était compromis et je n'aime pas voir cela dans son regard.

La mine sombre il tourna ses yeux vers Jarl.

— Elle a toujours eu de trop bonnes intuitions au point que ça fait peur. Elle a vu mes veines noircies sur mon bras. Elle sait qu'il s'est passé quelque chose de grave hier. Elle n'a pas encore comprit, mais elle m'a posé plein de questions... et je n'en peux plus de lui cacher la vérité.

Fées et bâtons de sorcierWo Geschichten leben. Entdecke jetzt