Chapitre neuf

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NERUN

Royaume d'Israkt.

Les cris de guerre Israkite. Dans l'arène naturelle, ils résonnaient, amplifier mille fois pour atteindre notre Daaji. D'ordinaire, j'aimais cette ferveur, j'aimais observer les miens pratiquer l'Aman-Kaez ; notre danse de combat. Pas aujourd'hui.

Une douleur peu familière semblait grignoter l'exact emplacement de mon cœur, me rendant faible. Certaines croyances voulaient que lorsque la douleur venait, c'est que notre Daaji nous voulait à ses côtés. Alors nous nous retrouvions à Ravakh, là où notre âme se trouvait bénit. Nous pouvions arpenter le royaume des morts sans craindre de tomber dans l'oubli, sans personne pour invoquer notre nom.

Les pieds tapaient le sol qui devint tambour, des voix appelaient. Elles demandaient le combat. Le premier d'une longue liste. Nous fêtions l'Alagai-shrin ; vieille coutume de notre pays, là où chaque guerrier pouvait montrer sa valeur en invoquant le droit à combattre. Même notre Derkhsa pouvait être défié et se retrouver dans l'arène.

Pas de répit pour les puissants.

Mais comme chaque année, rien ne différait et c'est moi qu'on venait chercher, invariablement. Je me trouvais être le rempart entre nos guerriers et notre Derkhsa.

Je veille, Ahman.

Les lourdes portes s'ouvrirent, me dévoilant la fosse remplie comme jamais. Les curieux, les joueurs, les hommes des clans. Tous portaient leur symbole, leur signe distinctif.

Je m'avançai dans la lumière rougeoyante du soleil, abatant sur nous une chaleur digne d'une Chappe de plomb. Ma peau était semblable à celles des autres ; d'un brun foncé, cadeau des cieux pour supporter chaque rayon, qu'il soit le premier ou le dernier. Je fixai l'homme devant moi, attendant tranquillement. Il ne portait qu'un pantalon dévoilant des cuisses musclées et une plaque de fer protégeant notre organe le plus essentiel. Nous nous encombrions rarement de plus, même lorsqu'il s'agissait de combattre des ennemis de chair et de sang. Le dédain s'inscrit sur son visage et il cracha par terre. Un autre aurait pris cela pour un affront suprême. Moi ? Je portai un sifflet à mes lèvres et le son s'envola au-delà de mes yeux et de mes oreilles. Je ne portai pas la même tenue que le guerrier, bien que j'en sois un moi aussi. Mon chemin différait du sien et de celui de tous les autres. J'étais presque devenu un Par-yai ici ; un étranger. Des couches de vêtements dissimulaient mon corps et donc ma force – une autre croyance enracinée dans nos clans. Mon kimono fait d'une étoffe légère dérangeait autant qu'il fascinait.

L'aigle fendit le ciel, dissimulant un instant le soleil avec son ombre imposante et je l'entendis trompetter. Puissamment. Sa taille n'avait rien de normale, il faisait deux fois la taille de ses congénères et aurait été capable de dévorer un autre aigle sans difficulté. Je levai le bras et Furu vient planter ses serres dans mon bracelet de cuir. Il m'offrit le sommet de sa tête et je lui chuchotai quelques mots à l'oreille avant de m'arrêter devant mon premier ennemi de la journée.

L'oiseau me donna un coup de bec pour attirer mon attention sur un changement dans l'air. Une odeur portée par des courants invisibles.

Une tempête. Bien au-delà de nos terres. Bien au-delà de nos frontières.

Astalos.

Je fronçai les sourcils, mais déjà Furu déploya ses ailes et s'éloigna d'un mouvement lent, presque lascif. Un peu moqueur peut-être aussi. Il n'aimait pas que je m'attelle à de tels jeux inutiles.

Je n'oubliai pas mon rôle.

Le gong résonna.

L'homme utilisa son pied pour projeter du sable et il attaqua en hurlant. Il arma son poing et balança son corps en avant.

Je dansai. Je rendais hommage à Raktu.

Je dansai, les yeux fermés, pouvant prédire chaque geste, chaque pensée. Mon instinct courant le long de mon épiderme, gorgeant mon corps et ma tête.

Je parai.

Je rendis coup pour coup.

Et la voix résonna à cet instant, comme hurlé dans les confins de Zharroh, se répercutant sur chaque pierre, s'amplifiant grâce aux montagnes.

« — JE NE VEUX PAS ! »

La douleur s'intensifia et j'avalai un cri. Le guerrier m'envoya au sol et je ne me relevai pas.

Le silence résonna dans toute l'arène.

J'enfonçai mes doigts au niveau de mon cœur, cherchant à l'atteindre, à l'extraire, la voix ne me quittait plus, ne me laissait plus d'espace.

Une voix douce. Triste. En colère.

Perdue.

Elle est perdue.

Elle est perdue, alors... alors il faut l'aider.

— NERUN !

La voix de notre Derkhsa éclata et au loin, Furu glatit. Tout s'arrêta. La douleur disparut aussi vite qu'elle s'était déployée et je fus de nouveau sur mes pieds. D'un seul mouvement, j'envoyai le guerrier dans l'inconscience et trop surprise, la foule ne réagit pas.

Je quittai l'arène. Une fois loin des regards Israkite, je me laissai aller contre le mur, à bout de souffle.

Elle est perdue.

Mais qui ? 

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Découvrons ensemble ce qui se cache derrière les Échos ❤️

Est ce que ça vous intrigue ? 😎😎

Attention il y en a d'autres à la suite 😳😳😎

Les Echos de la Flamme - Tome 1 Le Réveil du Chagrin [Terminée]Tahanan ng mga kuwento. Tumuklas ngayon