CHAPITRE 53

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-Qu'est-ce que tu fais debout à cette heure-ci ?

La voix d'Harry résonne dans l'appartement. Du canapé, je tourne la tête vers lui. Il est en caleçon, porte un tee-shirt noir, et ses cheveux ont l'air plein de nœuds.

-Je suis désolée si je t'ai réveillé avec la lumière.

-Ce n'est pas cette petite lampe qui m'a réveillé, commence-t-il en s'approchant du canapé, avant de finalement s'asseoir à côté de moi. En dormant avec toi, j'ai pris l'habitude de souvent avoir des cheveux dans le dos ou dans le visage, finit-il en rigolant.

-Désolée, dis-je en lâchant doucement un rire.

Je prends une grande respiration, et passe mes mains dans mes cheveux. Alors que je suis assise en tailleur, Harry pose sa main sur mon genou.

-Ça n'explique pas pourquoi tu es debout à quatre heures du matin, me dit-il.

Je n'ose pas le regarder dans les yeux, je me contente de fixer la télé, éteinte. Je sais que mon meilleur ami cherche à croiser mon regard. Mais je ne peux pas.

-J'avais besoin de ... Penser.

-À propos de quoi ? Tes amis ? Ross ? Ton père ? Ta mère ?

J'inspire fortement avant d'avouer :

-Un peu à tout j'imagine.

-Lacy, tu peux me parler, tu le sais ça?

-Tu devrais retourner te coucher Harry.

-Tu sais que je ne retournerai pas me coucher, surtout quand je vois tes yeux rouges, et tes joues gonflées.

-Je suis plutôt sensible, je pense que tu as pu le remarquer, ce n'est pas pour autant que c'est grave.

-Tu viens d'avouer à tes amis qu'ils étaient oncles et tante, et que l'un d'entre eux est le père de ton enfant. Tu ne sais pas où se trouve ta mère, ni pourquoi elle est partie. Et l'enterrement de ton père a lieu dans moins de douze heures. Lacy, tout cela est plus grave que si tu t'étais cassé un ongle.

Au fond, je sais qu'il a raison, mais ma gorge est tellement nouée ... Je ne peux pas répondre. Et pour ne pas pleurer, je garde mon regard sur l'écran noir de la télé.

-Tu peux craquer Lacy, tu as le droit.

Il presse sa poigne sur mon genou, et la boule dans mon estomac sursaute. J'ouvre ma bouche pour pouvoir inspirer plus d'air, et je me tourne finalement vers mon ami. Mes yeux trouvent directement les siens.

-Et si je n'étais pas assez forte pour tout ça Harry ?

-Tu n'es pas toute seule, on est tous là.

-Qui ça, on ?

Quand je prononce ce mot, les portraits de mes amis me viennent en tête, et deux larmes s'échappent malgré moi. Ils seraient stupides de me pardonner le fait de leur avoir caché Rosella, ma grossesse, mon accouchement, l'adoption ...  Ils ne sont plus là.

-Viens là, ma belle, me dit Harry en me prenant dans ses bras.

Je lutte pour ne pas éclater en sanglots. Et ma gorge est plus nouée que jamais.

-Lâche Lacy, lâche ... Dit Harry à mon oreille.

Cette fois, je ne lutte pas plus de quelques secondes avant de tout lâcher, et d'éclater en sanglots dans ses bras. Quand mes yeux dérivent sur la bague à mon doigt, je pleure de plus belle, et je serre mon ami aussi fort que je peux. Je ne sais plus comment m'arrêter.

Harry et moi, avons parlé durant des heures. Je ne pensais pas que j'arriverais à autant me livrer. En fait, nous avons parlé de beaucoup de choses, mais surtout de mon père. J'ai parlé à Harry de mes trois ans, c'est à peu près à cet âge-ci que j'ai mes plus anciens souvenirs. À cet âge-là, je me rappelle que Papa me faisait danser sur des chansons des années 80. Quand ma mère disait que j'avais assez de poupées Barbie, mon père m'emmenait quand même au magasin de jouets en cachette, après l'école. Quelques années plus tard, il adorait m'emmener faire des tours de moto avec lui, avant qu'il ne la vende deux ans après, pour que l'on se fasse un peu d'argent. Mon père n'a pas fait de grandes études, par soucis de moyen, encore une fois. Ses parents sont morts quand il avait trente ans. Deux ans plus tard, ce sont les parents de ma mère qui décédaient dans un accident de voiture. Je n'ai pas vraiment eu la chance de les connaître. Mes quatre grands-parents sont décédés avant mes dix ans. Tout ce que je sais sur mes grands-parents, c'est que le peu d'argent qu'ils avaient sur leurs comptes, ils l'ont donné à mes parents sur leur testament. Et pour quoi ? Pour payer mes études, et mon école de danse. Mes grands-parents étaient des personnes incroyables, et ils m'aimaient. 

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