― TROIS NIVEAUX, dit laine. Aujourd'hui, vous allez devoir franchir trois portes en un temps limité. Dans chaque niveau, vous aurez trois monstres à combattre. Tant que vous n'aurez pas éliminé ces monstres, la porte ne s'ouvrira pas. Vous êtes à deux, ce sont des monstres très puissants natifs de Tétra, la seule chance de vous en sortir est de vous entraider, de coopérer... même si je sais que certains d'entre vous ont déjà pris la décision de ne pas le faire. (Son visage se tourne vers Océane qui grimace.) Mais cela fait partie de votre formation, la coopération. Il n'y a qu'une seule porte dans cette salle. Vous aurez compris que nous sommes dans un genre de labyrinthe, ça signifie qu'un groupe qui passe, ne se retrouvera pas dans le même niveau qu'un autre. Vous vous retrouverez tous dans des niveaux différents, mais les monstres de notre sélection sont les mêmes. Bien, nous allons commencer par les derniers, Camille et Mikolaj. Vous avez une heure et trente minutes pour franchir les niveaux.
Mikolaj et Camille se présentent à la porte. Cinq minutes après, ce sont au tour des suivants. Améthys et moi sommes les derniers.
Je la laisse entrer dans la salle de contrôle en premier. Elle passe le scanner et récupère son arme. La boudjelaihse me scanne, puis le sol bouge comme si nous nous élevions. La porte s'ouvre quelques secondes après.
Mes pieds s'enfoncent dans une eau trouble qui m'arrive au genou. Autour de nous quelques arbres et de la brume.
― Ça commence bien pour toi, me dit-elle.
― Nous risquons d'affronter un monstre type amphibien, plus énorme et plus dangereux que celui du marais ou une espèce de Kelpie. Ce sont les seules monstres qui vivent au bord de l'eau sur Tétra.
― Comment tu le sais ?
― J'ai fait des recherches.
― On n'a pas de fichiers concernant les monstres à la bibliothèque.
― C'est parce que mon nom a beaucoup d'influence.
Elle lève un sourcil, pas très convaincue.
― C'est aussi grâce à ces recherches que tu as sues pour les Revlafs ?
― Ouais.
― En tout cas... merci... je l'ai vaincu grâce à toi.
― J'avais dit de le tenir secret.
― J'ai gardé le secret.
― Non tu l'as partagé avec tout le monde.
― Je leur ai juste donné des indices. C'est tout. Ils croient que c'était la chance du débutant. (Elle regarde devant elle à la recherche d'une bête.)
― Ne les recherche pas.
― Pourquoi ?
― Pour que nous passions plus de temps à discuter.
Elle me fixe comme si j'étais un extraterrestre.
― Discuter de quoi ?
― De toi.
― Je n'aime pas parler de moi... Par contre, j'ai une question... tes amis et toi, vous allez nous abandonner ? Ou peut-être que tu as l'intention de me tuer.... Pourquoi tu m'as choisi comme fardeau ?
― Tu as dit que tu avais une question, pas deux.
Elle avance, je la suis.
― Je ne vais pas t'abandonner... Pour mes amis, je ne sais pas...
― Et pourquoi je te ferai confiance ?
― Parce que je te dois la vie, et t'as une dette envers moi maintenant que je t'ai aidée à vaincre le Revlaf.
Elle s'arrête et se retourne pour me regarder.
― Une dette ? C'est pour ça que tu m'as choisie ?
― Non... C'est parce que je peux te toucher.
Elle fronce les sourcils. Soudain, quelque chose sort de l'eau, l'agrippe et la fait valser dans les airs avant de la rattraper et de disparaître. Améthys crie. Je récupère son épée qui est tombée dans l'eau, et me précipite à sa rescousse en suivant le son de sa voix.
J'avais vu juste, c'est un monstre amphibien, sa langue peut attraper les proies jusqu'à 10 km. Une fois capturées, il les enferme dans une poche verte et attend que leurs proies soient desséchées. En général cela prend 24 heures pour qu'une personne se déshydrate.
Je sprinte jusqu'à trouver un monstre aussi grand que moi. Sa peau est gluante, de la même couleur que l'eau trouble, ses yeux globuleux tournent dans tous les sens. Il est debout sur des pattes palmées qui referment des griffes. Il me voit, ouvre sa bouche et grogne. (Mon dieu, quelle halène !) Il ne possède que deux dents pointues comme des aiguilles. Et là, j'aperçois sous son ventre une poche aussi grande que son bassin. Améthys est à l'intérieur, elle essaie de sortir de la poche en donnant des coups de pied. Malheureusement, elle ne pourra pas se libérer comme ça. Cette poche fait partie du corps de la créature, une poche faite de sa peau, gluante et élastique.
Tout à coup, le monstre se jette sur moi en me lançant ses pattes palmées. Je fais un bond en arrière. Il vient de trouver de la nourriture et je ne pense pas qu'il est prêt à se laisser tuer. En plus, je ne pense pas qu'on les nourrit à leur faim ici.
Je fais tournoyer l'épée avant de lui lancer un coup droit dans le torse. Il hurle. Je lui donne un autre coup dans sa poche afin de délivrer Améthys. Mais mes coups ne sont pas assez puissants que la poche a du mal à s'ouvrir. Le monstre me regarde et j'ai l'impression qu'il rit. Brutalement, il fait un saut immense. Il prend la fuite à ma grande surprise. Je lui cours après lui lançant mes flammes. Touché, il tombe dans l'eau mais se relève rapidement en hurlant comme si le monde s'effondrait sous ses pieds.
Avant qu'il ne reprenne sa course je le lance une incandescence dans ses membres supérieurs. Les flammes le font courir dans tous les sens avant qu'il ne se jette à l'eau. Je le rattrape. Il se relève mais avant qu'il ne se défende, je lui tranche la tête.
J'amène le reste de son corps et le soutiens contre un arbre. Je morcelle sa poche jusqu'à ce qu'Améthys y sorte.
Elle prend une bouffée d'air comme si elle avait été sur le point de suffoquer.
― Ça va ?
Elle reprend sa respiration et se touche le bras droit. Elle a un bleu au niveau du coude.
― Tu peux te soigner ?
― Laine va le remarquer. S'il nous observe et qu'il voit que je n'ai pas de blessures... Il va trouver ça étrange.
― Il se peut qu'il sache déjà que tu as des pouvoirs cachés.
― Pardon ? dit-elle d'un ton offusqué.
Je reprends mon chemin.
― Il n'entend pas ce que nous disons, mais il faut être vigilant. Ça te dit une virée nocturne ?
― Pardon ?
Je ris.
― Tu n'as jamais enfreint le règlement ?
― Si... la dernière fois, avec des amis, nous sommes allés à l'école primaire pendant la nuit. Tu sais sur la colline avec l'oranger. Et nous y sommes restés jusqu'à 3 heures du mat.
― Sans blague ?
― Oui, c'est vrai.
― Alors, tu n'es pas une dégonflée.
― Si j'étais une dégonflée, tu crois que je t'aurais touché la première fois ?
― C'est vrai, dis-je en souriant. Et c'est aussi une raison pour laquelle je t'ai choisie, rajouté-je après un moment de silence.
― Oui, mais je ne suis pas non plus une combattante hors pair. Et je suis parmi les plus faibles.
― Tu es faible parce que tu as peur de tes pouvoirs. C'est tout. Mais je sais que tu es forte. Personne n'a jamais osé me défier du regard. Tu as vu Lothar. Ce n'est pas parce qu'il est parmi les premiers middle class qu'il est capable de m'affronter.
Je l'entends rire, et puis « plouf ». Elle est tombée dans l'eau. Je me retourne et lui tends la main. Elle me regarde et hésite à la prendre.
― Je ne vais pas te manger, dis-je.
Elle fronce les sourcils mais me prend la main. Je l'aide à se relever.
― Je sais que tu ne vas pas me manger, me déclare-t-elle. C'est juste... t'es désagréable d'habitude et là t'es gentil. Je n'arrive pas à savoir ce que tu veux.
Je souris et reprends le chemin en gardant ses mains dans la mienne. J'aurais aimé retirer mes gants pour sentir sa peau contre les miennes mais si Laine nous observe et qu'il s'en aperçoit ça ne fera qu'aggraver les choses. Malgré tout je sens ses mains serrer les miennes et mon corps frissonne de joie.