On dirait que nous sommes dans un cratère. Autour de nous, de lalave s'écoule vers un lac de flamme. C'est ma chance. Je plonge mon corps dans le courant de flamme. La chaleur peut tuer la chose qui commence à me nouer l'estomac. Je prends un peu de lave et l'avale.
― Tu arrives à boire de la lave ?
Je regarde Améthys, l'air stupéfait. Je ressors de la rivière de feu.
― Ça t'étonne ? Le feu ne me fait rien. C'est comme si j'avalais une soupe froide.
Mon estomac arrête de se nouer. La nausée, que j'avais, commence à s'estomper. Je reprends des forces.
― Tu peux vérifier si j'ai encore cette saleté ? Je retire ma veste et mon tee-shirt.
Elle recule un peu. Son visage s'empourpre, elle semble embarrassée.
― C'est toi qui m'as dit que je pouvais retirer mes vêtements pour voir si j'avais une bactérie. Arrête de contempler mon corps comme si j'étais le plus beau mec que tu aies vu.
Elle rougit encore plus et j'ai l'impression de voir de la fumée sortir de ses oreilles. Je ris. Elle s'approche de moi et pose ses mains sur ma poitrine. J'ai l'impression qu'une petite décharge électrique parcourt mon corps, mais c'est une sensation agréable. Mon souffle ralentit et, mon cœur se met à battre à vive allure lorsque ses doigts descendent vers mon ventre. J'essaie de respirer normalement pour qu'elle ne remarque pas mon embarras. Ses yeux scintillent de leur éclat violet. Je commence à comprendre. Quand elle se sert de cette capacité pour guérir, ils changent de couleur. Elle retire ses mains, je reprends mon souffle.
― Je n'ai rien vu... la lave que tu as bu as dû le rôtir. C'est juste ton cœur, il battait très fort et très vite, pourtant il n'y avait pas d'anomalie.
Cette fois, c'est moi qui rougis. Je remets mon tee-shirt et ma veste en lui tournant le dos. Il est hors de question, qu'elle voit mon visage et qu'elle se moque de moi. J'avance à grands pas. J'arrive à une intersection où trois portes s'ouvrent devant nous. Je prends celle de gauche.
― Ce n'est peut-être pas par là.
Je fronce les sourcils et me mords les lèvres. Je me tourne vers elle.
― Bien, si tu connais le chemin, tu n'as qu'à passer devant.
Elle fixe les allées une à une, et finit par prendre celle de gauche.
Je grimace.
― Ce n'était peut-être pas par-là ? ! vociféré-je. Nous avons perdu du temps.
― Tais-toi ! C'était juste un pur hasard ! Et si je n'étais pas là, tu aurais tourné en rond.
Nous avançons.
― Camille est déjà venue ici, me dit-elle après un moment de silence.
― Camille ?
― Ma copine, la fille rousse aux deux couettes. La lowclass qui est classée quinzième. Elle a fait ce niveau la première fois. C'est bizarre non ? Que nous nous retrouvions dans un niveau où certains sont déjà passés ?
― Le but est que tout le monde ait traversé tous les niveaux. On est comme dans une plateforme ici. Les boudjelaihs nous font changer de niveau sans que nous nous en rendions compte. Mais à mon avis, ce sont les monstres qui changent.
― Elle m'a dit qu'elle avait eu à combattre des monstres de feu.
Le sol se met brusquement à trembler. Améthys perd l'équilibre. Je la rattrape par la hanche pour l'empêcher de tomber. Elle est contre moi, sa tête m'effleure le menton. Ses cheveux, malgré le fait qu'on ait été dans une eau puante, sentent encore le shampoing, une odeur de miel et de camomille. Elle sent vraiment bon. Elle lève la tête. Nos yeux se croisent. Elle semble embarrassée et s'écarte de moi rapidement après avoir repris son équilibre.
― Merci, me souffle-t-elle.
Pas le temps de discuter ! Un monstre de pierre surgit, de la fumée s'échappe de son corps.
― Redonne-moi ton épée !
― Pourquoi ?
― Parce que c'est un monstre type feu. Je ne vais pas réussir à le vaincre avec mes flammes.
Elle hésite mais finit par me la tendre. Je l'empoigne avec mes deux mains. Hors de l'eau, elle est plus maniable. Je donne un coup. Le monstre explose aussitôt. Tout à coup, une cinquantaine de monstres apparaissent devant nous. Poignée vers le haut, puis vers le bas, je les élimine. Mais ils sont de plus en plus nombreux, que le seul moyen de s'en tirer est de prendre la fuite ! J'attrape la main d'Améthys et je l'entraîne dans ma course. Les monstres nous poursuivent, nous lancent leur rocher que nous esquivons tant bien que mal. Des explosions nous font trébucher. Nous nous relevons et courons le plus vite possible. Améthys ne semble pas avoir de mal à suivre mes pas.
Améthys et moi sommes au niveau 5 quand l'alarme se met à sonner. Nous sommes dans une forêt enneigée. Nous avons été encerclés par d'immenses loups sans poil, avec une queue de dragon. J'ai eu le temps d'en vaincre un. Dès que l'alarme s'est déclenchée, les monstres se sont calmés et se sont couchés comme des chiens. Nous avons senti le sol bougé. Après un léger tremblement, une cabine en verre est sortie du sol. La porte s'est ouverte.
― Entrez dans la cabine, nous dit la boudjelaihse qui nous accueille à chaque fois.
Je manie l'épée une dernière fois. Je crois m'y être accommodé.
― Arrête de jouer au chevalier.
― Ah, parce que je suis ton chevalier maintenant ? ricané-je.
Elle fronce les yeux et entre dans la cabine. Elle se colle contre la vitre. Je la rejoins.
― Tu crois qu'il y avait d'autres élèves dans ce niveau ?
― Je ne pense pas. Je suis le premier partout. J'aurais pu atteindre le sixième niveau si je ne t'avais pas aidé.
― Je ne t'ai pas demandé de m'aider. En plus, on dirait que ça t'a plu de jouer au chevalier. Pourquoi tu n'as pas choisi d'armes ?
― J'avais le choix entre un couteau de cuisine et un bouclier. Tu me vois utiliser un couteau de cuisine contre un monstre ?
Elle rit.
― Tu plaisantes ?
― J'en ai l'air ?
Elle sourit. Ses yeux pétillent. Je ne l'ai jamais vu ainsi. Bah à vrai dire, je n'ai jamais prêté attention aux lowclass. L'ascenseur s'arrête la porte s'ouvre.
― La prochaine fois, prend la première porte ! lui ordonné-je.
Elle hausse les sourcils. Je lui rends son arme et la laisse sortir.
― Merci de reposer l'arme, dit la boudjelaihse.
Améthys s'affaire et entre dans le scanner. Les faisceaux la scannent.
― Améthys RISE, niveau cinq. Vous avez tué 54 monstres.
Je plisse mon front. Quand a-t-elle tué ces monstres ?
― Il doit y avoir une erreur, dit-elle.
― Comme vous avez choisi une arme nous répertorions le nombre d'ennemis touchés par votre épée. Et l'ordinateur indique 54. Il n'y a pas d'erreurs.
Elle me regarde l'air irrité.
― Vous pouvez sortir.
― Il est hors de question que je te suive la prochaine fois, me dit-elle avant de quitter la pièce.
Je prends place à mon tour dans le scanner.
― Flame AEGNOR, niveau cinq, vous avez tué 16 monstres.
― Comment est-ce que vous savez que j'ai tué 16 monstres ?
― Vous n'avez pas choisi d'armes et vous êtes le seul à utiliser un élément naturel à savoir le feu.
Si j'avais su, je n'aurais pas utilisé son épée. Je quitte la salle. Laine me regarde sévèrement. Améthys est assise à sa place et semble inquiète. Nous sommes les premiers à être arrivés.
― Monsieur Flame, y a-t-il eu un problème avec Miss RISE ? me demande Laine.
― Non.
Il lève un sourcil incrédule. La porte s'ouvre et Atlas arrive. En quelques minutes, la salle se remplie.
Lorsque tout le monde est là, Laine affiche le classement. Les élèves crient d'étonnement en voyant le nom d'Améthys en haut avec son score de 54 ! Quant à mon prénom, il est dans la liste rouge. Mes amis me regardent épouvantablement choqués.
― Du calme, ce score est erroné. Miss RISE n'a pas réussi à éliminer ces monstres toute seule.
― Wooh ! On a crié à l'aide, ricane Quincy.
― J'aimerais bien savoir comment vous vous débrouillerez dans une mare remplie d'octoplucts qui vous empêche de respirer Monsieur BRIGHT, lui lance Laine. (Il me fixe ensuite.) Levez-vous Monsieur AEGNOR. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi votre score est de 16 alors que celui de Miss RISE est de 54 ?
Tout le monde se tait et me regarde. Je me lève et croise les mains derrière moi.
― J'ai juste eu pitié d'elle. Elle n'était pas capable de manier son arme. Alors je le lui ai pris pour éliminer les monstres.
Les autres élèves rigolent. Améthys regarde l'écran et ne bouge pas.
― La prochaine fois, Monsieur AEGNOR, ne prenez pas pitié d'une lowclass et laissez-la se débrouiller toute seule. Bien, rentrons à Streitbar.
Laine sort de la salle. Mélik se lève et tous les majestueux suivent. Nous sommes les premiers à sortir comme d'habitude. Je lance un regard à Améthys. Elle me soutient du regard, j'ai l'impression de voir des flammes dans ses yeux. Elle est en colère, cela me fait sourire.