• Chapitre 2 •

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Naomi

L'homme se retourne et me laisse complètement bouleversée. Une alerte fusillade, une alerte fusillade ! Je me faufile entre les gens et tente d'interpeller l'un des policiers.
— Excusez-moi, je travaille ici. Pouvez-vous m'expliquer ce qu'il se passe ?
— Je suis désolé madame mais, la situation est en train d'être réglée.
Je me fiche que la situation soit en train d'être réglée, je veux savoir ce qu'il se passe ! Des employés aux visages blafards sortent des ascenseurs mais, aucun signe d'Adan. Mon estomac se tord dans tous les sens tant l'angoisse est présente. Où est-il ? Je pivote vers une jeune femme à ma gauche.
— Savez-vous si Adan Brown est sorti de l'immeuble ? Je demande, d'une voix étranglée.
— Non, la moitié des personnes sont encore à l'intérieur.
J'inspire et expire comme je le peux. De grosses voix perçantes apparaissent dans mon dos. Ce sont des journalistes ! Oh bon sang...Ils ne peuvent pas s'empêcher de rappliquer comme des fouines.
Je me cache derrière mes collègues et tends l'oreille.
— Savez-vous ce qu'il se passe ?
— Y-a t-il une fusillade ? Certains disent qu'il y aurait une dizaine de morts, est-ce vrai ?
Une dizaine de morts, bordel de merde...Non, pas ça...Il va bien, je suis sûre qu'il va bien. Je joins les mains ensemble, dans une prière silencieuse. Il y a à peine quelques heures, il était contre moi...Faites qu'il aille bien.
— Reculez ! Hurle l'un des policiers, la main tendue en notre direction.
Plusieurs personnes sortent du bâtiment, l'un d'eux a l'arcade sourcilière ouverte, du sang s'en écoule. Mon cœur s'arrête de battre durant une seconde. Mes jambes se mettent à trembler si fort que je suis obligée de me tenir au bras d'un homme. Il devrait être là, il devrait être parmi ces gens...
— Est-ce que tout va bien, mademoiselle ?
Pourquoi ne sort-il pas de là ? Pourquoi ?
— Mademoiselle ? Insiste l'homme.
— Oh...oui, excusez-moi.
Je lâche son bras et tente de stopper en vain, ces tremblements qui immergent chaque membre de mon corps. Les bruits environnementaux me montent au crâne, je vais exploser comme une marmite si ça continue ainsi. Je ferme les yeux et pose une main contre mon cœur, il bat si fort, si fort qu'il pourrait bien se fissurer en deux.
De ma main libre, je sors mon téléphone et tente de rappeler Adan. Cette fois-ci, les sonneries n'ont à peine le temps de sonner qu'elles se coupent directement. Ce n'est pas normal.
— Réponds-moi, réponds-moi...
Je rappelle encore une fois mais toujours pas de réponse. Allez mon amour, réponds-moi ! Ma vision se brouille et j'étouffe. Je suis une boule de nerf, de stress et d'effroi ! Il faut que je m'éloigne de toute cette agitation qui parasite mon espace vital. Je fais demi-tour et bouscule un tas de personnes pour enfin retrouver mon oxygène. L'air froid me brûle les poumons mais, j'ai pourtant l'impression d'être en feu, d'avoir avalé des braises qui restent coincées au fond de ma gorge.
À moitié accroupie sur le trottoir, je reprends mon souffle.
— Naomi ! Adan ? Non, ce n'est pas sa voix.
Je me retourne. Jeff s'approche de moi et me prend brusquement dans ses bras.
— Est-ce que ça va ? J'ai entendu dire qu'ils n'arrivaient pas à trouver Adan, il n'était pas dans son bureau lorsque les gendarmes sont montés. Personne ne sait où il se trouve mais, ça ne veut rien dire. Okay ?
Je serre la veste de Jeff dans mes poings et suffoque.
— I...il ne répond pas à son téléphone.
La panique s'engouffre dans mon esprit. La vision du corps d'Adan transpercé par une balle en plein cœur, me terrifie. Son corps, que j'ai tant chéri. Étendu sur le sol froid de son bureau...Ne pense pas à ça, idiote ! Pleurniche ma conscience. S'il ne sort pas de ce bâtiment, mon monde s'écroule, tout s'écroule. Il doit revenir, il doit me revenir...
— Viens, Jenna est là-bas.
Je suis égoïste et une horrible amie. Je n'ai pas pensé une seule seconde à Jeffrey ou Jenna, juste à mon Adan qui ne montre aucun signe de vie. Il me pousse un peu plus loin, toujours proche de l'entrée. Jenna se ronge les ongles à sang avant de m'apercevoir, elle accourt vers moi et m'étreint de toutes ses forces.
— J'ai eu tellement peur pour toi.
— Je n'ai rien.
J'essaie de faire preuve de stoïcisme mais c'est foiré, Jenna fronce les sourcils.
— Je suis convaincue qu'il va bien. Tente-t-elle de me rassurer.
Tout à coup, les gens s'animent dans notre dos. Les journalistes se jettent en avant et tendent leurs micros, à bout de bras.
— Monsieur Brown !
— Excusez-moi, monsieur Brown !
Je cligne des yeux et regarde vers l'entrée du bâtiment. Des hommes en costume noir, encerclent deux personnes à l'aide de leurs bras. L'une est presque sur le point de s'écrouler tandis que l'autre la maintient debout. Il m'est impossible de voir leurs visages mais lorsque l'un des hommes en noir se décale vers la gauche, le visage d'Adan me flanque une baffe monumentale. Il est là ! Vivant !
Je me fige sur place, comme scotchée au sol sans la moindre possibilité de me décoller. Adan a le bras vissé autour des épaules d'un jeune homme en pleine crise d'Asthme.
— Appelez un médecin et apportez-lui de la ventoline, vite ! Crie Adan, maintenant le corps du jeune homme souffrant d'asthénie. Sa respiration siffle.
— Dégagez le passage !
Chesters repousse les journalistes qui tentent de prendre en photo Adan et le jeune homme et fait rempart de son corps. Je ne parviens pas à m'approcher. Il fait s'asseoir le garçon sur le sol et dégage la cravate qui enserre sa gorge.
— Isaac, regardez-moi !
Isaac Peters, l'entretien. Il capture les épaules du fameux Isaac, les sourcils froncés. La respiration du jeune homme ne se calme pas, son visage est rouge tant il peine à reprendre son souffle.
— Il faut que vous vous calmiez. Nous sommes hors de danger, d'accord ? Inspirez et expirez.
Le sang froid d'Adan est impressionnant. Si je m'approche, je suis sûre de le gêner alors je reste là, les bras ballants, le souffle court et les yeux humides. Les micros, les appareils photo s'affairent autour d'Adan qui lutte contre la panique.
— Putain, Chesters ! Dégage-les de là !
Chesters s'adresse à quelqu'un à travers son oreillette et quelques minutes plus tard. Un groupe d'hommes rappliquent et font reculer les journalistes qui ne cessent de poser des questions. Mon esprit est toujours clos, j'ai eu tellement peur que je n'arrive plus à savoir si ce n'est que mon imagination ou la réalité. Est-il bien là, sain et sauf ?
— Isaac, respirez avec moi, est-ce que c'est compris ?
Il hoche la tête et ferme les yeux pour enfin accueillir l'air frais de l'extérieur. Peu à peu, il se calme et son visage retrouve une couleur à peu près naturelle. Un vieil homme en blouse blanche se précipite vers eux et fait signe à Adan qu'il contrôle la situation.
Il se relève et passe une main dans ses cheveux, soucieux. Je parviens à prendre une ample inspiration et m'avancer droit vers lui. Chesters me distingue parmi les employés et s'approche de moi, la mine craintive.
— Mademoiselle Anderson, est-ce que tout va bien ?
— Oui...je...
— Naomi ! M'appelle une voix. Sa voix.
Chesters se retourne et je vois qu'Adan accourt vers moi. Ses traits sont crispés, il est inquiet.
Ses bras s'enroulent autour de moi et ma poitrine heurte son torse. Il est là...Je retrouve mon souffle et observe du coin de l'œil, ces immenses vagues gondolées censées représenter mon inquiétude qui quittent mon corps.
— Est-ce que ça va ? Tu n'as rien ?
Ses doigts se baladent sur mon visage.
— Ça va, je n'ai rien, j'ai...je m'arrête, voyant les larmes brouiller ma vision...Je ne te voyais pas sortir, j'ai cru...
— Hé, ça va, je suis là...Siffle-t-il, les lèvres dans mes cheveux.
Je le serre contre moi, me répétant qu'il va bien et que tout ça, va rapidement être réglé.
— Chesters va te ramener à la maison. Je dois...
— Non ! Je ne rentre pas, je reste auprès de toi. Je tranche sa phrase, la terreur remplacée par la colère.
— Naomi, s'il te plaît ne discute pas. M'ordonne-t-il.
C'est bien facile de dire ça lorsque j'ai cru avoir perdu l'homme de ma vie, hors de question d'attendre sans l'avoir près de moi.
— Non Adan, je reste ici.

•••

Haut Niveau - Tome 2 -Where stories live. Discover now