Chapitre 12

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" Chaque rencontre représente un risque, l'enjeu est de le surmonter." Francesco Alberoni 

Let's hurt tonight – One Republic

     Le studio que possèdent Steph et Laurent ressemble en tous points à un appartement d'étudiant. Une petite kitchenette dans le fond, une seule chambre et des fiches de révisions dans tous les coins. Devant moi, posées sur la table basse, de nombreuses feuilles détaillant tout le système cardio-vasculaire accompagnées de quelques coupures de presse de magazines de médecine. De nombreux cahiers et livres traitant des maladies auto-immunes ont été disposés, ou plutôt jetés, sur la table à manger, à tel point qu'elle est inutilisable. Laurent occupe tellement l'espace avec ses études qu'on pourrait croire qu'il est le seul à vivre ici.

Bien que l'on m'ait invitée je ressens cette désagréable impression de déranger. Lorsque je suis arrivée, tout le monde m'a accueillie à bras ouverts, cependant cette sensation ne me quitte pas. Je n'ai ouvert la bouche que pour stopper Steph qui allait me servir un verre de vin afin de lui demander à la place une boisson sans alcool. Trois personnes se trouvent à côté de moi, et pourtant je ne me suis jamais sentie aussi seule de toute ma vie.

— Alors Julie, tu as récupéré depuis hier soir ? me demande Steph avec un air taquin.

— Oui... Je ne sais pas ce qui m'a pris de boire autant, désolée.

— Ne t'en fais pas. Ça arrive à tout le monde de se prendre une bonne cuite ! J'en ai vu qui étaient bien plus amochés que toi d'ailleurs. Laurent, tu peux m'aider à amener les biscuits apéritifs ? demande-t-elle à son frère.

Alex se trouve en face de moi et me fixe intensément, sans sourciller. Je sais qu'il a compris que quelque chose s'est passé aujourd'hui. C'est flagrant. Malgré quelques sourires que je me force à faire, l'image de Julien et Agathe berçant un bébé ne quitte pas mes pensées. Je suis pathétique. Alex se penche en avant et pose ses coudes sur ses genoux. Son regard, toujours aussi perçant, laisse paraître une légère inquiétude qu'il tente de dissimuler.

— Tout va bien ?

Mes yeux se posent sur lui et je reste sans voix. Je ne peux pas lui dire. Si j'aborde le sujet, je vais m'effondrer à coup sûr et il est hors de question que cela se produise. Comprenant que je ne répondrai pas, il me relance :

— Julie ? Qu'est-ce qui se passe ?

— Rien, ça va. Tout va bien, je lui réponds avec un sourire forcé.

Comme pour me sauver, Steph et Laurent reviennent avant qu'Alex ne puisse renchérir. Leurs bras sont chargés de charcuteries, olives et biscuits en tout genre. J'essaie de détourner mon attention de lui en proposant mon aide pour disposer la nourriture sur la table basse. Après que tout ait été installé, Laurent attrape son téléphone, le branche à la sono, et lance une playlist de musique variées. Inconsciemment, je balaye rapidement la pièce du regard avec l'infime espoir de trouver une guitare, afin d'entendre à nouveau Alex chanter. Les conversations s'enchaînent et j'ai le sentiment de revivre notre première rencontre au bar à tapas. Finalement, après une dizaine de minutes, un léger silence s'installe et j'en profite :

— Ça fait longtemps que vous vivez ici, tous les deux ?

— Ça va faire trois ans que je vis ici, me répond Steph. Il y a un an, j'ai proposé à Laurent de venir vivre avec moi pour le dépanner, et visiblement, monsieur ne veut plus partir d'ici !

— Tu t'ennuierais sans moi.

— Je pourrais surtout récupérer mon lit sans toi.

— C'est toi qui dors sur le canapé ? je demande à Steph.

VinceWhere stories live. Discover now