Chapitre 30

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« L'amour est la seule réponse à la haine » Dilgo Khyentsé Rinpotché

Stressed out – Twenty one pilot

Les vestiges de la nuit passée me sautent aux yeux dès mon réveil. La couverture remontée jusqu'au cou, je reste allongée et n'essaie même pas de compter le nombre de canettes de bière qui sont posées devant moi.

Après qu'Alex soit parti, Steph et Jordan ont continué leur petit jeu et se sont endormis sur les bières. Ils étaient tellement en mode séduction qu'ils ne se sont même pas aperçus que j'avais le moral dans les chaussettes. Tant mieux, je n'avais aucune envie de leur raconter la raison. De toute façon, j'étais crevée. Aux alentours de deux heures du matin, Steph m'a demandé si cela me dérangeait que Jordan dorme ici car « tu sais, il n'y a plus de métros à cette heure-ci ». Qu'est-ce que j'aurais pu répondre ? Ce n'est pas chez moi finalement. Il est donc resté. Je n'ai pas besoin de faire un dessin de ce qu'ils ont fait cette nuit. Je le sais, ils sont partis dans la chambre de Laurent et j'ai entendu à plusieurs reprises des bruits qui ne trompent pas. En tout cas ils n'ont vraiment pas perdu de temps, et dans le lit de Laurent en plus. Berk.

En repensant à la soirée d'hier soir, je ne peux empêcher une boule dans mon ventre de se former. J'en suis sûre à présent : Alex, j'en suis amoureuse. Après le coup de poignard de Julien, je ne pensais pas que je ressentirais ça de nouveau et surtout si vite. Pourtant, ce que j'éprouve pour lui est si fort que je ne peux plus l'ignorer comme au début. Le problème est qu'il laisse tellement son passé diriger son présent qu'il me rejette complètement dès qu'il comprend ce qu'il se passe entre nous. C'est comme s'il était en prison. Une prison de haute sécurité où les barreaux des fenêtres sont tellement épais qu'il est impossible de s'en évader. Le pire je crois, c'est qu'il ne veut même pas en sortir.

Je saisis mon téléphone et, en dernier recours, envoie un message à Bastien :

Moi – Aujourd'hui à 8 h 10

Salut Bastien. Est-ce qu'on pourrait se voir aujourd'hui, pendant ma pause de cette après-midi par exemple ? J'ai besoin de te parler, c'est important.

En attendant sa réponse, je pars me préparer dans la salle de bain : je commence le travail dans moins d'une heure. Jordan a de la chance lui, il ne commence qu'à 14 h 30.

Après avoir terminé, je retourne dans le salon et attrape mon téléphone ainsi que mon sac à main. Pendant que je descends les escaliers, je reçois la réponse de Bastien :

Bastien – Aujourd'hui à 8 h 42

Je passe au bar vers 16 h.

****

Cela fait plus d'une quinzaine de minutes que Bastien devrait être là. Je regarde ma montre pour la vingtième fois. Enfin, je le vois pousser les portes du Diamant Noir.

— Salut Julie. Désolé d'être en retard, j'ai galéré à trouver une place pour me garer.

Malgré le nombre incroyable de transports en commun dans cette ville, Bastien s'obstine à prendre sa voiture, quitte à perdre du temps. Je secoue la tête.

— C'est rien, j'avais encore un peu de boulot de toute façon. Je te sers quelque chose ?

— Un café, merci.

Après avoir préparé la boisson chaude, je saisis la sous-tasse blanche dans ma main et nous partons nous installer sur une petite table, dans le fond du bar.

— Toujours chez Steph ? il me demande en cassant son morceau de sucre en deux.

— Oui. Je pense d'ailleurs que je vais chercher une coloc', je ne peux plus assumer seule mon loyer. De toute façon je ne veux plus y retourner.

Entre le cambriolage et Julien, ce serait peut-être bien de trouver autre chose.

— Tu m'étonnes. Bon, pourquoi tu voulais me voir ?

Euh... Par où commencer ? Je me mords les lèvres et regrette soudain ce message que je lui ai envoyé. Non mais pour qui je me prends ?

Bastien doit comprendre ce qu'il se passe dans ma tête, car il poursuit :

— Ne te fatigue pas, j'ai compris. C'est Alex c'est ça ?

— Euh, ouais... En fait, il est passé chez Steph il y a deux jours et il était complétement bourré. Ensuite il...

— Ensuite il t'a balancé plein de trucs qu'il ne pensait pas. Ouais, il m'a raconté.

— Ah, d'accord.

— Je ne sais pas ce que tu cherches, mais je ne te dirai rien à son sujet.

— Oui je sais, tu ne veux pas le trahir ou je ne sais quoi. Je respecte ça. Seulement, ton pote va mal. Tu en es conscient au moins ?

J'envie la loyauté qu'a Bastien pour son ami, mais elle commence sérieusement à me taper sur les nerfs. Ses yeux se plantent dans les miens et je comprends que je suis peut-être allée trop loin avec cette dernière phrase.

— Tu te prends pour qui au juste ? balance Bastien en fronçant les sourcils. Parce que tu as passé une nuit avec lui, tu penses que tu le connais mieux que moi ? Et ouais, je suis au courant pour ça aussi. Ne t'avise surtout pas de croire que je ne me soucie pas de lui.

Incrédule, mes yeux restent fixés sur Bastien et je prends conscience à quel point je suis ridicule ici, à faire la morale à Bastien qui le connait depuis des années.

— Je suis désolée, je ne voulais pas te blesser, je dis embarrassée. C'est juste que j'aimerais l'aider.

— Oui, ça j'ai compris. Mais tu sais, tu es bien loin d'être la première. Tu as vu la gueule qu'il a ? Crois-moi, des nanas comme toi, j'en ai vues à la pelle. Et puis, des tas de gens ont voulu l'aider aussi par le passé. Des filles, des médecins, des psy... Ils ont tous abandonnés tellement Alex était horrible avec eux.

— Peut-être, mais c'est différent cette fois-ci.

— Ah oui ? En quoi ça pourrait être différent ? J'espère que tu ne penses pas ça parce qu'il t'a laissée voir ses brûlures. Car encore une fois, tu es loin d'être la première.

Cette conversation ne mènera à rien. Autant arrêter là. Je pousse la chaise de mes jambes et attrape sa tasse de café. Je commence à partir en direction du comptoir et la voix de Bastien dans mon dos me force à m'arrêter :

— Tu l'aimes ?

Il est sérieux ?

Je ne me retourne pas. Cette question est bien trop personnelle.

— Julie, est ce que tu l'aimes ?

Pourquoi mes jambes n'avancent pas ?

Oui Bastien, je l'aime. Je l'aime à en avoir mal car je suis incapable de l'aider. Car la seule personne, c'est-à-dire toi, refuse de répondre à mes questions.

— Si tu veux que je t'aide, il faut que tu sois honnête avec moi.

Je tourne la tête vers lui :

— Qu'est-ce que ça change que je l'aime ou non ? Ça ne te regarde pas !

— Oh si, ça change tout. J'imagine que tu dois savoir pour l'incendie. Eh bien ça, ce n'est que la partie visible de l'iceberg. Et cet iceberg, crois-moi, tu n'en as jamais vu de si gros de toute ta vie.

Je n'arrive pas à savoir si Bastien s'est finalement décidé à m'aider. Il se lève et s'approche de moi.

— Jelui ai fait une promesse et je ne la briserai pas. Ça ne veut pas dire que jene veux pas qu'il aille mieux. Alors s'il faut que je t'en dise plus, je doisêtre sûr de moi. Alors je te repose une dernière fois ma question : est-ceque tu l'aimes ?


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VinceWhere stories live. Discover now