Chapitre 36

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" La mort est notre lot à tous ; sans la mort, la vie serait incomplète"Oscar Wilde

Riverside – Agnes Obel

Durant le trajet, l'inquiétude n'a fait que grimper en moi jusqu'à atteindre son apogée lorsque je me retrouve dans ce long couloir à l'atmosphère aseptisée. Plus j'avance, plus l'odeur âcre des hôpitaux me donne la nausée et je n'ai qu'une hâte : entendre Laurent me rassurant sur l'état de santé de mon amie. Je finis par atterrir dans une pièce assez grande pour accueillir plusieurs chaises en fer, toutes alignées le long du mur. À peine entrée, j'entends de petits sanglots sur ma droite. Je tourne la tête et découvre Laurent, en pleurs, dans les bras de Camille. Je reste bloquée sur eux. Immédiatement, mon estomac se noue et mon cœur s'emballe, un peu trop. À présent, l'inquiétude a laissé place à une grande panique mêlée à de l'angoisse qui m'assaille en pleine face. Mes yeux ne bougent plus et j'attends là qu'ils s'aperçoivent de ma présence.

— Julie est arrivée, murmure Camille.

Laurent relève son visage vers moi. Ses yeux gonflés et imbibés de sang me donnent l'effet d'un coup de poignard en plein ventre. Bon sang, mais qu'est-ce qui se passe ?!

— C'est si grave que ça ? j'arrive à dire d'une voix cassée.

— Viens, suis-moi.

Camille se lève et saisit calmement mon bras. Je jette un dernier coup d'œil à Laurent qui ne bouge pas de sa chaise avant de me laisser entraîner de nouveau dans le couloir, les mains tremblantes.

— Écoute... C'est très grave. Elle a été transportée en urgence au bloc opératoire.

— Quoi ?! Mais qu'est-ce qui s'est passé ?

— Une voiture a grillé un feu rouge. Elle a embouti le taxi de Steph... Je fais bonne figure devant Laurent, mais je ne pense pas...

Le chagrin submerge Camille qui ne peut continuer sa phrase. Moi, j'ai du mal à réaliser la gravité de la situation. Il doit se tromper. C'est impossible que Steph soit en chirurgie ! Non, je n'y crois pas. Impossible.

— Attends. Je ne comprends rien là. Pourquoi elle est en chirurgie ? Elle est blessée ?

Camille lève de grands yeux vers moi. Il gonfle ses poumons et le regard qu'il porte sur moi me met mal à l'aise, comme s'il était étonné que je ne comprenne pas. En même temps, c'est impossible à croire.

— La voiture a percuté le taxi de son côté Julie. Elle risque de mourir.

Mes yeux s'écarquillent et l'air me manque soudain. Ma vue se brouille et je m'empresse de m'adosser au mur, au risque de m'effondrer sur le sol. Ma gorge se noue sous l'effet du chagrin et ma main frotte mon front tandis que l'autre est braquée sur ma bouche. Mourir, Steph ?! Non, non, non, non. Je laisse échapper un énorme sanglot, celui que je refoule depuis mon entrée dans l'hôpital. Soudain, j'entends des bruits de pas sur ma gauche et je m'essuie rapidement le visage. Les pas se rapprochent mais je garde les yeux rivés sur une petite chaise en fer placée devant moi. Nerveusement, je place mon pouce dans ma bouche et commence à me ronger l'ongle. Si je croise un regard familier, j'ai bien peur que les larmes reprennent de plus belle.

— Julie ! Oh Julie !

Je respire à pleins poumons et adresse un timide regard à Bastien.

— Dis-moi qu'il se trompe. Dis-moi que j'ai mal compris, je t'en prie...

Ma respiration est bien trop forte. Je tente de me calmer, mais tout ce que j'arrive à faire c'est de me mordre la bouche pour empêcher les larmes de revenir une nouvelle fois. Mon absence de réponse suffit à Bastien pour comprendre et il tourne rapidement la tête. Ses doigts viennent pincer son nez puis je vois ses yeux devenir un peu trop brillants. Il me tourne le dos et je l'entends essayer de respirer calmement tout en plaçant ses mains sur sa nuque. Après quelques minutes où aucun de nous n'ouvre la bouche, il se retourne vers moi :

VinceWhere stories live. Discover now