Chapitre 21

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Quand je rentrais enfin chez moi, je restais bloquée devant la porte. Bien sûr mes clés étaient soigneusement rangées dans mon sac. Sac que je n'avais pas sur moi. Je pestais une énième fois contre Djiah. Je dénichais un double de mes clés, collé sous notre boîte aux lettres. C'était une idée d'Emeline. D'après elle, tout le monde connaissait la technique de la clé sous le paillasson mais pas celle de la boite de aux lettres.

Emeline n'était pas à l'appartement quand j'arrivais et je ne pensais pas la revoir de la soirée. Elle avait laisser un petit mot sur le frigo : « ne m'attends pas » avait-elle gribouiller de son écriture de collégienne. Soit elle était sortie avec des amis, soit elle faisait la fermeture du restaurant. En général, je ne m'en faisais pas trop pour elle. Je la savais prudente et très bien entouré. Emeline était pour moi ce qui se rapprochait le plus d'une sœur même si j'avais parfois du mal à l'admettre. Quand j'avais répondu à une annonce concernant une collocation pas loin de mon nouveau travail, je ne m'étais absolument pas attendue à tomber sur quelqu'un d'aussi pétillant. A l'époque, je venais à peine de quitter la meute et n'ayant plus de famille, hormis une mère qui avait sombré dans la folie, Emeline avait été le signe d'un nouveau départ pour moi. Il est vrai qu'au début, j'ai eu beaucoup de mal avec elle. Pour moi, les liens amicaux ou amoureux n'avaient pas leurs places dans ma vie car ils finissaient toujours par disparaître. D'une manière ou d'une autre. De plus, en ce temps là, mon esprit était beaucoup trop torturé par mon passé pour y faire abstraction. Je ne pouvais et ne peux toujours pas me permettre de nouer des liens avec les autres. Pourtant, Emeline fait à présent partie intégrante de ma vie et même si je ne lui montre pas assez, la perdre serait terrible pour moi.

J'abandonnais mes clés dans l'entrée et partis me coucher. Mon crâne me faisait encore souffrir et j'avais l'impression d'étouffer dans ma chambre. J'eu à peine la force d'ouvrir la fenêtre et de me débarrasser de mes chaussures que je m'étendis sur mon lit, prête à m'endormir. Mes muscles étaient engourdis aussi bien que mon corps était lourd. Bon sang, je n'avais pu récupérer ni ma veste, ni mon mini-GAP. Pareil pour ma voiture et mon sac, qui étaient resté dans cette ruelle. Il me restait pourtant un Beretta dans mon tiroir, plus quelque autres poignards, dont un sous mon oreiller, mais mon mini-GAP était tout comme mon arme fétiche. Je n'avais plus qu'à espérer que Dizzy en ait un modèle dans son armurerie. Quoi qu'il en soit, j'étais beaucoup trop épuisée pour y réfléchir.

— Et bien Maïlyn, vous sentez-vous mieux ?

Je pointais mon poignard vers l'intrus bien avant que mon hurlement ne résonne dans la pièce. Assis sur le rebord de ma fenêtre, jambes croisées, Welgan me toisait de son air éternellement moqueur. Je savais que j'aurais dû fermer les volets. Il était pareil à un ange gardien avec ses ailes immenses qui tombaient négligemment derrière lui. Il était magnifique. « Dangereux et beau comme un dieu », Nate avait raison. Il désigna du menton mon arme que je baissais lentement.

— Toujours cet accueil aussi peu chaleureux ?

— Welgan, vos visites nocturnes commencent à m'inquiéter. De plus, je ne réserve les meilleurs accueils qu'à ceux qui passent par la porte.

— Vous ne connaissez pas Roméo et Juliette ? Roméo rendait souvent visite à Juliette la nuit à sa fenêtre.

— A la différence que Roméo avait la courtoisie de rester en bas, et puis ils sont tous les deux morts à la fin, il y a mieux comme histoire d'amour, raillais-je.

Welgan descendit de son perchoir et vint s'asseoir sur le bord de mon lit. Pour ça, il devait ramener ses ailes sur le côté pour qu'elles ne tombent pas sur les couvertures. Je m'enfonçais un peu plus dans les coussins.

— Shakespeare était d'un tel mélodrame, reprit l'Archange, mais bon j'imagine que c'est pour ça qu'il a marqué l'histoire du théâtre.

— Vous en parlez comme si vous le connaissiez.

Les Loups de Portland { TERMINER }Where stories live. Discover now