Chapitre 18

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Point de vue de Jayden Fields
Domicile de Thomas Omos
13 Octobre, 9h00

— Me revoilà, Fields. Je t'ai manqué ?

Ses grands pas dans l'escalier avaient réveillé mon esprit paralysé. Le silence avait régné toute la nuit ici. Entendre sa voix résonner entre ces quatre murs me rendait irritable. Mon chef laissa passer quelques secondes pendant lesquelles il n'eut pas de réponse. Il inspira fortement avant de se souvenir qu'il m'avait empêché de parler.

Trois petits pas vers moi pour ôter le foulard, et toujours aucune réponse de ma part. Je fixais le plafond en silence. Je gémissais et fulminais intérieurement. Pas devant lui, Jay. Ne lui fais pas le plaisir de lui montrer que tu es terrifié.

— OK... J'imagine que tu me remercieras plus tard de t'avoir offert un chien, déblatéra-t-il en poussant un long soupir. Je ne suis pas fâché que tu veuilles garder le silence. On va sûrement passer un petit moment ensemble, tu auras tout le temps de me parler.

— Une heure, trois jours, quatre mois avec vous, peu importe. Je n'ai rien à vous dire.

— Ah tu vois ! Tu commences déjà. Tu parles là.

Son air malsain ne prenait jamais de repos. Il ne loupait aucune occasion de l'afficher fièrement.

— Vraiment ? reprit-il en haussant un sourcil. Ce ne sont pas les sujets de conversations qui manquent pourtant. Allons... notre passion commune pour les Beatles ? Comment je t'ai trouvé un chien ? Facile celle-là, je connais quelqu'un qui bosse dans un refuge. Quelqu'un qui me devait un service à n'importe quelle heure. J'ai craqué pour ce berger suisse. Un chiot qui attendait une famille. Et tu sais quoi, Fields ? J'espère qu'il prend bien plaisir à saccager ton domicile, s'exclama-t-il, une once de rancœur dans la voix. Bon, alors quoi d'autre ? Ah oui, on pourrait aussi parler de ta manie de vouloir te mêler de ce qui ne te regarde pas, ou comment te retrouver enfermé dans le sous-sol de ton supérieur.

Toujours rien à lui dire, mais des tentatives ratées de briser la corde qui me retenait à la table. Mon chef profitait du spectacle. Je m'étranglais tout seul, et contractais la mâchoire à chaque nouvel échec.

— Vas-y continue, avec un peu de chance, tu finiras par te tuer et je ne t'aurai fourni que le moyen de le faire. Bon, dans tout ça, je suis passé au commissariat déposer les cadeaux d'anniversaire de Lucas, annonça-il comme si cela m'intéressait. Dis-moi, c'est toi qui as fait tous ces dessins ? J'ai trouvé ce classeur sur la table de ton salon et je n'ai pas pu m'empêcher de regarder. J'ai été fasciné par tous ces portraits, voilà pourquoi j'ai pris le classeur.

Il avait beau prôner l'organisation, sa pensée était désordonnée. Il passait du commissariat à mon domicile sans lien logique et me laissait reconstituer les événements. Pour être certain que je l'écoute, il vint poser le classeur sur mon bras, s'évertuant à tourner les pages et à admirer chacun des dessins. Personne ne l'avait autorisé à fouiller mon domicile, mais c'était bien connu, Thomas Omos surpassait les lois et j'aurais aimé qu'il entende mes pensées pleines d'ironie.

— Ils sont magnifiques tous ces portraits ! Il y en a même un de Lucas ! s'exclama-t-il les yeux brillants. J'ai vu que tu avais gagné le concours le mois dernier grâce à ce dessin. Pas étonnant, avec un modèle comme lui, et un peu de talent, on gagne tout ce qu'on veut.

Je ne parlais pas, mais si cela avait été le cas, il ne m'aurait pas entendu parce que mon chef était en parfaite fusion avec la bêtise. Il avait enlevé le portrait de Lucas de la pochette pour me le voler.

— On va dire que c'est le cadeau que tu me fais pour avoir osé saccager mon bureau.

— Lucas n'est pas Ryan, chef. Et il va falloir que vous en preniez conscience.

Oh My Worst Nightmare ☆ TOME 2 : L'homme aux deux visagesWhere stories live. Discover now