Ce qu'on n'aurait pas dû savoir. Troisième partie - Xilena

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— Je ne suis pas chiante ! s'indigna Amy. Matthew m'avait invitée à aller au bal avec lui et j'ai dit non !

Je ne savais plus quoi répondre. Matthew, c'était le mec le plus canon de l'école, avec des yeux si bleus et juste assez de muscles... Même moi qui ne suis pas branchée drama d'ado, j'avoue avoir un jour fait un rêve érotique avec lui. Une ou deux fois. Ou trois.

Même Théo s'était arrêté de rire pour la dévisager d'incompréhension.

— Tu as dit non ? répétai-je. Pourquoi ?

Amy soupira longuement en baissant la tête. Elle avait enfin perdu ses airs supérieurs.

— J'aurai ressemblé quoi ? dit-elle platement. À danser avec lui... et m'effondrer au milieu de la piste, devant tout le monde, à cause de mes jambes qui refusent de m'obéir ?

— Il n'y a plus de risque, dit Peter. Il te suffit de faire un vœu et tu pourras danser avec lui.

— C'est trop tard, maintenant. Il a trouvé quelqu'un d'autre. (Elle baissa la tête vers son corps en faisant la moue.) Quelqu'un de mieux foutu que moi.

Théo voulut dire quelque chose, mais il ne fit que jouer des mâchoires en écarquillant les yeux. Il venait enfin de se rendre compte que Peter l'avait rendu muet. Il se tourna vers lui pour lui lancer un regard noir et Peter fit semblant de ne rien remarquer, perdu dans la contemplation de ses ongles.

— Bref ! fit Amy en relevant la tête pour nous montrer un grand sourire. Voilà pourquoi je m'en fiche qu'on m'observe.

Théo essaya encore de parler, sans plus de résultat. Aux mouvements de ses lèvres, je devinais qu'il hurlait « PÉTEUR ! » alors que Peter l'ignorait complètement.

— J'irais pas au bal, continua Amy sans rien remarquer. Le jour venu, je ferais comme si j'étais atrocement malade.

— Tu trouveras surement quelqu'un d'ici là, dis-je dans un petit haussement d'épaules. T'as encore... quoi ? Deux semaines ? Et sinon, y'a aucun mal à y aller seule.

Amy haussa les épaules à son tour, un « peut-être » qui voulait dire non. Je n'insistai pas ; ce n'était même pas le sujet, à la base. Amy la populaire réussissait toujours à ramener les conversations sur sa personne, va savoir comment elle avait fait.

— Et sinon, le fait que nous sommes observés ? On peut en reparler ?

— Moi, ça me fait ni chaud ni froid, commenta Peter. Branda avait raison ; c'est comme n'importe où ailleurs. Tout ce qu'on a appris, c'est que nous ne sommes pas seuls au monde. Dans un sens, c'est plutôt réconfortant.

Amy leva un bras dans sa direction, comme pour souligner ce qui avait été dit. Je soupirai et tournai sur moi-même, à la recherche d'un endroit où m'assoir, mais toutes les places étaient déjà prises. Tout ce qui restait était sur le canapé, entre Amy et Théo, et je n'avais pas trop envie de me mettre à côté de lui quand il avait cet air au visage. Je m'installai au sol, adossé au fauteuil de Peter, et sortie mon téléphone pour voir l'heure ; ça faisait à peine une demi-heure que nous étions ici. Tant qu'à sécher un cours, aussi bien le sécher en entier.

— Qu'est-ce qu'on fait, alors ?

— Dans quel genre ? demanda Peter en se penchant pour me regarder de face.

— On reste là à ruminer, ou on fait quelque chose ? Quelqu'un aurait des vœux intéressants à faire ?

Théo laissa tomber son poing sur la table de chevet, puis se pointa la bouche avec cet air intimidant dans les yeux. Il voulait visiblement dire : « que quelqu'un souhaite que je puisse parler ! »

— Ignorez-le ! fit Peter d'un ton détaché.

— Il va se venger si tu ne lui rends pas la parole au plus vite, dit Amy.

Théo hocha la tête. Venant de lui, ce n'étaient pas des menaces à prendre à la légère.

— Oh, d'accord ! soupira Peter platement. Je souhaite que tu puisses parler, Théo.

Il en profita aussitôt pour lâcher toute sorte d'injures bien colorées, de quoi faire rougir Lord Voldemort. Peter se mordit la lèvre inférieure et baissa les yeux sur ses genoux.

— Ça va, t'en as assez dit ! m'exclamai-je après une minute entière. Bon sang, Théo, va te faire soigner.

— C'est ce que je fais, dit Théo en soupirant, comme s'il était soulagé d'un grand poids. Ça m'a fait du bien.

— Parle pour toi, dis-je en faisant la grimace.

Théo balança la main en l'air, comme pour effacer le moment. Il soupira à nouveau, un peu plus longuement, avant de revenir aux choses sérieuses.

— Tant mieux pour vous si ça ne vous inquiète pas plus que ça, qu'on soit observé dans un monde où habitent des djinns, et... des trolls et des fées, même. Je suis sure que c'est ce que j'ai vu, parmi la foule. C'est peut-être parce que je suis pas un littéraire et que je suis pas tellement fan de films, mais moi, ça m'a fait un sacré choc. J'ai pas trop envie de laisser couler sans rien faire ; je veux en savoir plus.

— Et comment comptes-tu t'y prendre ? demandai-je.

Théo baissa les yeux vers moi, qui étais toujours assise sur le sol. Son visage était sérieux, mais pas vraiment menaçant, ce qui était nouveau venant de lui.

— Je veux lire le livre.

Le monde d'à côtéWhere stories live. Discover now