Chapitre 32

290 68 12
                                    

Beahan se réveilla en fin de matinée. Il avait l'air fripé et groggy, totalement perdu. C'était assez drôle à voir. Il se redressa, bâilla à s'en décrocher la mâchoire, les bras tendus vers le plafond. Il devait s'être bien reposé au vu de l'éclat alerte dans son regard. Malheureusement, le chagrin reprit ses droits et ses épaules s'affaissèrent. Il appuya ses coudes sur ses genoux et se prit la tête dans les mains.

Il soupira et se leva. Il se traîna vers la cuisine. Je le suivis. Je me sentais inutile. Je ne pouvais que le regarder se débattre avec sa peine. Il devait s'en sortir seul, je le savais, je n'étais là pour lui rappeler qu'il avait du soutien, qu'il était protégé et chéri. Ces souffrances faisaient partie de l'expérience humaine. C'était ce qui séparait les mortels des anges et des démons. Les deux ne ressentaient rien. Les premiers cherchaient à effacer ce que les seconds créaient, rien plus, rien de moins. Ils ne compatissaient pas, ne ressentaient aucune forme d'empathie.

Je ne pus que songer à ce que m'avait appris Meriel quelques heures plus tôt. Je n'avais pas cessé de retourner les informations dans ma tête, les analysant sous tous les angles, tentant de définir ce que ça impliquait pour moi et mon protégé.

Que je le veuille ou non, mon seul allié se retrouvait être Meriel. Le plus imbuvable des anges gardiens. Je ne lui faisais pas confiance mais si ce qu'il m'avait dit était vrai... J'avais besoin de son aide. Il était mon seul lien avec les Cieux. Je ne pouvais pas contacter Ariel sans que ça soit remarqué. N'importe qui pouvait être le traître.

Sa théorie clamant que Baskiel était le traître me paraissait tirée par les cheveux. D'accord, il avait des arguments qui, sous certains angles, pouvaient être convaincants. Au demeurant, je continuais à croire que Baskiel était incapable de faire ce dont il l'accusait.

Nous tressaillîmes tous les deux lorsque l'on frappa à la porte. Je suis Beahan jusqu'à l'entrée. Derrière le battant, les jumeaux, Glenn et James. De lourdes cernes soulignaient leurs yeux. Beahan les laissa entrer et ils gagnèrent le salon d'eux-mêmes.

- Tu as des nouvelles de la police ? questionna James.

- Aucune. Blueminster ne m'a pas contacté depuis...

Il s'arrêta. La grimace sur le visage pâle de Glenn confirma que les frères savaient de quel jour il parlait.

- J'ai l'impression que ça s'est passé il y a des semaines tellement les heures sont longues mais ça n'est que le second jour, chuchota Glenn. Je n'arrive pas à effacer ce qu'il s'est passé de mon esprit. J'en cauchemarde toutes les nuits.

- Moi aussi, admit Beahan.

- C'est de ta faute, cracha James. Si tu ne t'étais pas mêlé de cette affaire, rien de tout cela ne serait arrivé ! Ava ne serait pas à l'hôpital ! Ni Lizzie ni Alvin ne seraient morts ! Elsie n'aurait pas été possédée !

- James... tenta son frère.

- Parce que tu crois que je savais que ça allait arriver ?! s'écria mon protégé. Tu crois que c'est que je voulais ?! Tout ce que je voulais, c'était résoudre cette affaire pour que des gens arrêtent de mourir ! Comment aurais-je pu savoir que les démons existaient ?! Qu'ils me prendraient pour cible ?! Si je l'avais pu, j'aurais évité tout ça !

Sa poitrine se soulevait violemment, son souffle était court et brusque. Je ne cherchai pas à le calmer. Il avait toutes les raisons de se mettre en colère. De la même manière que l'attitude de James s'expliquait même si elle me faisait grincer des dents. J'étais forcé de voir tous les points de vue des personnes impliquées pour faire mes choix. En l'instant, c'était atrocement difficile. Je détestais voir mon protégé dans un tel état. Je pouvais sentir combien les mots de son ami le heurtaient. Et je ne pouvais rien y faire.

A Season In HellOù les histoires vivent. Découvrez maintenant