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Hermione était allongée au sol, dans la grande salle, quand des cris aigus retentirent. Elle ne bougeait plus, ne parlait plus, respirait à peine ; comme mourante. Sur elle, du sang. Beaucoup de sang. Simplement, ce n'était pas le sien. À quelques centimètres d'elle, Ron Weasley était étendu, le corps inerte et ensanglanté. Hermione, la tête posée sur sa jambe, ferma les yeux, comme bercée par les sanglots de Ginny et Harry qui étaient tombés à ses côtés.

- Hermione, réveille-toi.

Quelqu'un la secouait. Quand elle ouvrit enfin les yeux, elle aperçut Ginny le regard inquiet penchée au-dessus d'elle.

- Tout va bien ?

Transpirante, la brune se redressa doucement dans son lit, encore étourdie de son cauchemar. Elle passa la main dans ses cheveux mouillés.

- Oui oui, merci.

- Tu es sûre ? Tu as crié Hermione. De quoi rêvais-tu ?

Hermione hésita un instant avant de se confier :

- Ron.

Une parole brève qui rendit la pièce froide. Les deux filles se regardèrent, le regard désolé. Ginny soupira et s'assit.

- Je sais que tu tenais beaucoup à lui Hermione... Mais il faut le laisser partir.

Hermione sourit nerveusement :

- Facile à dire.

- Je sais... Tu sais moi aussi je pense à lui des fois. J'ai perdu deux frères dans cette guerre, deux grands frères... C'est dur, mais c'est la vie. Il faut accepter ce qu'il se passe et continuer.

- J'aurais pu l'aider.

Ginny secoua la tête :

- Tu ne pouvais rien faire Hermione, sors-toi ça de la tête ! Il était déjà mort avant que tu le retrouves et tentes de l'aider. Ce n'est pas de ta faute.

Les larmes se mirent à couler sur les joues de la brune qui reniflait doucement, veillant à ne pas réveiller tout le dortoir. La rousse, assise à ses côtés, la prit dans ses bras. Elle avait tant de morts sur la conscience.

- Moi aussi il me manque, atrocement, chaque jour un peu plus. Mais il a besoin qu'on le laisse partir. Il sera fier de nous tu verras.

- Je ne m'en sors pas. Venir ici, c'était sûrement une mauvaise idée.

- Et arrêter les cours ? Toi ? Tu te moques de moi ! S'exclama Ginny en souriant. Tu es à ta place ici Hermione ! Ta présence dans ce château compte beaucoup plus que tu ne le penses.

Hermione rit tout doucement. Ginny avait raison, elle n'aurait pas pu ne pas finir son année. Mais en venant ici, elle ne se doutait pas que de revoir les lieux la ferait autant souffrir. Elle soupira, tordant le drap rouge dans ses doigts pâles et fins. La rousse essuya ses larmes d'un geste tendre, lui frottant le dos pour la rassurer.

- Fais en sorte qu'il soit fier de toi là où il est.

Elle répondit d'un bref geste de tête.

- Je vais me passer de l'eau sur le visage.

- Je suis ici, répondit Ginny consciente que sa meilleure amie avait besoin d'être seule.

Hermione se leva, vêtue d'un pull de Gryffondor et son pyjama, et quitta le dortoir. Elle passa dans la salle commune avant de continuer à descendre en direction des toilettes. Là, elle se rinça le visage. Son visage semblait moins tendu que la dernière fois, sûrement était-elle plus reposée. Ses cheveux attachés en une longue queue de cheval descendaient le long de son cou pâle où les vertèbres commençaient à disparaître. Elle commençait légèrement à se sentir mieux, bien que la dépression ne la quittât pas vraiment. Elle frotta ses yeux, encore endormis. La pièce était silencieuse et froide ; seule, elle se mit à frissonner.

Allez Hermione, ça ira mieux.

Elle était calme. Quand soudain, des bruits retentirent derrière elle. Elle se retourna : personne. Des sanglots qui semblaient lointain résonnaient dans le couloir. Elle s'approcha. Son cœur battait à chamade. Quelqu'un était assis dans l'encadrement de la fenêtre : la silhouette recroquevillée sur elle-même émettait des sanglots sourds. Elle s'avança doucement vers la personne, plissant les yeux pour tenter de mieux voir. Elle comprit rapidement qui était cette personne. Drago, assit sur le rebord, pleurait. Drago Malefoy pleurait. Hermione se stoppa net, séchant ses larmes. Elle s'assit en face de lui. Il releva la tête, surpris mais froid :

- Que fais-tu ici ? Demanda-t-il en tentant de cacher ses larmes.

- Je pourrais te poser la même question, répondit-elle sur la même intonation.

Il soupira. Hermione appuya sa tête contre la vitre froide, fixant le paysage. Des gouttes glissaient le long des carreaux peints. Le vent venait frapper les carreaux, faisant voler des feuilles sur son passage. Il faisait frais, humide. Elle ignorait si cette ambiance venait d'eux, ou de là où ils se trouvaient.

- Il faut croire que le monde pleure pour nous, dit-elle tout bas.

Drago ne répondit pas et se contenta de la regarder. Hermione se montrait agréable ; peut-être était-ce la situation, ou son état. Elle pleurait, Drago le voyait à ses yeux gonflés et à ses lèvres gercées. Elle tremblotait.

- Je peux te poser une question ? Demanda-t-elle hésitante.

Il posa son regard dans le sien, attendant la question. Cela l'étonnait, qu'elle lui adresse la parole. Du moins, sans s'énerver.

- Ça fait quoi de mourir ?

Il se raidit. Son visage se décomposa peu à peu. Hermione grimaça :

- Pardon je n'aurai pas du... Dit-elle en secouant la tête.

Un long silence s'installa alors qu'elle fixait de nouveau le paysage. La pluie ruisselait entre les branches, feuilles et brindilles, les emportant parfois sur son passage. Un nouveau coup de vent traversa le château. Hermione se recroquevilla un peu plus.

- Je ne me souviens plus de ma mort.

Elle releva les yeux, surprise. Puis son cœur se serra ; Hermione l'avait vu mourir. Lucius Malefoy avait abattu son fils alors qu'il avait tenté de fuir la guerre. Elle l'avait retrouvé mort alors que son père disparaissait. Elle était le seul témoin. Son cœur se fendit.

- Tu ne te souviens de rien ? S'étonna-t-elle.

Il fit non de la tête :

- Mes souvenirs sont flous... Mais ce n'est pas douloureux, si-là était ta question.

Elle ne répondit pas, trop occupée à se remémorer la scène. Drago, étendu au sol, le corps froid. Elle avait tenté de le secourir, mais en vain. Elle avait tenté de secourir son ennemi. Elle le regarda, plongeant son regard douloureux dans celui brisé du blond. Il fronça les sourcils :

- Ils n'ont pas souffert, dit-il. Si c'est ce qui te préoccupe.

Elle se détendit. Il soupira.

- Tu vas mieux ?

Elle le regarda surprise. Venait-il de lui demander de ses nouvelles ? Il rigola nerveusement :

- Fais pas cette tête.

Elle sourit gênée :

- Tu poses une question à laquelle tu as déjà la réponse.

- C'est vrai.

Elle baissa la tête. Le silence regagna le couloir endormi :

- Tu ferais mieux d'aller dormir, dit-il.

Elle n'eut pas le temps de répondre qu'il disparut. Des bruits de pas retentirent ; Ginny apparut au fond du couloir, l'air inquiète. Hermione lui sourit.

- Je ne te voyais pas arriver, je me suis inquiétée.

- Je prenais juste un peu l'air, dit-elle en se relevant.

Puis, elles repartirent. Elle se retourna ; Drago lui sourit. Un sourire qui tendait plus vers la grimace. Touchée du geste, elle sourit à son tour. Ils se fixèrent un instant, puis tous deux disparurent dans l'ombre de la nuit. 

Pardonne-moi, Granger ⎮ DramioneWhere stories live. Discover now