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Marjory claque ses doigts devant mon nez, et je sursaute. Doué comme je suis, je tombe de ma chaise et m'écrase au sol, dans un vacarme impressionnant, attirant vers moi la quarantaine de paires d'yeux des étudiants et de notre chargé de TD. Fou rire général, Marjo porte la main contre son visage en soupirant.

– Excusez-moi, c'était un accident, m'empressé-je de dire au professeur, qui me regarde d'un air blasé.

– Vous me rendrez votre préparation à la fin de l'heure, Monsieur...

– Albert, précisé-je,

– Albert au cul par terre alors. Rasseyez-vous convenablement.

Il continue son cours tandis que je me remets en place sous les regards moqueurs des autres. Étrangement, j'ai appris à m'en défaire.

Marjory, à côté, est toute rouge et tente de camoufler ses moments de rires qui lui parviennent parfois.

– Albert au cul par terre. Admirons la poésie du professeur, se moque-t-elle doucement.

– Ça fait nom de chevalier qui foire tout dans sa vie aussi, ajouté-je.

– La demoiselle à côté d'Albert ! Je voudrais votre préparation aussi.



Après le cours, on se rejoint à un petit bistrot, où nous attendent déjà May et Camille. L'une m'adresse un regard peiné et l'autre un regard noir, où pourtant réside un soupçon d'ambiguïté.

Camille ne m'en veut pas autant qu'elle le laisse paraître. Je l'ai déçue, mais je vois à ses manies maladroites quand je suis là ou à son visage qui s'empourpre qu'elle continue à être désespérément amoureuse de moi.

May quant à elle, m'a envoyé deux longs sms d'excuse et laissé six messages sur ma boîte vocale. Elle m'a aussi offert quatre cafés au distributeur depuis l'incident du repas chez les parents de Marjo, sans oublier qu'elle m'a prise une fois à part pour m'expliquer ô combien elle était désolée de son comportement contre moi.

Forcément, que je lui en ai voulu. M'accuser sans me connaître, qui de plus est d'être un homme violent, cela m'horripile complètement, si on ajoute le fait qu'elle a voulu mêler mon passé avec Elsa parmi ses fausses accusations.

Peut-être que j'aurais dû avertir les deux nouvelles amies de cette partie de ma vie, cela aurait évité qu'elles s'y intéressent par curiosité ou commettent des gaffes.

Mais je n'en ai jamais eu le courage. Je protège notre secret avec Elsa au fin fond de ma mémoire. C'est comme mon jardin secret que je ne voudrais dévoiler à personne.

Bon en conclusion, disons que j'ai en partie pardonné May. Le seul problème, c'est qu'elle et Marjo me fixent souvent avec cet air compatissant. Je sais que mon histoire laisse difficilement les gens indifférents, mais disons que la pitié n'est pas ce qui aide le plus pour se reconstruire.

Par contre, Camille est en dehors de tout ça, mes deux amies bavardes ont su garder leur silence pour une fois.


Wei nous rejoint tout sourire et s'installe à côté de moi.

– Toujours en retard Wei ! Tu ne peux pas être à l'heure comme tout le monde ? J'ai passé ta commande, tu n'auras pas le choix, tu mangeras même si ça ne te plait pas, rouspète la jeune asiatique à son frère.

– Désolé, mon cours s'est terminé avec du retard. Mais bon, cela est exceptionnel. Rappelle-moi qui est la fille qui met trois millions d'années à s'habiller et arrive en retard chaque jour ? riposte fièrement Wei.

Elle ne trouve rien à redire et fait la moue. Je souris. C'est bien May. L'art de se chicaner avec son frère. Elle ne lui en veut pas en plus, je sais qu'elle a commandé au serveur le plat préféré de Wei.






La théorie des montagnes russes - Tome 2.Where stories live. Discover now