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— Rosalie ! s'exclame Ayden en tentant de me rattraper.

Trop tard, je suis face à lui. Mon père. L'air stupéfait, il m'observe de la tête aux pieds. Un frisson me parcourt l'échine pendant que la rancune s'empare de moi. Je croise les bras et attends qu'il parle le premier.

— Tu es ma fille ? s'enquiert-il, concerné.

Je suis tellement en colère contre lui. Il a sa maison, ses enfants, tout a l'air d'être bien rangé dans sa vie. À cause de lui, j'ai peiné à garder le cap pendant des années. Mon existence a été aussi catastrophique par sa faute. S'il n'était pas parti dès le départ, je n'en serais pas là.

Si je suis parvenue à rester à la surface, c'est grâce à ces personnes que j'ai rencontrées et qui m'ont aidée. Je ne lui dois rien.

Mes poings se serrent et mes ongles rentrent dans ma peau. Ayden colle mon dos contre son torse et emprisonne mes paumes dans ses mains, sentant mon aigreur. Je me détends légèrement et entremêle mes doigts aux siens.

Un silence de plomb s'abat dans la salle. Cinq paires d'yeux sont dardées sur Daniel qui ne sait plus où se mettre. Je crois qu'il a très bien deviné ce que je pensais de lui.

— Ça va ? me chuchote Ayden.

Taciturne, j'acquiesce.

— Avez-vous quelque chose à me dire ou bien pouvons-nous partir ? m'informé-je sèchement.

Volontairement, j'emploie le vouvoiement pour montrer la distance entre nous. Il semble troublé, même s'il tente de le cacher.

— Je suis ravi de faire ta connaissance, même si ce n'est pas réciproque, affirme-t-il, baissant furtivement les yeux.

Il regarde ses pieds, mal à l'aise. Daniel n'est pas très grand. Ses cheveux sont parsemés de blanc et de gris. Lorsque j'ai pu voir ses prunelles, elles étaient marrons, singulières. Si je lui ressemble ? Je n'en ai aucune idée.

— Pouvons-nous discuter ? Juste tous les deux, propose-t-il, fuyant les réactions de sa famille.

Ayden se tend derrière moi et me serre encore plus contre lui.

— Tu n'es pas obligée d'y aller, m'affirme-t-il sérieusement.

— Je crois qu'il est temps de l'affronter, déclaré-je en m'éloignant de son emprise rassurante.

Seulement, je manque de tomber. Il me permettait de rester debout depuis tout à l'heure. Je n'étais pas préparée à voir Daniel aujourd'hui. Cela me perturbe plus que de raison.

Fébrilement, je m'assieds sur le canapé. Mon petit ami s'accroupit devant moi, inquiet. Je passe mon doigt sur la ride formée par son froncement de sourcil.

— Si tu veux partir à un moment où un autre, je t'attends devant la porte, me prévient-il.

Derrière moi, j'entends Katy et ses fils partir.

— Ça va aller, dis-je plus pour me convaincre moi-même que pour le persuader lui.

— OK.

Il m'embrasse doucement, me jette un dernier regard anxieux puis quitte la pièce. Je sais qu'il va rester non loin, prêt à intervenir à n'importe quel moment.

Daniel prend place face à moi. Il a l'air fatigué.

— Rosalie, je suis désolé, amorce-t-il.

— Je ne veux pas de vos excuses, rétorqué-je durement.

— Je suis ton père pourtant.

— Remettons les choses au point. Vous avez participé à ma création. Voilà tout. Vous ne méritez le titre de père. Seulement de géniteur.

Avec ou sans sucre ?Where stories live. Discover now