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— Rosalie, je t'en prie.

Sa voix tremble, il a l'air à bout. Sans que je ne le veuille vraiment, j'appuie sur le bouton qui ouvre la porte. Juste cinq minutes. Après, je le renvoie de chez moi, qu'il le veuille ou non. Je ne peux pas vraiment compter sur mon voisin de palier, c'est un jeune à peine majeur. Il ne fera jamais le poids face à Ayden.

J'entends toquer. En traînant des pieds, je vais ouvrir. Ambre ne m'avait pas menti. Il a clairement maigri, il a des cernes énormes sous les yeux et sa peau est d'une pâleur étrange. Ses yeux sont toujours de la même couleur hématome par contre. Seulement, l'éclat qui les éclairait a disparu.

J'ai beau lui en vouloir pour ses mensonges, je me sens mal en le voyant ainsi.

— Je peux rentrer ? demande-t-il, hésitant.

— Non.

— D'accord, je comprends.

Il croise les bras et baisse les yeux. Je ne pensais pas le voir si faible un jour. Partagée entre l'envie de le serrer dans mes bras et celle de l'insulter, je tente de garder mon sang froid.

— Que voulais-tu me dire ?

Il relève vivement la tête, perdant tous ses moyens.

— Tu as tous les droits du monde de m'en vouloir. Je ne peux pas t'en tenir rigueur. Mais je... Je n'y arrive pas sans toi. J'ai agi comme le pire des enfoirés et je m'en veux tellement. C'était la pire erreur de toute ma vie, bredouille-t-il.

— Il fallait y penser avant de me cacher la vérité.

Ma voix tremble sans que je le veuille. Mon corps paraît prendre le dessus sur la raison, préférant témoigner mon amour pour lui plutôt que ma colère.

— Je le sais. Pardonne-moi, je t'en prie.

— C'est trop tard, Ayden, rétorqué-je.

Le doute s'empare de moi. Dois-je continuer de me protéger coûte que coûte ? Malgré tout, je le déteste encore pour son silence.

— Me haïr, tu peux le faire. Sur ton schéma, me ranger dans la catégorie gros imbécile, tu ne peux pas. Je ne suis pas parti, je suis encore là. Je ne t'ai pas abandonnée. Je t'ai menti, c'est différent, insiste-t-il, convaincu.

Je suis encore là.

Ses mots se répercutent violemment dans mon esprit. Sur ce point-là, il n'a pas tort. Ayden se tient devant moi, avec la force qu'il lui reste.

— Ne prétends pas oublier tout ce que l'on a vécu sous prétexte que tu vois ton entourage sous deux catégories, ajoute-t-il, fébrile.

Ses yeux deviennent larmoyants et j'ai peur qu'il se mette à pleurer. S'il craque, je ne tiendrai pas longtemps.

— Je ne te mentirai plus jamais, je te le promets, déclare-t-il avec assurance.

Son regard me transperce et n'aspire qu'à une chose : mon pardon. Je pose mes iris ailleurs, troublée.

— Insulte-moi si tu veux, mais reviens. S'il te plaît.

— Ayden, tu...

Je ne parviens pas à finir ma phrase. Il se penche vers moi, attendant la fin de ma phrase. La bouche entrouverte, ses prunelles me fixent. Son odeur marine m'avait tant manquée...

— Je t'en veux tellement, murmuré-je, déchirée en deux.

— Je sais et tu as raison.

— J'ai peur, bafouillé-je, croisant mes bras sur ma poitrine.

Avec ou sans sucre ?Where stories live. Discover now