Chapitre 14 - Wisk -

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 Je ne pensais pas la croiser ici. Pourtant cela ne devrait pas m'étonner, puisque Esmia était sa jumelle. Je l'ai oublié ces derniers jours. Et en la voyant sous ce rayon de soleil, je me demande bien comment j'ai pu mettre cette information de côté.

Mes mains sur ses bras la maintiennent contre moi. Je lis la tristesse dans ses deux magnifiques prunelles cyans, elle ne parvient pas à me dissimuler sa peine. Je la reconnais en elle, puisqu'elle réside en moi depuis que j'ai trouvé le corps de ma meilleure amie dans le parc. Je pensais qu'elle se remettrait rapidement, cela faisait des jours qu'elle se plaignait de mal de tête. Je n'ai jamais envisagé qu'elle pourrait ne plus faire partie de nos existences.

Pour la première fois de notre vie, nous semblons nous comprendre parfaitement. Je lis tout dans ses iris. Ma main droite se lève afin de glisser dans sa chevelure. Je retire la pince qui la retient, ainsi que la couronne. Ce matin, nous ne sommes pas des souverains, nous ne sommes pas des époux, mais deux personnes qui pleurent la perte d'un être cher à leur cœur.

Son visage vient se lover contre ma main. Sa peau est douce, mon pouce caresse son épiderme. Son front vient se poser contre mon torse avec tendresse. Je l'entends pleurer, je tiens à la garder contre moi. Mon corps me pousse vers elle, je ne sais pas pourquoi. Lorsqu'elle se recule pour lever la tête vers moi, je ne réponds plus de rien. Je me penche vers elle, mes lèvres s'apposent sur les siennes. Elle devrait me repousser, cependant elle me le rend, alors j'approfondis notre baiser. Ma langue s'immisce dans sa bouche pour entreprendre un ballet avec la sienne. Nos corps se collent l'un à l'autre, mon être se met au diapason du sien. Ses paumes s'accrochent à mes épaules, je la pousse et la coince contre un arbre. Mes lèvres descendent dans son cou pour finir sur le renflement de sa poitrine.

— Wisk, murmure-t-elle, pas ici.

Ses paroles me percutent. Elle a raison, nous ne devons pas faire cela comme ça. Je me redresse, nos fronts se rencontrent, nos souffles se mélangent, nous sommes tendus sans aucun doute.

— Tu as raison, je n'aurais pas dû. Je suis désolé.

Vénus me scrute, son regard change. La colère s'installe, je lève les mains afin de ne pas entrer en confrontation avec elle.

— Nous n'aurions pas dû, reprends-je.

Brusquement, je me retrouve propulsé à l'autre bout du terrain. Ma femme se barre et visiblement, je l'ai sacrément mise en colère. Je me redresse, puis époussette ma tenue. J'aurai pu répliquer, mais hors de question de blesser une femme et encore moins celle qui me sert d'épouse.

J'étais venu pour parler avec ma meilleure amie et je me suis retrouvé à embrasser sa jumelle ! Je crains vraiment. Une erreur de plus à mon palmarès.

— Votre majesté, m'interpelle un des serviteurs.

— Laissez-moi, ordonné-je.

— Mais votre majesté...

— Obéissez ! craché-je.

Il s'éclipse sans demander son reste me laissant enfin seul. Je me maudis. Comment ai-je pu entreprendre une telle chose ? Ce n'est pas digne de moi, j'aurai pu la prendre contre cet arbre comme une vulgaire courtisane. J'ai conscience qu'elle cherche à me blesser dans mon amour propre et disons-le, elle y réussit à merveille. Je n'ai jamais su pourquoi elle me détestait autant, cependant il était hors de question que je me laisse faire.

Sauf que je viens de voir une autre facette de cette femme et cela me déstabilise. Ma main se pose sur l'écorce, ma respiration est difficile. Le souvenir de son corps contre le mien me revient encore, encore et encore, ainsi que son parfum délicat, sa peau douce.

Je pousse un grognement afin de laisser s'échapper la frustration que je ressens, mais cela n'est pas suffisant. Mes pouvoirs se déchaînent et tout ce qui se trouve en face de moi se transforme littéralement. Par chance, je n'ai pas visé le cimetière, mais l'étendue boisée qui se trouvait à proximité. Cette dernière se transforme au gré de mon humeur, passant d'une forêt verdoyante à un cratère, puis un volcan avec de la lave s'écoulant, pour reprendre sa forme originelle. Bien entendu, je lui redonne plus d'éclat afin de m'excuser du traitement que je viens de lui infliger. Je n'avais pas perdu autant mes moyens depuis des années. Je crois bien que cela remonte au soir ou mes parents m'ont appris que j'allais me marier dès que possible à la princesse Esmia.

Le souvenir de ce soir remonte, j'avais été brutale, transformant presque tout le visage de notre nation, réduisant la terre en miette. Rien n'aurait pu pousser après mon passage et même les autres élémentaires n'auraient rien pu entreprendre. Je suis prince et puis je suis l'élue de la déesse Gaïa, donc mes pouvoirs primes sur ceux des autres élémentaires de la terre. Pour me faire pardonner de ma réaction, j'avais pratiqué le rituel de l'Étreinte de la Terre. Je me suis allongée pendant plusieurs jours dans un trou entouré de cristaux afin de renforcer le lien avec la planète ainsi que notre déesse. Gaïa était venu afin de m'apprendre à rester le plus calme possible, j'ai suivi ses enseignements ce qui a fonctionné jusque là. Néanmoins, je ne suis pas certain que cela sera suffisant désormais...

L'initiation d'une reineWhere stories live. Discover now