Bungou Stray Dogs - Chuuya x OC // Ainsi pleurent les souvenirs (Tome I)

Chapitre 46

-Je suis ravi de voir que tu es réveillée et en relativement bon état. Je n'ai pas douté de ta capacité à mener cette mission à bien ; grâce à toi, nous avons réuni tous les documents dont nous avions besoin pour commencer à remonter la piste menant au cerveau derrière tous ces kidnappings. Il faudra juste les traduire, mais ce n'est qu'un détail.

Le regard de Zoey, vide, s'attarda sur la silhouette devant elle, qui était plus grande et plus intimidante que jamais. Mori Ougai se tenait près de son lit, un sourire sur les lèvres, visiblement satisfait.

Elle ne comprenait pas vraiment pourquoi, cependant. Certes, elle avait réussi sa mission, contre toute attente. Mais, dans le même temps, elle avait dû se souvenir de ce qui était certainement le pire instant de son existence.

Elle avait tué ses parents. Elle ne savait plus comment, ni pourquoi, mais la réalité restait la même. Qu'y avait-il de pardonnable dans le fait de prendre la vie de ceux à qui elle devait la sienne?

Et, comme si cela n'était pas suffisant, elle avait en plus de cela pris la vie de deux personnes supplémentaires. L'une de ses propres mains, et l'autre de façon indirecte ; le résultat final restait cependant le même.

Elle se souvenait encore des paroles de Chuuya, lorsqu'elle avait rouvert les yeux la veille. Il n'avait pas pu lui cacher longtemps le fait qu'elle avait bel et bien ôté la vie à des êtres humains ; lorsqu'elle avait affirmé à Chuuya que personne ne pourrait plus jamais la pardonner, il lui avait alors répondu que lui était prêt à le faire, sans hésitation.

Chuuya était encore là, à croire en elle, alors qu'elle n'avait plus aucun espoir de sortir de l'enfer qu'était devenu son esprit depuis son réveil. Elle savait que le roux avait déjà tué un nombre impressionnant de personnes, et elle ne lui en voulait pas ; il n'avait tout simplement pas le choix, s'il voulait survivre.

Alors pourquoi n'arrivait-elle pas à se pardonner elle-même? Pourquoi ne faisait-elle que se détester de plus en plus, à mesure que ses souvenirs revenaient, à mesure que ses mains étaient tachées de sang?

Elle n'avait pas envie de continuer à mener une vie pareille. Mais avait-elle le choix, elle aussi?

Elle n'avait nulle part où aller, et le monde extérieur à la Mafia Portuaire n'était pas aussi clément et compréhensif que l'était Chuuya ; si ses crimes venaient à être connus du grand public, personne ne serait en mesure de la pardonner pour ce qu'elle avait fait.

Elle était perdue, tout simplement.

Si perdue qu'elle avait l'impression de suffoquer, d'être piégée dans un lac sans fond d'où elle ne ressortirait pour ainsi dire jamais. Condamnée à sombrer lentement, à mesure que ses crimes s'accumulaient sur sa conscience déjà fragile et précaire.

Elle n'était pas forte. Elle ne l'avait jamais été. 

Mais ce n'était vraisemblablement pas l'opinion de tous, Mori le premier. Au contraire, l'homme semblait plus satisfait que jamais ; ce fut à cet instant qu'elle réalisa.

La Mafia était le seul endroit où tuer quelqu'un était vu comme normal ; le seul endroit où le meurtre était loué comme un exploit remarquable. Le seul endroit qui serait en mesure de l'accepter, désormais.

-J'ai hâte d'en savoir plus sur cette fameuse capacité que tu possèdes, reprit l'homme avec un sourire. Je demanderai aux autres de t'aider à la maîtriser ; ne t'inquiète pas, je suis certain que tu réussiras. Tu es promise à un avenir glorieux au sein de la Mafia, je peux te l'assurer.

Et, ainsi, il tourna les talons, sortant de la chambre par la porte qu'un médecin lui tint avec respect, et qui se referma l'instant suivant. Le silence retomba sur la chambre, dotée d'un luxe presque excessif pour quelqu'un comme elle.