Chapitre 26

140 23 15
                                    

Même si les griffures sur son visage étaient plutôt profondes, elles étaient en bonne voie pour guérir sans laisser de marques. Peut-être une petite trace, d'après les médecins, mais compte tenu du jeune âge de Zoey cette dernière cicatrisait relativement facilement.

Dans un sens, Chuuya en était soulagé. Zoey était déjà couverte de cicatrices, certes invisibles à cause de ses vêtements, et elle n'avait absolument pas besoin d'en avoir de nouvelles.

Il aurait aimé pouvoir affirmer qu'elle avait déjà assez souffert comme ceci, mais il ne croyait pas un seul de ces mots. Peu importe ce que s'étaient dits Mori et elle, Zoey n'était pas prête de pouvoir arrêter la douleur définitivement.

Autant physique que mentale.

La Zoey qu'il avait trouvée à son retour dans la chambre n'était plus qu'une ombre de celle qu'il avait côtoyée à la fête de Noël, quelques semaines auparavant. Celle avec qui il avait joué dans la neige, avec toute l'innocence dont pouvaient être dotés des enfants normaux.

Dans les jours qui suivirent, il fit de son mieux pour lui rendre visite autant de fois que possible à l'hôpital, l'espoir de la revoir sourire sincèrement lui tordant les tripes à chaque rencontre.

Si elle était loin d'être remise de la scène d'horreur qu'elle avait connue, lors de cet interrogatoire aux côtés de Kôyô, il parvint, au bout de trois jours environ, à apercevoir la lueur de joie et d'innocence au plus profond du regard hétérochrome de la jeune fille.

Zoey était toujours là, derrière la peine qui meurtrissait son cœur et les images qui harcelaient son esprit. Mais il savait que, dorénavant, ce genre de choses allait devenir le quotidien de la brune. Ordres de Mori.

Dans le mois qui suivit, ses doutes se confirmèrent. Zoey continuait de l'accompagner sur certaines de ses missions les plus calmes, mais était bien souvent réquisitionnée par d'autres personnes, notamment Dazai, qui était chargé de lui apprendre les "ficelles du métier".

Qui de mieux placé pour lui montrer toute la noirceur de la Mafia que l'homme qui incarnait le plus fidèlement possible ses principes morbides?

Kôyô l'avait elle aussi amenée avec elle de temps à autres, mais la femme aux longs cheveux roux avait bien signifié à Mori qu'elle n'était absolument pas disposée à s'en charger plus que nécessaire.

Quant à savoir pourquoi, Chuuya avait quelques débuts d'hypothèse. Peut-être que son aînée n'était toujours pas convaincue par le fait que, avec toute sa bonté et gentillesse naturelles, Zoey était effectivement disposée pour travailler dans l'obscurité.

Pour Kôyô, Zoey n'avait strictement rien à faire dans cet endroit. Mais, aux yeux de Mori, ce fait était tout à fait modulable à sa guise ; il était certain que, tôt ou tard, la jeune amnésique qu'il avait si gentiment recueillie allait devenir la parfaite petite poupée dévouée corps et âme à la Mafia.

Et, par extension, à lui-même.

Briser quelqu'un qui n'avait ni souvenirs, ni passé, ni normes auxquels se rattacher était un jeu d'enfant. Et Zoey était bien trop naïve pour espérer résister au véritable lavage de cerveau qu'avait amorcé Mori, à partir du jour où il avait appris l'existence de Zoey.

Il aurait très bien pu se contenter d'en faire une employée de bureau totalement dévouée à la Mafia, mais quel était l'intérêt? Ce n'était pas un rôle adéquat pour la marionnette modulable à sa guise qu'il comptait produire.

Il allait en faire une parfaite petite ombre, dépourvue de lumière. Qui serait en mesure de torturer et de tuer selon ses envies, selon ses besoins en tant que chef de la Mafia.

Bungou Stray Dogs - Chuuya x OC // Ainsi pleurent les souvenirs (Tome I)Where stories live. Discover now