Partie 2 - Chapitre 20

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Térence m'avait tourné le dos et avait continué à avancer en restant mystérieux sur l'endroit vers lequel il m'emmenait. J'étais encore sous le choc de ce qu'il venait de se passer. C'était peut-être pour cela que je le suivais sans protester. 

Au bout de plusieurs minutes, Térence se stoppa vers une maison en béton qui était construite légèrement à l'écart des autres. Comme la plupart des habitations du camp, la bâtisse était surélevée, laissant apparaître une cave et un escalier pour atteindre la porte d'entrée. Térence gravit les escaliers et m'entraîna à sa suite. Lorsque je pénétrai à l'intérieur, je compris qu'il m'avait emmené chez lui. 

J'ignorai pourquoi mais mes pensées se dirigèrent alors vers César à ce moment-là. Je me demandais ce qu'il dirait ou ferait s'il me voyait seule dans l'appartement de son frère. Son visage froid lorsqu'il contenait sa colère s'imprégna dans mon esprit comme une image mentale que l'on n'arrive pas à effacer. 

"Installe-toi je t'en prie."

Je levai la tête vers Térence, ce qui me permit de couper court à toutes mes tergiversations mentales. Je hochai la tête et m'assied sur le siège le plus à proximité de moi. Son appartement était relativement modeste. Une kitchenette occupait un bout de la pièce et un lit king-size trônait au centre. C'était presque risible de le voir s'embarrasser de ce luxe alors que le camp était à peine plus développé que la colonie. 

Térence me tourna le dos pour sortir d'un placard deux verres. Je le regardais faire sans rien dire, y compris lorsqu'il sortit du même placard une bouteille de whisky qui semblait dater d'une dizaine d'années au moins. 

"Tu bois de l'alcool?" me demanda-t-il sans me jeter un regard. 

Je répondis par la positive, non sans une légère hésitation. Cela faisait des mois que je n'avais plus bu une goutte d'alcool. Mais ce que je venais de traverser aujourd'hui méritait bien un réconfort. 

Térence versa le liquide dans les deux verres, de façon assez généreuse, je dois l'avouer et se dirigea vers moi. Il me tendit le verre que j'attrapai en évitant son regard. 

"Merci." soufflai-je.

Sans me répondre, il s'assit dans le fauteuil en face de moi et s'affala dessus comme s'il était seul. Il soupira longuement et vida d'une traite le verre. 

Je le fixai médusée. Il conservait une attitude froide et maitrisée, comme il en avait l'habitude. Mais je décelai en lui une amertume. Ce qu'il venait de faire aujourd'hui ne relevait pas de l'ordinaire. 

"C'est la première fois que tu tues un de tes hommes?" demandai-je.

Térence ouvrit les yeux qu'il avait fermé durant quelques secondes pour me fixer avec froideur. Je me mis instantanément à regretter ma question. Je ne pensais pas qu'il allait me répondre avant que sa bouche ne s'ouvre. 

"Oui. J'ai toujours fait en sorte d'éviter cette situation." me répondit-il avec une intonation presque douce dans la voix. 

Je relevai la tête vers lui avec surprise. Il avait une attitude distance, voir carrément sévère. Mais le ton de sa voix contrastait totalement. Il y avait une atmosphère étrange dans la pièce. Je savais que nous avions trop de différences pour se qualifier d'allié mais j'étais sa prisonnière ce qui me plaçait automatiquement dans la case "d'ennemie".

Pourtant, quelque chose en plus était présent entre nous. Et j'avais bien trop honte pour admettre que c'était de l'attirance.

Pour trouver un peu de courage, je vidai le verre d'une traite, recopiant son geste. Je cachai la grimace qui s'installait sur mon visage tandis que le liquide ambré me brûlait la gorge.

ColoniaWhere stories live. Discover now