Partie 2 - Chapitre 5

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25 décembre 2012

J'observais mon reflet dans la glace. Les cernes dus au manque de sommeil de ces derniers jours commençaient à disparaître. Même ma mine s'améliorait, j'avais les joues plus roses et l'air moins fatigué. Pourtant, cela ne reflétait rien du désordre qui se tramait dans mon esprit.

J'avais passé les trois derniers jours avec César. Chaque moment de libre qu'il avait eu, il les avait passé avec moi. Et je ne réalisais toujours pas pourquoi.

Après qu'on ait couché ensemble, il m'avait empêché de rentrer directement chez mes sœurs. Je n'avais pas compris au départ. Je l'avais même soupçonné d'avoir encore une idée de vengeance à mon égard. Puis, ensuite il m'avait expliqué qu'il avait dit à l'ensemble de la colonie que je prolongeais de quelques jours mon séjour à la Communa. J'imaginais sans peine les ricanements et les sourires pervers de la foule.

J'ignorais pourquoi il avait pris cette décision. Il m'avait laissé sa chambre à disposition pendant la journée et même prêté quelques livres pour que je m'occupe. J'avais littéralement profité de trois jours de privilèges et de liberté, sans être obligée de passer ma journée à travailler pour lui en faisant des tâches stupides d'entretien de la colonie.

Quelque chose en moi savait que c'était en partie pour me récompenser. Et cette idée me dérangeait tellement que je la chassais vite de mon esprit lorsqu'elle faisait irruption.

Pendant ces trois jours, je n'avais pas tenté d'entrer dans la salle de vidéo-surveillance. D'une part, parce que je ne voulais pas déclencher sa colère de sitôt, et d'autre part, parce que je l'avais vu fermer la porte à clé un matin. Peut-être se méfiait-il de ma curiosité maladive.

J'avais pu déambuler dans son habitation pour profiter de sa bibliothèque qui trônait dans sa chambre. Il avait quelques classiques de la littérature colombienne et beaucoup d'ouvrages scientifiques. J'avais alterné les deux, ne m'ennuyant à aucun instant. Tout était mieux que la routine abrutissante de la colonie.

Pourtant, durant ces trois jours, César ne m'avait pas touché une seule fois. J'aurais pu jurer que c'était pour avoir mon corps à sa disposition qu'il m'avait cloîtrée chez lui mais rien de tout cela. Je le voyais, lorsque je sortais avec seulement une serviette autour de mon corps, me regarder avec le petit sourire en coin dont il en avait l'habitude. Mais il ne venait jamais à ma rencontre. Lorsque j'avais trouvé le peignoir en satin dans une des pièces de la maison, il avait insisté pour que je l'enfile mais n'avait jamais tenter de me l'ôter.

Je pensais alors qu'il attendait à ce que je vienne à lui. C'était un geste classique de sa part. Mais, lorsqu'un soir, je m'étais tournée face à lui alors qu'il était allongé près de moi, il n'avait même pas jeté un regard lorsque j'avais commencé à retirer mon haut. Ignorant mon regard fébrile, il m'avait attrapé par la taille pour me retourner dos à lui. Sa bouche s'était collé à mon cou et il m'avait chuchoté « Dors. » tandis que ses bras s'étaient enroulés autour de mon corps.

Je l'avais laissé faire, ne comprenant pas son comportement. Depuis je n'avais pas retenté de gestes envers lui. J'imaginais que ses actions étaient contrôlées et que s'il me résistait, c'était dans un but bien précis que j'ignorais pour l'instant. Cela ne m'avait pas empêché de savourer les trois nuits contre son étreinte protectrice. Dans l'obscurité, son corps chaud contre le mien me rassurait, faisant taire les peurs et le manque de mes proches dont il était le responsable.

J'avais conscience de plonger dans l'hallucination collective des femmes de la colonie. Mais je ne pouvais pas lutter. Mis à part l'amitié de Luisa, c'était le seul à m'apporter de l'attention, positive, depuis des semaines. Inévitablement, je tombais dans ses bras. Et coucher avec lui n'améliorait pas cela. Je pouvais crever plutôt qu'avouer cela, mais j'attendais avec impatience le prochain moment intime que nous échangerons.

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