Chapitre 19 - Quel idiot a dit que l'alcool était de l'eau ?

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Putain, j'aurai peut-être dû écouter mes propres conseils et aller me coucher. Au lieu de quoi, Devon est parvenu à me faire rester et à nous deux, nous avons fini la bouteille.

À un jour de notre départ, je me réveille le cerveau en ruine dans le canapé, à moitié affalée sur le corps toujours inconscient de Devon. Ma tête me fait affreusement souffrir et j'ai l'impression d'avoir des courbatures à chaque muscle de mon corps.

Je me relève avec mal tandis que le monde tangue autour de moi et me mets sur pieds. Putain, mais qu'est-ce qui m'a pris de boire autant ? Surtout que demain est le grand jour et que nous avons plein de choses à faire aujourd'hui. Il faut qu'on soit au maximum de nos capacités et me voilà à deux doigts de vomir sur le tapis.

La soirée d'hier reste relativement floue dans ma tête. Je me souviens de nos premiers verres qui se sont rapidement transformés en gorgées à même la bouteille que nous partagions ensemble. Le reste est brouillon et ce sont les seules choses dont je me souviens ainsi qu'un profond sentiment de connerie. Je ne sais pas comment l'expliquer, mais je sens que durant cette soirée, nous avons fait une grosse connerie.

Je me dirige vers la cuisine en me tenant aux meubles sur mon passage pour être sûre de ne pas me casser la figure, mais avant de me servir le moindre verre d'eau, je me souviens avoir aperçu une armoire à pharmacie dans la salle de bain de Devon et j'espère que cette dernière contient assez de médocs pour pouvoir calmer la migraine qui refuse de me lâcher et qui, à mon avis, va me coller à la peau pendant encore un bon bout de temps. Je fais donc demi-tour et sors de la cuisine pour me diriger à l'étage pour me rendre dans la chambre de mon « colocataire ». Franchement, ce dernier a tellement picolé que je n'ai pas besoin de me faire discrète tellement ses ronflements couvrent le bruit de mes pas. Rien ne semble pouvoir le réveiller.

Une fois à l'étage, je tombe des nues lorsque je passe devant la porte ouverte de ma chambre. Cette dernière est sens dessus dessous et la non-fiabilité de mes souvenirs ne me permet pas de me rappeler quelle tempête est passée par là.

Je rentre en trombe dans la pièce et déchante face au massacre présent. Le bureau est retourné, le lit brisé en mille morceaux, le matelas ainsi que les draps déchirés et la table de chevet a carrément disparue. Vu l'énorme trou dans la fenêtre, je dirai qu'elle est passée à travers (ce que je peux confirmer en me penchant).

J'avoue être encore un peu trop dans le gaz pour tout comprendre, mais des flash me remontent durant lesquels je nous vois, Devon et moi, en train de retourner toute la chambre en hurlant qu'elle est la cause de nos malheurs et qu'on devrait lui foutre le feu pour la punir. Je ne vais pas le cacher, je n'ai jamais vu quelqu'un de complètement torché dire quelque chose d'intelligent, mais à ce stade, nous battons des records.

Trop mal en point pour faire l'état des lieux, je retourne dans le couloir et ferme la porte derrière moi pour éviter les courants d'air avant d'aller dans la chambre de Devon chercher ce putain de médicament.

Je finis par en trouver un et file dans la cuisine le prendre avec un bon verre d'eau fraîche. Ce n'est qu'une fois assise sur le tabouret que je laisse mon esprit chauffer et mes interrogations déchaîner dans mon crâne meurtri. Mais qu'est-ce qui nous a pris de se bourrer la gueule de cette manière ? Bon, OK, nous avons visiblement passé une bonne soirée, mais ça ne change rien à la situation. Non seulement aucun de nous n'est capable de préparer le voyage de demain, mais en plus, je me retrouve désormais sans chambre et sans lit pour dormir ce soir.

Putain, comme si la situation n'était déjà pas assez critique, il faut en plus ajouter tout ce bordel à la longue liste. Et il est hors de question que je me tape tout ça seule alors que Devon tape sa meilleure sieste. Je remplie donc la première casserole que je trouve d'eau froide et m'avance vers le canapé où l'alcoolique est toujours en train de ronfler (enfin, plus pour très longtemps). C'est comme si soudainement, je me sentais mieux et que j'avais oublié mon mal-être. Et c'est avec un grand sourire plaqué sur le visage que je balance la totalité de la casserole sur lui avant de reculer de quelques par peur de représailles.

Et bien heureusement que je me suis éloignée, puisque dès réveillé, il se lève d'un bond en donnant des coups-de-poing dans le vent. Face à cette scène, je ne peux rester de marbre et lâche un gloussement qui m'apporte aussitôt la fureur du démon. Visiblement, cette petite douche improvisée ne le ravit pas vraiment et au contraire, il semble vraiment énervé ce qui renforce mon hilarité. Depuis le temps que je cherche à le mettre hors de lui, je pense qu'on peut dire que j'ai réussi. Pour une fois les rôles s'inversent...

- Je peux savoir c'est quoi ton problème ? hurle-t-il en retirant son haut gorgé d'eau glaciale.

Si j'avais eu un tant soit peu d'instinct de survie, j'aurai pu flipper de le voir dans cet état, mais actuellement, je suis bien trop fière de ma vengeance pour m'inquiéter d'une quelconque représaille. Et puis de toute façon, je sais une chose, Devon s'en veut bien trop pour ce qu'il m'a fait pour me faire le moindre mal. Je l'ai compris il y a quelques jours et c'est pour cette raison que je n'ai plus vraiment peur de lui. Malgré ses airs fiers, il serait capable de me ramener la lune si je lui demandais juste pour s'excuser pour ce que son double maléfique m'a fait. C'est la seule raison qui me pousse à ne pas partir en courant face ses yeux assassins.

- Je ne sais pas si tu te souviens, mais dans vingt-quatre heures on est parti. Alors bouge ton cul on a des choses à faire.

À vrai dire, j'attends le moment où il me dira que c'est une blague et qu'il ne compte pas partir avec moi depuis quelques jours déjà. Je ne comprends toujours pas ce qui le pousse à se joindre à moi malgré tous les risques et j'ai l'impression qu'il va se défiler à la dernière minute. Personnellement, ça ne me fait ni chaud ni froid qu'il vienne, simplement, je suis le genre de personne qui prévoit tout à l'avance et dans les moindre détails donc je déteste les imprévus.

- Et tu étais obligé de me réveiller de cette manière ? Tu ne pouvais pas le faire comme une personne normale !

Et puis quoi encore, louper sa magnifique tête au réveil ? Jamais je n'aurai loupé une occasion pareille de me foutre de sa gueule, c'était bien trop beau.

- Mais Devon, depuis le temps tu devrais savoir que je ne suis pas une personne normale. En plus, cette nuit on a retourné toute ma chambre alors on a du rangement à faire en plus.

Ses sourcils se froncent et je n'ai pas besoin d'être une génie pour comprendre qu'il ne se souvient plus de rien. En même temps, vu comment nous avons picolé, ça m'aurait étonné qu'il parvienne à se souvenir de la soirée dans les moindre détails. Parce que si moi je me suis retrouvée dans un état lamentable, je ne vous parle pas du sien.

- Pourquoi tout ranger s'il ne nous reste que ce soir à passer ici.

- Parce que je refuse de dormir sur le canapé même si ce n'est que pour une nuit. Donc tu vas me faire le plaisir de réparer ce lit.

Bon, je sais que je suis chiante, mais il est hors de question que monsieur passe une bonne nuit dans un vrai lit alors que je me tape le canapé pour une connerie que nous avons faite ensemble. Je dois être en forme pour demain et j'espère bien qu'il parviendra à réparer le lit histoire que je puisse passer une bonne nuit (en espérant sans cauchemar).

- Et puis quoi encore ?

- Devon, je suis fatiguée, j'ai la gueule de bois et pour couronner le tout, je suis stressée pour demain alors je ne te conseille pas de me faire chier.

À vrai dire, je ne suis pas énervée mais amusée par la situation, mais ça, je ne le montre pas. L'alcool doit encore faire effet parce qu'en temps normal, je pense que j'aurai littéralement pété un câble, mais ce matin, voir Devon dans cet état est tellement satisfaisant que rien ne pourra venir pourrir ma journée (hormis ce mal de crâne qui refuse de me lâcher).

- Est-ce que je dois te rappeler que moi aussi j'ai la gueule de bois ? râle-t-il.

- Ouais, mais j'en ai rien à foutre alors magne ton cul, on a du boulot.

Sans un regard en arrière, je quitte le salon et remonte dans ce qui me sert de chambre pour prendre des habits que j'avais piqués à Devon. Heureusement, ces derniers ont survécu au combat et semblent bien se porter. Je tresse ensuite mes cheveux dans une natte avant d'attacher cette dernière en chignon.

Une fois prête, je reprends les listes que j'avais faites la veille pour savoir ce qu'il fallait mettre dans les sacs. Je la relis et corriger deux ou trois trucs avant de me mettre à préparer les affaires. Même la gueule de bois ne parvient pas à me détourner de mon objectif et de ma motivation, puisqu'une chose est sûre, demain nous partirons coûte que coûte. Et s'il faut que je tire Devon par la peau du cul tout au long du trajet, c'est ce que je ferais sans aucun scrupule.

Pile ou FaceWhere stories live. Discover now