L'enfant du Mal

50- C'est terminé

Peut-être que le choix de ma dernière résidence est le choix d'une faible personne. Honnêtement, ça n'a plus d'importance. La seule raison pour laquelle je me retrouve ici aujourd'hui, c'est parce que je n'avais aucune idée d'un autre endroit où aller.

Cette plage n'a pas changé, même après des décennies. Assise sur le sable face à la mer dans ma longue robe noire, repensant encore et encore à mon douloureux passé, je regarde l'horizon en tentant de faire redémarrer mon coeur. Car s'il continue de battre suffisamment pour me tenir en vie, ça n'est pas du tout suffisant pour me donner la moindre force. Je me sens vide, vide de tout.

Ma vie n'a plus de sens, pas le moindre. Et si je me suis longtemps caché derrière la vengeance, je ne peux plus le faire désormais : je n'ai plus rien ni personne à venger. C'est terminé.

Alors que les vagues continuent inlassablement de rejoindre le sable de la plage, je me prends à penser à une période bien particulière de mon passé. Une période où Nébula et moi étions deux soeurs, où nous nous baladions toutes les deux sur les collines d'un petit royaume et regardions le port et les bateaux en contrebas sans nous dire un mot. Je ne l'ai pas réalisé sur le coup et c'est bien dommage, mais je crois que ce sont ces instants-là qui devaient être mes moments de bonheur à moi. Je n'en ai pas pris conscience, je n'ai pas suffisamment profité du fait que j'avais alors tout ce que je pouvais espérer. Je n'ai pas de passions, pas d'envies, pas de buts. Je n'ai rien, ni personne. Au moins dans ces moments-là, j'avais quelqu'un à mes côtés.

Nébula est morte. Thanos est mort. Ronan et son peuple sont morts. Mais moi, je suis toujours là. À moitié vivante. Je serre un peu de sable entre mes poings, avant de soupirer. À quoi ça sert, tout ça ? Qu'est-ce que je fais encore là ? Je suis vouée à rester seule jusqu'à la fin de mes jours, alors pourquoi devrais-je supporter tout ça ? À quoi bon ?

En commençant cette vendetta j'ai pensé qu'une fois que tout serait terminé, je me sentirais libérée. Mais ce n'est pas ce qui s'est produit, au contraire. Je me suis sentie encore plus vide, encore plus seule qu'auparavant. Et quand je vois la solitude tout autour de moi, je n'ai pas le moindre espoir que ce sentiment disparaisse. Ni même ne s'estompe, en réalité. Alors peut-être que cette fois, mon heure est venue.

Je ne veux plus vivre comme ça, je ne peux plus vivre comme ça. Ça doit s'arrêter, avant que je perde la tête pour de bon et que je devienne encore pire que lui. Mon père. Non, ce n'est pas ce que je veux. Je ne lui ferai pas ce plaisir, jamais.

Alors, il est temps de mettre le point final à toute cette histoire.