Avec ou sans sucre ?

By TrueWordOfLove

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Rosie, serveuse au Passe-Temps, cherche à vivre avec les fantômes de son passé, malgré l'apparition d'Ayden... More

Prologue
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-Épilogue-

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By TrueWordOfLove

— Deux expressos, je vous amène ça de suite.

Je parcours rapidement la distance qui me sépare du bar. Passant derrière, je prépare la commande de mes clients. Le café a conservé son côté authentique, mais il accueille autant des adolescents que des personnes plus âgées. Le mur en pierres apparentes donne une ambiance toute particulière. Ajoutez à cela la vue splendide sur une falaise, la mer au loin et vous comprendrez peut-être pourquoi j'aime tant cet endroit.

Je place les deux tasses sur un plateau rond et leur sers ce qu'ils ont demandé. Toujours avec le sourire. Voilà ce que me disait Jacques lorsque j'ai commencé à travailler ici.

Il n'y a jamais grand monde à cette heure-ci, mais des habitués trouvent toujours leur place sur les tabourets, un verre à la main. L'ambiance s'avère conviviale. Des personnes déversent leurs peines en me racontant tout tandis que d'autres discutent avec joie. Nous trouvons tant de vie entre ces murs...

La porte s'ouvre, la clochette sonne. Un homme vêtu d'un sweat à capuche lui recouvrant le visage entre. Immédiatement, je vais à sa rencontre, carnet à la main.

— Bonjour. Souhaitez-vous une table ?

Il baisse le regard vers moi. Ses yeux bleus et terriblement froids me dévisagent pendant de longues secondes, donnant l'impression de chercher un détail sur mes traits. Je dois avouer qu'il me met mal à l'aise, mais j'ai déjà rencontré de nombreux clients peu aimables. Autant dire que me laisser faire n'est pas dans mes habitudes. Je hausse un sourcil dans sa direction, lui montrant que j'attends sa réponse.

— Oui.

S'il vous plaît, trop compliqué à prononcer? Je me pose souvent la question, mais je ne peux pas faire grand-chose pour améliorer la politesse de nos usagers.

Je lui signifie donc de me suivre et l'amène à une table qui donne vue sur la falaise. Il retire sa capuche, me permettant de mieux le distinguer. Ses cheveux bruns sont en bataille, comme s'il venait de courir. Ses traits sont durs, tendus. Il semble plus âgé que moi, de quelques années.

— Que puis-je vous servir ?

— Auriez-vous de la soupe ?

Surprise par sa question, je mets quelques secondes avant de répondre.

— Bien sûr.

— Et un café, ajoute-t-il.

Je réprime un soupir devant le manque d'une quelconque formule de politesse. À la place, j'acquiesce, rejoignant le bar. Je pousse légèrement la porte qui mène à la petite cuisine.

— Armand, il me faudrait un potage, s'il te plaît.

Sa chevelure cachée sous une charlotte s'accompagne d'une tenue blanche. Ses prunelles rieuses se posent sur moi.

— Je te prépare ça de suite, ma jolie !

Je lui souris légèrement avant de quitter la pièce. Armand et moi sommes ensemble depuis un an. Cette relation s'est avérée logique en fin de compte et je n'ai pas vraiment à me plaindre. Le cuisinier est un garçon du pays. Il s'est toujours montré sympathique et à l'écoute. Je lui ai vaguement parlé de mon passé. Néanmoins, je n'ai jamais ressenti l'envie de m'épancher sur le sujet avec lui.

Il est arrivé ici il y a deux ans. Il est le petit fils d'un ami proche de Jacques. Ainsi, ce dernier n'a pas hésité avant de lui donner sa chance. Durant quelques mois, nous nous sommes rapprochés, jusqu'à devenir un couple. Lorsque le patron l'a appris, il a simplement souri. Nous vivons ensemble, dans un petit appartement à quelques minutes à pied d'ici.

Armand me tend une assiette généreusement remplie, comme toujours.

— Merci.

Il dépose un baiser sur ma joue, visiblement joyeux. Je lui offre un semblant de sourire avant de ressortir de la cuisine, prise d'une soudaine lassitude. La routine ? Appelez cela comme vous voulez. Au fond, ça ne me dérange pas plus que cela. Nous avons toujours entretenu une relation platonique. J'ai su m'en accommoder au fil du temps.

J'apporte son repas à l'homme sans aucune manière. Il lève ses yeux glacials vers moi puis me remercie d'un simple hochement de tête.

Je m'en vais sans demander mon reste. Agacée, je jette sans ménagement mon tablier sur le comptoir.

— Une bière. Rien de mieux contre les passages à vide, me conseille quelqu'un.

Sursautant, je me rends compte qu'il s'agit de Chris, un habitué d'une quarantaine d'années. Je m'entends plutôt bien avec lui et suis toujours ravie de le voir ici.

— Je ne peux pas boire de l'alcool alors que je suis en service, soupiré-je.

— Qui te dénoncera ? Le couple de personnes âgées ? Ton mollasson de petit ami ?

— Il n'est pas mollasson ! m'exclamé-je, tentant vainement de prendre sa défense.

— Ou bien cet homme étrange qui boit une soupe à trois heures de l'après-midi ? Depuis quand des touristes viennent ici en plein mois d'octobre ?

— Ce sont des choses qui arrivent, Chris.

— Vraiment ? Tu m'apprends quelque chose Rosie, rétorque-t-il ironiquement.

— Je t'en remets une ? proposé-je en voyant son verre vide.

— Si tu me prends par les sentiments, pourquoi pas. Tu sais vendre, je te le dis.

Je ris doucement en le resservant. Je n'agis pas comme ça avec tout le monde. Seulement, j'ai tissé des liens particuliers avec lui, il incarne le grand frère que je n'ai jamais eu. Il vient ici quelques fois, histoire de se retrouver hors du cocon familial, même s'il est très attaché à sa femme et ses enfants.

— Raconte-moi les ragots, je suis certain qu'il y en a de nouveaux depuis que je ne suis pas venu.

— Il se passe quelque chose chez toi pour que tu deviennes si féminin ? m'amusé-je.

— Je te rassure, tout va bien dans ma famille.

— Bien, dans ce cas, sois franc. Que veux-tu savoir sur qui ?

Travailler dans un café se révèle intéressant sur bien des points. Nous finissons par connaître la vie de tout le monde. Évidemment, je ne répète pas tout. Mais, il y a des commérages que le village entier finit par connaître.

— Mon voisin, va-t-il vraiment déménager ou bien est-ce simplement une ruse pour me mettre encore plus en rogne ?

Les histoires de voisinage, je pourrais presque en écrire un livre. Chris et son voisin ne peuvent pas se voir en peinture et mon ami n'attend qu'une chose : qu'il change de maison. Il attend cela, en vain. Et je serais presque confuse de devoir lui annoncer la nouvelle.

— Je suis désolée Chris, mais, cette rumeur est fausse. Il m'a affirmé vouloir rester ici encore un bon moment. Entre toi et moi, je crois qu'il t'aime bien, lui chuchoté-je, comme s'il s'agissait d'un secret.

Il grimace, manifestement déçu et je ne peux pas m'empêcher d'éclater de rire.

— Sentiment non réciproque dans ce cas. Il ne peut pas simplement déménager plus loin ? Il n'y a pas suffisamment de place dans ce monde ? Rien que de le voir, ça m'horripile.

— Mais ce pauvre homme ne t'a rien fait que je sache, affirmé-je en essuyant un verre.

— Si. Nous avons un chemin commun et ce «pauvre homme » comme tu dis, a décidé de mettre un portail, me bloquant le passage.

Je secoue la tête, amusée par cette situation. Ce riverain m'a avoué avoir agi ainsi uniquement parce que Chris commençait à bricoler à neuf heures, le samedi matin. S'ils s'expliquaient calmement, je suis certaine qu'ils s'entendraient bien. Mais, l'un comme l'autre sont bien trop têtus et fiers pour s'abaisser à effectuer le premier pas.

— Je n'ai plus qu'à annoncer cette information à ma femme, dit-il d'un air dramatique, terminant sa bière.

— Tu n'exagères pas un peu ?

— Lorsque quelqu'un te pourrira la vie, tu me comprendras. Bon, je dois y aller.

Il se lève et me tend un billet de vingt euros.

— Garde la monnaie, me sourit-il.

— Mais, c'est beaucoup trop, balbutié-je.

Gênée, je lui rends son argent.

— De toute manière, je n'ai pas de pièces sur moi. À bientôt Rosie !

Je n'ai pas le temps de réagir qu'il est déjà sorti. Mal à l'aise, je récupère la différence dans la caisse et la glisse à l'intérieur mon porte-monnaie à pourboires. Il m'arrive d'en recevoir et cela me permet d'arrondir mes fins de mois. Pourtant, c'est plutôt rare d'en obtenir un si conséquent...

L'homme froid – peut-être dois-je l'appeler le Glacier ? – s'appuie soudainement sur le comptoir.

— Serait-il possible de régler ?

— Évidemment, quatre euros s'il vous plaît.

Il me tend un billet de cinq. Lui me demande la monnaie par contre. D'un hochement de tête, il me salue et remet sa capuche avant de sortir.

Étrange cet homme.

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