Chapitre Trente-deux

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        La bouche de Naomi forme un O parfait alors que la mienne regrette ce qui vient d'y passer au travers. J'ai vraiment poussé le bouchon un peu trop loin là. Une larme coule le long de sa joue alors que sa gaufre tente de survivre entre des doigts qui l'écrase au fur et à mesure.

        Je m'approche d'elle dans un mouvement de pardon, tandis qu'elle recule d'un pas.

        "Je... Je te présente mes excuses Naomi. Je ne le pensais pas. Je ne le pensais pas j'en suis sûre" dis-je la voix tremblante.

        Les yeux de Naomi fixent quelque chose derrière moi, et, pour la deuxième fois en 24h, j'ai envie de m'engouffrer à vingt mille lieux sous terre. 

        "Si. Tu l'as dit Rain, ça a donc traversé ton esprit, donc tu l'as pensé" elle m'observe maintenant. "Je vais prendre un bain" déclare-t-elle en lâchant la gaufre.

        Je me précipite vers elle. Je ne peux pas me permettre de me la mettre à dos. Pas Naomi. Pas maintenant quand nous sommes toutes les deux dans une mauvaise passe.

        "Attends. Accepte mes excuses Naomi. Je suis désolée" dis-je en étouffant un sanglot.

        "J'ai dit que j'allais prendre un bain" 

        Son ton est froid et singulier, quelque chose que je déteste. Mais je ne peux pas l'obliger à me pardonner. Je suppose que ça demande du temps. Je cligne plusieurs fois des yeux pour ne pas laisser les larmes me submerger. Je ne veux pas me noyer dans mes pleurs, parce que j'en serais capable.

        "Bon... euh... Appelle-moi. Rappelle-moi. Montre-moi juste que je ne t'ai pas perdue toi aussi" dis-je, déboussolée en me dirigeant vers la sortie. 

        La silhouette de Naomi disparaît dans un couloir sombre. Ma veste sur les épaules, je sors tête baissée, les yeux rivés sur l'asphalte et mon coeur perdu dans des brumes bien trop obscures.

***

PVD RAIN

        La nuit recouvre le reste de la ville depuis un moment. J'ai passé ma journée à trainer des pieds, essayant d'extraire au mieux tout ce que je veux oublier. En vain bien sûre. C'est donc d'un pas lourd que je rampe vers les portes du journal, espérant croiser Coleen avec un nouvel article pour moi.

        J'entre dans le bâtiment en scrutant les horizons. Les lumières des sorties de secours éclairent les couloirs vides. Ava n'est pas là, pourtant la fermeture n'a pas encore été faîte. Je suppose que les personnes chargées de l'entretien s'occuperont de ça.

        Je monte l'escalier principal, puis prends l'ascenceur pour me rendre à mon bureau. Je n'y travaille jamais, préférant le calme et la sérénité de mon appartement. Pourtant on m'en a attribué un, donc peut-être que je pourrais m'y réfugier. Je ne sais pas ce que je ferais chez moi, à part me morfondre comme une idiote. Ici au moins je pourrais espérer travailler.

        Je passe par le bureau de Coleen qui est ouvert. J'y entre timidement, espérant trouver une note avec mon nom sur mon prochain dossier. Mais tout ce que j'y vois ce sont des post-it pour des réunions ou des shootings photos. 

        Longeant le couloir, je me faufile entre les bureaux pour atteindre le mien.

        Rien n'a changé. Le téléphone est toujours aussi démodé, le bureau m'a l'air dépoussiéré mais ça reste à vérifier. Quant à mon ordinateur, j'ignore si j'en connais encore le mot de passe. 

        Je m'affaise dans le siège avec désinvolture. J'allume ensuite ma lampe de bureau, donnant ainsi un aspect plus privé à l'endroit où je me trouve. Je ramène mes pieds contre moi, les serrant aussi fort que je le peux. 

HunterWhere stories live. Discover now