K. Le destin de l'Empire - dix septième partie

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Quand deux gardes impériaux en armures rouges pénétrèrent sans avertissement dans son bureau, le gouverneur Sigel Vao ne fut pas surpris. Ce genre d'irruption devenait courant au palais: ils venaient l'arrêter. L'ancien général avait pourtant gardé une prudente neutralité face à la prise de contrôle du BSI, préférant garder ses critiques pour lui. Mais dans le nouvel ordre impérial, sans doute aurait-il mieux fait de crier partout sa loyauté au nouveau régime pour espérer un peu de protection. Trop tard pour les regrets.


Les gardes refermèrent la porte derrière eux sans un mot et Sigel comprit qu'il n'allait pas quitter vivant la pièce. Il ferma brièvement les yeux, tachant d'invoquer des souvenirs heureux pour meubler l'attente du coup mortel.


-Bonjour gouverneur Vao, lança Red en ôtant son casque rouge.


Vao rouvrit les yeux, perturbé dans son face à face avec la mort, et fut étonné de découvrir la jeune femme. Ils s'étaient rencontrés plusieurs fois sur Maridun quand elle accompagnait Varig Atorias, mais sa présence ici n'avait pas vraiment de sens. 


-Vous avez rejoint la garde impériale sergent? répondit-il. Ou bien le BSI?

-Ni l'un ni l'autre, répondit Red. Mais c'est le meilleur déguisement pour de se déplacer dans le palais sans attirer trop l'attention, même quand on a une intelligence artificielle pour se charger des systèmes de surveillance. Le BSI ne voit ni n'entend rien de ce qui se passe dans cette pièce depuis que nous y sommes entrés.


Le gouverneur fronça les sourcils.


-Vous êtes très imprudente, sergent. Je pourrais vous dénoncer.

-Comme vous pourriez déclencher l'alarme de votre bureau et ameuter la garde. Mais vous ne l'avez pas fait.


Il grimaça. Ce genre de jeux n'étaient pas son fort. Il était un militaire, pas un politicien malgré son rang de gouverneur.


-Vous pourriez être des agents provocateurs, lâcha-t-il. Venus tester ma loyauté.

-Franchement, vous croyez que le BSI s'ennuie encore avec ça? répliqua Red. S'ils vous soupçonnaient de trahison vous seriez déjà mort ou en cellule.


Vao devait admettre que c'était un bon argument.

La jeune femme s'avança. Son regard avait changé depuis la dernière fois qu'il l'avait vu; plus froid. Ou brûlant. Il n'eut pas beaucoup de mal à imaginer ce qui avait pu occasionner ce changement.


-Mes condoléances pour Varig, déclara-t-il sincèrement. Je sais à quel point vous étiez proche.

-Merci gouverneur, affirma Red. Mais je ne peux pas encore prendre le deuil; d'abord je dois venger sa mort.


Le gouverneur observa la jeune femme, et le garde qui l'accompagnait.


-Vous savez donc qui a...

-Ca crève les yeux, j'ai appris la politique avant de savoir tenir un fusil. Nina Septime l'a fait nommer régent dans le seul but de l'assassiner puis d'utiliser sa mort pour justifier son coup d'état.


Sigel n'était pas surpris. Beaucoup de gens y avaient pensé, même si peu osaient l'exprimer à haute voix dans l'environnement ultra surveillé du palais. On avait vu des gens arrêtés pour beaucoup moins que ça.


-Pourquoi êtes vous venue, sergent? demanda-t-il.

-Je compte tuer Nina Septime, reprendre notre Empire à l'usurpatrice et ses serpents. Et j'ai besoin de votre aide.


Red venait de lâcher sa bombe sans ciller. Elle semblait déterminée, mais Sigel avait appris à la dure à se méfier des femmes criant vengeance. Surtout celles capables de traquer et d'abattre un dragon de Maridun.


-Même si je partageais votre sentiment... Je ne vois pas comment je pourrais vous aider. Le BSI tient le palais.

-Nous avons un plan pour le leur reprendre.

-Le BSI surveille tout le monde, insista-t-il. Vous ne parviendrez pas à organiser une opération d'ampleur sans qu'ils le sachent. Si vous croyez le contraire c'est qu'ils vous manipulent.


L'affirmation fit passer une ombre menaçante sur le visage de la jeune femme.


-Chaque jour qui passe, ils resserrent leur griffes, cracha-t-elle. On doit tout tenter tant qu'on le peut encore; si on hésite, si on tente de jouer la prudence, on est morts. Mais nous ne sommes pas idiots; notre plan a de sérieuses chances de réussite.


Vao resta silencieux. Il avait envie de la croire. De foncer et d'envoyer au diable les conséquences au lieu de se terrer comme un rat dans son bureau. Mais pouvait-il prendre le risque? Il aurait aimé avoir Calixte auprès de lui. Sa femme était bien plus fine politicienne que lui, elle aurait sûrement eu un bon conseil. Malheureusement, ou heureusement, elle n'avait pas de rôle officiel et se trouvait donc hors du palais.


Jusqu'ici silencieux, le second garde retira son casque.


-Lieutenant Mora, se présenta-t-il. De la garde impériale. J'ai servit sous vos ordres à Crustai, c'est un plaisir de vous revoir malgré les circonstances.


Il échangea un bref regard avec Red. Celle-ci hocha la tête. Etrange époque se dit Vao, où un officier de la plus prestigieuse unité thrawnienne semblait prendre ses ordres d'un sergent.


-Général, le contrôle du BSI est plus fragile que vous semblez le penser. La révolte gronde dans l'armée, la flotte et même ici au palais. Tout ce qui manque, c'est une étincelle.

-Et je compte allumer un putain de brasier, reprit Red. Dans trois jours, Nina Septime va organiser une exécution publique. Plus d'une centaine de responsables impériaux hostiles à sa politique vont être tués en direct pendant qu'elle s'adressera à l'Empire depuis le palais pour légitimer son coup d'état.


Elle s'avança.


-Le plan est simple. Nous allons nous emparer du palais, tuer Nina Septime et utiliser la diffusion pour soulever l'Empire contre le BSI.

-Très simple, admit Vao.

La Dernière Étoile - Tome 2 : ChuteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant