"C'est gentil, mais j'aimerai comprendre. Pourquoi m'offrez-vous ça au juste?" je demande d'un ton ferme que je ne me connaissais pas.

        J'ai bien remarqué que cet homme n'est pas de nature altruiste. Hunter se masse la nuque et plisse un peu les yeux.

        "Franco a dessiné ces esquisses il y a quelques temps, mais ne voyait pas en eux de futurs chef d'oeuvres. Aussi il me les a confié dans cette même boîte pour que je m'y penche et leur trouve quelque chose à exploiter. Mais ce n'est jamais arrivé, et ça me déçoit de les abandonner" il fait une pause puis se reprend. "En sachant que votre regard est divergent, je vois en vous les offrant, une chance nouvelle pour eux d'apparaître bientôt peut-être sur une toile qui sait ?"

        Son laïus -et je sais que j'exagère en le désignant ainsi- me touche. Je me sens flattée d'être prise pour une sorte de dénicheuse d'idées exploitables. Je me calque de quelques pas pour laisser Hunter entrer dans mon appartement.

        Il s'éxécute sous mon regard. Comment peut-il ne pas avoir froid alors que dehors la neige et la pluie menace ? Il me fait penser à Ian mais je chasse cette pensée. Il est hors de question que j'associe Hunter à cet enfoiré.

        Je propose à Hunter de s'asseoir sur l'une des chaises de la table à manger, pendant que je cours à la cuisine chercher de quoi manger. Je suis une bonne hôte.

        "Comment avez-vous su où j'habitais ?" je me risque à demander depuis la cuisine.

        J'ai le droit et l'obligation de savoir cette information.

        "Ton amie Naomi m'a été d'une aide considérable" se contente-t-il de répondre.

        Naomi.

        Evidemment. Cette femme ne sait pas tenir sa langue mais je la reconnais bien là. Il a du conserver son numéro aussi quand mon portable était en sa possession.

         "Je vois" je réponds sèchement.

        Mon ton est froid mais peu m'importe, je ne voulais pas qu'il vienne ici. 

        "Tout va bien ?" il demande soudain.

        Depuis quand se soucie-t-il de moi ? Je pourrais presque en rire si j'étais seule. 

        "Parfaitement bien" je rétorque en sortant deux flûtes et une bouteille de vin blanc que je découvre.

        J'éteins aussi la bouilloire à l'origine prévue pour mon thé.

        Je reviens dans le salon armée de mes coupes et de ma bouteille. Hunter observe le crépuscule et j'attrape une chaise pour me positionner à sa gauche.

         Ses yeux se posent enfin sur moi ou plutôt sur mon pyjama et je comprends que j'aurai du en profiter pour me changer aussi. Mais je suis chez moi donc si ça ne lui plaît pas qu'il dégage. 

        "Donc tu as vu Franco ce matin, il me semble" constate-t-il en posant une main sur la table.

        Deux pensées me traversent l'esprit aors que je souris sans raison. La première, c'est le fait que Hunter soit passé au tutoiement aisément avec moi, et la deuxième c'est la rapidité avec laquelle il entame un sujet précis. Il est direct, très bien. Je peux l'être aussi.

         "C'est vrai oui. C'est un très beau jeune homme ce Franco"

        A la tête qu'il fait, je pense que son niveau d'étonnement frôle le paroxysme. C'est un mélange entre la surprise et le cernement. C'est assez étrange mais ça me plaît. Enfin ça lui va bien.

        "Il est marié si ça t'intéresse"

        Je lâche un léger rire. Je ne m'attendais pas à ce genre de réponse. Il me prend au dépourvu et je rigole parce que c'est tout ce que j'ai envie de faire à ce moment.

        Je me décide finalement à le servir. Hunter suit mes gestes du regard en silence et je m'éxécute tranquillement.

        "Ca fait longtemps que tu vis ici ?" me demande-t-il soudain.

        "Euh, quelques mois oui" je réponds hésitante.

        Je pensais que je ne l'intéressais pas. A quoi joue-t-il ?

        "Et tu n'as pas de colocataire, si ?" poursuit-il en m'examinant toujours.

        Je finis de nous servir et je l'observe. Je regarde ses yeux plus précisément.

        "Disons que je n'y ai jamais pensé, je n'ai pas besoin de m'encombrer avec quelqu'un pour partager cet endroit"

        Un nouveau sourire complice se dessine sur son visage. Il porte la coupe à ses lèvres et je fais de même.

        "Je comprends tout à fait" lâche-t-il en posant la flûte sur la table.

        "Vous comptez manger ici ?" je lui demande ensuite, ayant du mal à le vouvoyer.

        Le soir où je suis restée dormir chez lui, il a essayé de me nourrir. Mais ça n'a pas été très concluant. Ma phrase sonne comme une sorte de provocation morale, dans le sens où moi je le nourrirais. Je ne suis pas déçu ou furieuse qu'il ne l'ai pas fait l'autre soir. Mais bon, c'est toujours mieux d'être bien reçu.

        "Je ne sais pas, tu es susceptible de me reçevoir ?" dit-il en se pinçant les lèvres.

        Hors contexte, je lui aurais sans doute foutu une baffe.

        Je me contente de sourir. Envisager de passer la soirée avec quelqu'un d'autre que la télé ou Naomi allait littéralement bousculer mes habitudes. Mais dans le bon sens du terme.

        Je ne sais pas pourquoi, mais je sens le comportement de Hunter changer. Ce n'est pas pour me déplaire mais je trouve ça un peu précipité. Je ne m'y attarde pas et me dirige d'un pas ferme vers la cuisine.

        "J'aurai plus de vaisselle à faire" je lance sur un ton ironique en me levant.

        Sa réponse ne tarde pas à atteindre mes oreilles.

        "Tu as un lave-vaisselle non ?

        Je souris mais il ne le voit pas. Je suis face à ma cuisine, prête à y attendre. Je fais volte-face et le fixe.

        "Oui et alors ?" je demande en posant mes mains sur les hanches.

        Hunter croise maintenant les bras.

        "Alors je t'aiderais à le remplir" répond-t-il doucement.

        Je suis déroutée par sa réponse. Ce n'est pa le genre d'hommes à faire ça. Ni à rester chez moi. Je ne sais pas même pas quel genre d'hommes il est d'ailleurs !

        J'entame la cuisson d'un rôti accompagné de haricots et de pommes de terre nouvelles. Hunter reste sage. Bien.

        Alors que je place le rôti dans le four, on sonne à la porte. Qui peut bien vouloir débarquer chez moi à cette heure-ci ?

        Je vais en direction de la porte pour ouvrir quand je me rends compte que Hunter s'en est chargé au bruit de clé dans la serrure. Je vois, monsieur veut se la jouer "à l'aise".

        J'entends très distinctement le son d'une voix. Une voix que je connais parfaitement.

        "Bonjour jeune homme, je suis Crista Viola, la mère de Rain"

      

FIN DU CHAPITRE ONZE

                Okay, ce chapitre a prit du temps à se faire, mais l'inspiration n'était pas au rendez-vous, et même pas maintenant je ne suis pas très satisfaite de ces lignes. En attente du chapitre douze ?

HunterWhere stories live. Discover now