Jour 5 : Mille euros ? Tu peux mieux faire, mon gars !

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Oyez ! Oyez ! Braves gens ! Le gouvernement demande aux entreprises de verser à leurs vaillants employés encore présents sur le front une prime de mille euros !

Cette annonce me laisse un drôle de goût dans le fond de la gorge. Serait ce une prime de risque bien trop maigre ou une carotte rabougrie ?

C'est aussi l'occasion de m'interroger sur la raison qui me pousse à poursuivre le travail. Dès que le confinement a été déclaré et que le supermarché est devenu le poumon d'une société apeurée, je savais que je devais poursuivre ma tâche. Mais pourquoi ? Parce que je mettrais mon équipe en difficulté en désertant ? Parce que mon minuscule salaire serait certainement amputé ? Oui, certainement. Mais il y a autre chose. Un angle de vue différent que mon subconscient se paye sans me demander mon avis : le sentiment d'être utile en faisant un métier jusqu'ici amplement dévalorisé.

Ma fille me confiait il y a peu qu'une des insultes préférées de l'un de ses camarades de classe était le fameux " tu finiras caissière". Ambiance.

Et pourtant, grâce à nous, vils employés sous payés et méprisables, notre petite société s'évite bien des soucis. Et des émeutes.

Ma sœur est infirmière. J'ai bien conscience que sa tâche et la mienne n'ont forcément pas les mêmes répercussion. Mais aujourd'hui, si le monde a désespérément besoin d'elle et de ses collègues, ma tâche et celle de mon équipe est également plus que nécessaire. Toutes proportions gardées, la petite caste des employés de supermarché est reconnue indispensable, elle aussi.

Et si toutes les castes inférieures de notre société étaient enfin rémunérées dignement ? Parce que les mercis, c'est bien mais que les sous, c'est mieux. 

Journal d'une employée de supermarché.Where stories live. Discover now