CHAPITRE 34 - PARTIE 2 : "Cache-toi !"

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Rythmées par des multitudes de sourires et de plaisanteries en tous genres, les heures défilaient à toute allure entre musiques entraînantes, rires incessants, diverses boissons, alcools pour les autres, coca pour moi et permanente bonne humeur, partagée par tous. L'angoisse d'être surprises, quelques heures auparavant, par un des invités dans la salle de bain s'était à présent largement dissipée pour laisser place à un bien-être qui souhaitait éclore, un bien-être que nous aurions aimé préserver à tout prix. Ce désagrément que nous avait infligé cette délicate situation ne nous avait guère empêchées de poursuivre la soirée en demeurant proches et attachées. Nous n'y pensions plus. Nous nous contentions simplement de profiter de cet instant tel qu'il se présentait à nous. Dans la pièce régnait une plaisante odeur d'enjouement, d'amusement et de sérénité et, même en étant parfaitement lucide, j'ignorais totalement qu'un élément pourrait venir perturber à lui seul cette atmosphère de paix qui semblait vouloir imprégner les lieux indéfiniment.

Alors qu'il se faisait tard, alors que l'heure de mon retour chez moi approchait à grands pas, mon amie nous proposa discrètement de rester dormir chez elle, ma copine et moi. Nous étions ravies, cela serait une merveilleuse occasion pour finir la soirée de la plus belle façon qui soit. Une nouvelle fois, la possibilité de m'endormir avec Noémie dans mes bras m'était offerte, ces précieuses minutes d'une si rare intensité, cette chance de l'entrevoir au creux de la nuit à travers l'obscurité que seule la lune prétendait briser. Cette occasion, avant de pouvoir en profiter, il me restait encore à la saisir...

D'ailleurs, pour Noémie, ce fut simple : un bref message à sa maman pour la prévenir qu'elle ne rentrerait pas et ce fut réglé. Pour ma part en revanche, cela s'annonçait très corsé. Après avoir longuement réfléchi à la façon dont j'allais bien pouvoir m'y prendre, j'envoyai finalement à ma mère la question fatidique à laquelle je ne pouvais échapper :

- "Maman, est-ce que je peux rester dormir chez mon amie s'il te plaît ? Elle m'a proposé de rester étant donné qu'il est tard."

Un message, pour lequel la réponse ne se fit guère attendre :

- "Non non, tu rentres dormir à la maison comme on l'avait prévu. A tout à l'heure, bisous."

Dépitée, je m'isolai immédiatement dans un coin de la pièce où le tumulte de la bonne humeur, des rires et de l'agitation des autres invités ne me parvenait plus. Je n'avais plus envie de sourire ou de faire semblant. Ma mère s'était montrée plus que catégorique. Je ne savais que faire pour lui faire accepter cette proposition. J'avais la terrible sensation de perdre peu à peu cette tendre image de Noémie s'endormant dans la chaleur de mes bras. J'observais autour de moi entre les quatre murs de cette pièce et j'enviais toutes ces personnes de mon âge qui avaient l'air si libres, si indépendantes, si émancipées de leurs actes. Je fus vite rejointe par Noémie et une de nos amies. Elles vinrent s'asseoir avec inquiétude auprès de moi dans un silence accablant, un silence que mon amie finit tout à coup par déchirer avec fracas :

- "Et pourquoi tu n'essaies pas de l'appeler pour lui demander de vive voix ? Peut-être que ça sera différent que par message, non ? Tu ne crois pas ?"

Mon regard vide de tout l'enchantement qui s'y trouvait peu avant se tourna instinctivement vers Noémie.
Par un discret hochement de tête, elle semblait approuver la solution de notre amie :

- "Ce n'est pas idiot, tu devrais essayer...

- Oui, je veux bien tenter, mais elle ne changera pas d'avis. Je la connais. Et même si elle accepte, il n'en résultera rien de bon, je crains le pire, croyez-moi."

Je mis un certain temps à me décider réellement. Je n'étais pas convaincue de cette idée même si je devais admettre qu'il s'agissait de ma dernière chance. Le "bip" du téléphone fixe de notre amie, qui se faisait entendre à chaque chiffre sur lequel j'appuyais pour composer le numéro de portable de ma mère, m'effrayait. A chaque chiffre, je croyais y renoncer, à chaque chiffre, l'hésitation de mon cœur se faisait plus ardue. Mon esprit était emprisonné entre les griffes d'une anxiété peu commune. Et si ce que je m'apprêtais à faire empirait la situation ? Et si je me perdais dans mes mots en tentant en vain de m'expliquer pour défendre une cause que je ne gagnerais jamais contre elle ?

COUPABLE D'ÊTREWhere stories live. Discover now