CHAPITRE 25 - PARTIE 1 : "Jamais un garçon"

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A ce moment même où la question déferla jusqu'àmes oreilles et résonna en moi tel un tonnerre, mon cœurmanqua un battement et je sentis le monde entier se taire.Un tressaillement me fit frémir. Le temps, les mouvements,tout semblait ralentir. Cette question eut l'effet d'uneexplosion en moi, une explosion de force, de peur, decourage, de folie, de tout à la fois. Je ne parviens pas àtrouver les mots convenables pour expliquer ce qui m'estpassé par la tête à ce moment précis mais c'était comme sila lettre que j'avais écrite était tombée dans l'oubli. Leregard de ma mère était, sans en douter, le plus écrasant etle plus étouffant. Je n'avais, jusqu'à ce jour, jamais trouvé la force nécessaire pour entamer le sujet avec elle alorsj'avais eu l'idée de cette lettre qui me servirait de passerelleafin de l'atteindre et de sentir enfin la flamme de ce secretqui me consumait s'éteindre.

Aujourd'hui, ma mère avaitjustement amené ce sujet dont j'avais si peur depuis silongtemps. Alors, la lettre n'existait plus dans ma mémoireet instinctivement j'eus la sensation d'avoir trouvé le bonmoment pour tenter de l'émouvoir. Je pensais que c'étaitune bien meilleure décision que je m'exprime par moi-même, que je saisisse l'occasion en puisant mon couragedans la force des mots que j'avais dessinés sur ce papierflétri par l'usage de ces maintes et maintes relectures : 

- "Alors? Tu ne m'as pas répondu?

- Eh bien, il faut que je te dise quelque chose maman,quelque chose que je veux te dire depuis longtemps mais jen'y arrive jamais, excuse-moi ce n'est pas contre toi, je n'aijuste pas trouvé le courage plus tôt.

- Dis-moi, tu me fais peur ! Tu sais que tu peux tout medire, je suis ta mère. 

- Je sais mais je ne sais pas de quelle façon tu vasréagir ni comment te le dire... Eh bien voilà, ce n'est jamaisd'un garçon dont je tombe amoureuse, mais d'une fille.Jamais un garçon, jamais la moindre attirance pour l'und'eux, jamais. Je n'arrive pas à l'expliquer, je te prometsque je me suis battue contre ces penchants maman maisrien n'y fait. Strictement rien. J'ai prié Dieu durant denombreux soirs, je l'ai supplié de m'aider à changer pour nepas te décevoir. C'était si lourd à porter depuis quelquestemps que j'étais obligée de te le dire. J'avais mes raisonsde te le cacher pendant autant d'années, je ne voulais pasque tu supportes toutes ces confessions, mais rien, pasmême le temps, n'aura eu raison de mes appréhensions." 

Ça y est, je l'avais dit, c'était fait, c'était fini. Le poidsd'un siècle s'échappa hors de moi. Je me sentis m'envoler,complètement libérée. C'est étonnant et complètement insensé cette frayeur que l'on peut ressentir à l'idée de sedévoiler ainsi à ces parents. Nous devrions tous avoir lacertitude qu'ils nous accepteront tels que nous sommes,tels qu'ils nous ont mis au monde mais malheureusement, iln'en est rien et nous vivons avec la peur constante d'êtrejugé par tous, par nos amis et même par nos propresparents. 

Au moment précis où ma dernière phrase s'enfuit hors demoi, mes yeux se fixèrent sur les siens et j'aperçus la lutteà laquelle elle se livrait, je ressentais dans son regard toute l'incompréhension et le désarroi, l'agitation et le troublequ'elle endurait. 

- "Ça ne m'étonne pas du tout. Je le savais depuis ledébut. Ton père et moi nous nous en doutions depuistoujours. D'ailleurs il serait bien que tu le lui dises aussiquand même." 

Nous cessâmes rapidement d'en parler. Je sentaisqu'elle avait besoin de se retrouver seule avec elle-même. Je pressentais la peine qu'elle avait à démêler toutes lesémotions qu'elle ressentait, à se dépêtrer de tout cevacarme qui l'habitait, à se libérer des chaînes qui lacontraignaient au chaos. D'ailleurs, moi aussi j'avais besoinde prendre du recul.Lorsque j'appris la nouvelle à mon père, j'eus lasensation de revivre la même situation qu'avec ma mère. Iln'y eut aucune réaction colérique ou brusque, aucuncomportement agressif pas même le moindre débordement. 

J'ignorais encore totalement que les réactionss'installeraient avec le temps, j'ignorais tout à fait ce à quoij'allais devoir faire face dans quelques temps.

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