Chapitre 5

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Je me réveillai dans une pièce inconnue. Ce n'était ni le pont d'un bateau, ni une pièce tout droit sortie d'un hôpital. Ça devenait une manie, de me réveiller dans un nouvel endroit à chaque fois.

J'étais dans une chambre de bonne taille, avec un lit démesuré, un bureau, une chaise, et une commode. Naturellement, je me trouvais dans le lit, confortable, je devais l'admettre. Il faisait jour dehors, car le hublot éclairait la pièce.

Je me relevai en position assise, et mes yeux rencontrèrent leurs doubles. Je jugeai l'état de mon reflet dans le miroir. J'avais toujours un bandage m'enserrant la tête et un nouveau, au cou. J'avais franchement mauvaise mine et mes yeux semblaient plus sombres.

Des coups discrets se firent entendre à la porte.

Oh mais je vous en prie, qui que vous soyez, entrez.

Une tête blanche dépassa du battant. L'ours polaire me regarda avec surprise, ne s'attendant manifestement pas à me voir éveillée. Il sortit finalement de sa torpeur et se précipita dans le couloir, sans prendre la peine de refermer la porte et en hurlant de sa voix haut perchée :

- Capitaaaaaine, elle est réveillééééeee !

Je n'avais pas le courage d'affronter le capitaine. Il était à la fois très beau et très effrayant. Il me donnait l'impression qu'il allait m'engloutir dans les ténèbres de son regard gris, mais en même temps il semblait ne rien prendre au sérieux.

Il apparut sur le pas de la porte, s'appuyant au chambranle, et me jaugea.

- T'as meilleure mine, on dirait, sourit-il.

Je lui lançai un regard exaspéré. J'avais la tête de quelqu'un qu'on venait de déterrer, sûrement l'humeur aussi, et lui arrivait avec son humour nul et son grand sourire. Je me rallongeai pour éviter son regard scrutateur, mais l'entendis s'avancer vers moi.

- Tu sais, je t'ai quand même sauvé la vie, tu pourrais faire l'effort de me remercier.

Je détestai ce genre de personnes. Il faisait de l'humour sur mon incapacité à parler. Ça me rendait malade et, pour ne rien arranger, je sentis les larmes affluer. Je n'avais même plus envie de les refouler. A ce stade, j'aurais fait n'importe quoi pour aller mieux. Pleurer était inutile mais au moins, peut-être cela allait-il me soulager. Alors je me retournai de sorte à ce qu'il ne me voit pas, et laissai libre cours à mes larmes.

Bien entendu, le capitaine s'était rendu compte tout seul de ce qui se passait. Cependant, il eut la délicatesse de partir.

- Tu viendras quand tu auras faim, lança-t-il en fermant la porte.

Son indifférence face à mes larmes me serra le cœur, mais je n'avais pas non plus envie de lui faire face dans cet état. J'étais seule et il fallait que je l'accepte. Je n'avais pas d'allié, pas d'ami. J'étais livrée à moi-même sur ce bateau pirate.

Rencontre hasardeuse [TERMINÉ]Where stories live. Discover now